Contribution à la discussion : La question de la taxe carbone et PCF, NPA, PG, Verts, PS

dimanche 18 octobre 2009.
 

Le 10 septembre, Sarkozy a confirmé qu’il voulait instaurer une taxe carbone. Cette taxe concernera essentiellement les carburants ainsi que le fuel et le gaz nécessaires au chauffage.

Une opération en faveur des patrons

Pour les entreprises, cette taxe carbone sera en réalité une bonne affaire. Son coût (inférieur à 2 milliards d’euros) sera plus que compensé par la réforme de la taxe professionnelle. Cette dernière réduira les taxes pour la plupart des entreprises. Le volume global de réduction pour l’ensemble des entreprises est estimé à 5 milliards au moins, 8 selon certains calculs. Le gain pour les entreprises sera donc de 3 à 6 milliards.

Les collectivités locales perdraient ainsi 5 à 8 milliards de recettes. En théorie, l’État compensera. Même si cela était vrai, cette compensation se fera par la hausse des impôts et taxes prélevés par l’État. Au final, ce seront donc les contribuables, notamment les salariés, qui vont payer ce nouveau cadeau au patronat.

Une soi disant restitution

En ce qui concerne les particuliers, si l’on en croyait Sarkozy, cela ne serait pas un nouvel impôt, car cette taxe serait restituée sous forme d’une réduction d’impôt sur le revenu, ou d’un "chèque vert" pour les foyers qui ne sont pas imposables.

Mais la « restitution » sera inégale selon les particuliers. Elle sera plus importante à la campagne, où domine l’électorat de Sarkozy. Les plus taxés seront les salariés travaillant loin de leur domicile et qui sont contraints d’utiliser leur véhicule personnel. Ceux qui occupent un logement ancien mal isolé contre le froid seront également perdants.

Et ce n’est qu’un début : Fillon a proposé 14 euros par tonne de CO2, puis Sarkozy a avancé 17 euros (après avoir aimablement discuté avec Cécile Duflot…). Mais tous annoncent que ce n’est que le début : en juillet, Rocard fixait l’objectif de 100 euros la tonne pour que cette taxe soit « efficace »……

Un fardeau supplémentaire pour les moins fortunés

Sarkozy affirme : l’objectif est « d’inciter les ménages et les entreprises à changer leurs comportements en matière de consommation d’énergie ». Cette taxe prend donc un caractère punitif : les « « ménages » sont accusés, par leur consommation, d’être responsables du dérèglement climatique par leur consommation de produits carbonés… ce sont donc « les ménages » qui seront punis s’ils persistent à ne pas réduire leur consommation. Mais les « ménages » est une formule mensongère qui cache le réel. Il y a d’un côté les jeunes, les salariés et les retraités, …dont le pouvoir d’achat diminue avec la crise, qui ont les pires difficultés à payer les factures de chauffage et de carburant lui-même surtaxé.

Et il y a les rentiers, la bourgeoisie. Ceux-là ne vont pas renoncer à leurs avions et yachts. D’autant moins qu’ils récupèrent au centuple les fruits de l’activité pétrolière. Rappelons que les dividendes distribués par Total dépassent le volume de ce que peut rapporter la taxe carbonne. Les détenteurs de capitaux se moquent tout autant de l’environnement que de la santé de la population. Leur seul critère est la recherche du profit et ils ne s’inquiètent de l’environnement que lorsque sont menacés leurs lieux de vacances (stations de ski, îles coralliennes… ) ou que les profits de certaines activités sont compromis (…épuisement des gisements pétroliers les moins coûteux à exploiter).

Alors, ils créent de nouveaux impôts pour les plus pauvres.

Une taxe sur la consommation en place de l’impôt direct

Une taxe sur la consommation aggrave toujours la situation de ceux qui ont les plus faibles revenus alors qu’elle est indolore pour la bourgeoisie. Seul l’impôt direct et progressif, sur le revenu et sur la fortune, peut épargner les moins riches et toucher fortement les hauts revenus (tandis qu’une taxe sur la consommation prélève un pourcentage uniforme).

Et le fait que cette taxe carbone puisse être éventuellement restituée ne change rien au problème de fond : car on va remplacer une fraction de l’impôt direct (sous la forme d’une « restitution ») par un impôt sur la consommation qui n’aura d’effet contraignant que pour les pauvres. Le grand bourgeois se moquera de ces taxes. Ainsi, non seulement le capitalisme ne restitue aux salariés qu’une misérable partie de la plus value que les travailleurs produisent, mais en plus, la bourgeoisie s’arroge désormais le droit de décider comment le travailleurs doivent utiliser leur salaire ! Le « vélo pour les prolos », même s’ils travaillent à 20 km de leur domicile…et de la viande rouge une seule fois par mois (parce que les ruminants, il paraît que ça rumine pour aggraver l’effet de serre…) !

On ne peut préserver à la fois le capitalisme et l’environnement

On considère que la consommation de carbone est un facteur majeur dans les bouleversements climatiques engagés ou à venir. Si cela est vrai, c’est aux capitalistes de payer car c’est la course au profit qui est responsables des choix économiques faits durant deux siècles. Ainsi, ce n’est pas en surtaxant la population laborieuse que l’on pourra développer de nouvelles formes d’énergie aujourd’hui plus coûteuses à mettre en œuvre. Ce n’est pas la « consommation » que l’on doit orienter, mais la production donc l’investissement. Ce qui implique par exemple de déposséder les actionnaires des entreprises pétrolières, d’exproprier ces groupes, et d’utiliser leurs profits afin de développer la Recherche et l’investissement dans des techniques moins polluantes (en 2008, le groupe Total a distribué 6,1 milliards d’euros aux actionnaires sous forme de dividendes et de rachats d’actions, et a investi 14 milliards supplémentaires dans le pétrole et le gaz).

Dans l’immédiat, il s’agit de mettre en échec le projet de Sarkozy, ce qui implique que l’unité se réalise pour le retrait de ce projet, et que soit refusée toute caution à ce projet

Sarkozy prévoit ainsi que serait mise en place une « commission indépendante », qui suivra la mise en oeuvre de cette nouvelle taxe et son développement ultérieur. Cette commission sera composée d’experts, et d’élus qui seront choisis de « manière paritaire dans les rangs de l’opposition et de la majorité ». Le but de Sarkozy est donc d’associer le PS (mais pas seulement …) à la mise en œuvre de sa politique. Le combat pour le retrait de ce projet implique donc aussi que le PS et le PCF annoncent par avance que si ce projet devait voir le jour, ils boycotteraient cette commission. Mais le plus urgent est d’empêcher le vote de ce projet.

Pour un front commun contre la taxe carbone

De manière instinctive et parfaitement juste, l’immense majorité des salariés, de la population, rejette ce projet de taxe : il est donc non seulement nécessaire mais possible de faire échouer le projet de Sarkozy.

Encore faut il qu’aucun des partis politiques qui disent défendre les salariés ne se fasse complice de cette opération. Or Sarkozy espère bien avoir un appui substantiel de ce côté-là aussi. Ainsi, avant l’été, avait il confié à Rocard le soin de préparer le travail ; et en juillet, le Parti socialiste avait déclaré que « Le Parti socialiste est favorable au principe d’une Contribution Climat Energie, sur la base de plusieurs propositions faites aujourd’hui par Michel Rocard. Mais le Parti socialiste doute de la réelle motivation du gouvernement (..). Pour qu’une Contribution Climat Energie soit vertueuse, écologiquement efficace et socialement juste, elle doit respecter au moins quatre conditions (…) » (Cf. annexe).

Il y a donc une bataille à mener pour que ce parti cesse toute forme de soutien à la taxe carbone. Elle n’est pas impossible. Déjà, du fait de l’opposition populaire, le Parti socialiste qui approuvait les projets de Rocard, se montre désormais opposé au projet gouvernemental, tout en continuant à demander que l’on taxe aussi l’électricité, et en prônant une « fiscalité écologique ».

Et le PCF ? Et le NPA ?

Ils se prononcent contre ce projet de la taxe carbone. « Il s’agit d’un hold-up fiscal qui ne dit pas son nom », déclare le NPA. Mais l’argument mis en avant pour justifier cet abandon est contradictoire. La taxe aurait le défaut d’être « « inefficace et injuste ». Ces deux termes sont répétés en boucle par quasiment toutes les organisations opposées au projet de Sarkozy. Mais toute taxe est injuste. Et une taxe carbone ne serait « efficace » pour réduire la consommation de carbone que si ….elle était dix fois plus brutale, c’est-à-dire dix fois plus « injuste »… !

Et le Parti de Gauche ?

Dès juillet, le Parti de Gauche a critiqué le projet de Rocard. Et il a aussitôt rappelé ses principales propositions ( par exemple : « la mise en place d’un service public de l’énergie, avec le retour d’EDF et GDF à 100% public, permettant à la fois de réduire la fracture énergétique et de planifier, sur le long terme et de manière volontariste, la nécessaire transition énergétique » , « un plan d’investissement massif dans les énergies renouvelables », « la mise en place d’un vaste plan de rénovation et d’isolation des logements ainsi qu’un plan de développement des transports les moins polluants à l’échelle du territoire (transports en commun de passagers, frêt ferroviaire et navigation fluviale) »….. Mais ces propositions sont elles mêmes mêlées de considérations fort discutables. Ainsi, fallait –il titrer le communiqué du 31 juillet : « Une occasion manquée pour la taxe carbone ! » et expliquer : « la taxe carbone proposée par la commission Rocard présente malheureusement de nombreuses insuffisances » ? Cela signifiait qu’il pourrait y avoir une « bonne « taxe carbone

Et fallait-il, de la même manière que le Parti socialiste, se plaindre que « cette taxe carbone exclut l’électricité d’origine nucléaire et risque donc d’entraîner un report vers le chauffage électrique dont le rendement énergétique est très faible et qui grève chaque hiver le budget chauffage des Français » ? Car alors, cela grèvera un peu plus le budget de tous les français…..

Et, dans les différentes positions du PG rendues publiques depuis, il manque toujours l’essentiel : une proposition de campagne politique unie pour faire échouer ce projet. Tout se passe comme si le PG était aujourd’hui mal à l’aise avec cette question. Pourquoi ne pas dire que la source de ces ambiguïtés, et du caractère timoré des positions publiées jusqu’à ce jour, se trouve dans les textes fondateurs du PG.

Ce point figure dans les 29 propositions du PG ( 01 Février 2009 ) : « Point 22 - Création du pôle public de l’énergie autour de EDF, GDF, (dont il faut remettre en cause l’ouverture du capital) et Total (qui doit être nationalisé). Développement des coopérations entre les entreprises de l’énergie au sein de l’Union Européenne pour renforcer la sécurité des approvisionnements et préparer un pôle public européen. Mise en place d’une fiscalité environnementale de type taxe carbone. La sécurité de la production et de la distribution de l’énergie ne peut être laissée aux aléas du marché, de la concurrence et du profit. »

A l’évidence, ce point n’a pas été suffisamment réfléchi, on n’est pas allé à l’essentiel : toute taxe sur la consommation (de carbone comme d’électricité !) est une taxe supportée par les salariés. Le PG devrait donc rectifier de toute urgence et retirer cette proposition de son programme s’il veut être compris des couches populaires qu’il souhaite conquérir.

Les Verts :

Daniel Cohn-Bendit a jugé « ridicule » et « aberrant » la prise de position de Ségolène Royal et des dirigeants socialistes sur la taxe carbone. La fiscalité écologique est « une nécessité, une urgence » affirme t il. Quant à Cécile Duflot, elle répète (début septembre) : "Il y a un certain nombre d’avancées mais il y a surtout un vrai problème, c’est que l’électricité ne fait pas partie de ces annonces."

Parti socialiste (Communiqué du 28 juillet ; Laurence ROSSIGNOL, Secret.Nat. à l’environnement et au développement durable).

« Le Parti socialiste est favorable au principe d’une Contribution Climat Energie, sur la base de plusieurs propositions faites aujourd’hui par Michel Rocard. Mais le Parti socialiste doute de la réelle motivation du gouvernement, qui voit dans la création d’une Contribution Climat Energie le moyen de compenser la suppression la taxe professionnelle. Pour qu’une Contribution Climat Energie soit vertueuse, écologiquement efficace et socialement juste, elle doit respecter au moins quatre conditions :

• cette contribution doit être socialement juste et redistributive en direction des ménages géographiquement contraints à l’usage de la voiture. Elle doit également être assortie d’un droit opposable à l’efficacité énergétique que les locataires pourraient faire valoir à l’encontre des propriétaires ou des bailleurs négligents.

• cette contribution ne peut se substituer à la suppression de la taxe professionnelle ni être prétexte, comme le souhaitent les lobbies économiques déjà à l’œuvre, à un transfert de charges des entreprises vers les ménages.

• la contribution doit porter sur les énergies fossiles, et inclure également une modulation des tarifs de l’électricité, afin d’inciter à une baisse globale de la consommation d’énergie, pour tenir compte des coûts de construction et de démantèlement des centrales nucléaires, ainsi que des risques écologiques.

• le produit de la contribution ne peut venir abonder le budget de l’Etat et combler les déficits creusés par la politique fiscale clientéliste mise en œuvre par le gouvernement. Ce produit doit être exclusivement affecté à l’équité contributive et aux investissements nécessaires pour soutenir les énergies renouvelables et initier une politique industrielle ambitieuse dans une économie décarbonée et sobre en énergie. »

Le 31 août, le PS déclare : « Non à la taxe carbone de Nicolas Sarkozy, Oui à une contribution climat socialement juste et écologiquement efficace ». « le Parti socialiste s’oppose à la taxe carbone proposée par le président de la République, inefficace écologiquement et accroissant la pression fiscale sur les familles.

Nous prônons la création d’une contribution énergie-climat (…)

Début Septembre : Ségolène Royal se déclare opposée la taxe carbone, Manuel Valls est favorable à cette taxe (mais veut y inclure l’électricité), et Martine Aubry s’oppose à la « taxe carbone… UMP ».

Quant à Laurence Rossignol , elle déclare que le dispositif annoncé était "injuste" et que « c’est écologiquement inefficace. "Voilà comment on gâche une belle idée" ».

Contribution du 30 Septembre (Serge)


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