France Télécom : des PDG de la finance, de Lombard au nouveau Richard

mardi 6 octobre 2009.
 

Souffrance au travail . Que Didier Lombard parte ou non, son successeur, Stéphane Richard, a déjà été désigné par Nicolas Sarkozy et vient déjà de s’installer en numéro 2. Son profil n’a vraiment pas de quoi rassurer.

« Lombard démission ! » Le cri de ralliement fait florès ces derniers jours. On l’entend dans la rue lors des rassemblements de salariés de France Télécom ou dans les travées de la gauche à l’Assemblée nationale. Pour ceux qui le lancent, il s’agit d’obtenir, à travers les départs immédiats de Didier Lombard et de Pierre-Louis Wenes, son bras droit, de France Télécom, la fin d’un système de « management par la terreur », avec ses restructurations, ses mobilités forcées et sa course à la rentabilité. Une victoire symbolique mais, tous en conviennent, qui ne réglerait pas tout, loin s’en faut… Car, en fait, un successeur à la tête de France Télécom a été désigné au mois de mai dernier. Il est arrivé depuis le 1er septembre dans l’équipe de direction de la multinationale. Et s’est engagé, d’après une porte-parole du groupe, « dans une phase d’immersion ».

Le 1er janvier 2010, il doit être nommé directeur général délégué chargé des affaires internationales et ensuite, début 2011, au terme du mandat de Didier Lombard, il est destiné à diriger l’entreprise. Pour l’heure, l’homme se veut « totalement solidaire » de la direction actuelle et indique qu’il participe aux négociations sur le stress avec les syndicats : « Il est impensable que je ne sois pas associé assez directement à ça parce que le France Télécom futur, c’est moi qui aurai à en assumer la responsabilité », explique-t-il. Le patron au futur proche ou à moyen terme de France Télécom s’appelle Stéphane Richard. Et si son parcours est véritablement exemplaire, c’est surtout d’une dévotion totale aux exigences du capitalisme financier.

Un petit alchimiste de l’ultra-finance

Inconnu du grand public mais célèbre dans la haute société, le profil de Stéphane Richard, quarante-huit ans, marie le réseau du haut fonctionnaire et la fortune du pirate de la finance. De quoi fasciner au temps du sarkozysme galopant : après HEC et l’ENA, devenu inspecteur des finances, le gaillard se trouve, en 1991-1992, une place dans le cabinet ministériel de Dominique Strauss-Kahn à l’Industrie ; puis rapidement, il s’installe à la Compagnie générale des eaux et, au mitan des années 1990, Jean-Marie Messier, futur architecte de la transformation du groupe en multinationale Vivendi, le place à la tête du pôle immobilier. C’est dans ces fonctions-là qu’il fera une rencontre décisive pour sa carrière, à la fois de fonctionnaire et de financier, avec un avocat d’affaires et homme politique en pleine traversée du désert : Nicolas Sarkozy. Autre tournant, déterminant, mais pour sa fortune, cette fois-ci, en 1999 : Vivendi se débarrasse de son pôle immobilier et, plutôt que de le laisser filer alors que le prix de vente est manifestement très en dessous de la valeur réelle, Stéphane Richard et quelques compères ont l’idée géniale de le reprendre eux-mêmes, avec d’autres investisseurs, via une opération LBO (leverage buy-out : rachat par endettement avec effet levier). Au terme des différents montages, Stéphane Richard se trouve à la tête du groupe immobilier Nexity et surtout d’un pactole évalué entre 35 et 50 millions d’euros, amassés en moins de trois ans ! Grâce à l’amitié d’Henri Proglio, qui vient d’être nommé à la direction d’EDF, il prend encore la tête de Connex en 2003, la filiale transport de Veolia. Tout en continuant de participer assidûment aux activités du Trèfle, un discret petit cercle de dirigeants devenus multimillionnaires grâce aux LBO, servant à la fois pour le lobbying et les affaires…

Ami du président, des syndicalistes moins

Nicolas Sarkozy l’admire : lors de la remise de sa Légion d’honneur, au printemps 2007, le futur président de la République s’attarde longuement sur les signes de réussite de Stéphane Richard, avant de conclure : « Toi, tu as fait fortune, la mienne viendra peut-être un jour. » Et quelques mois plus tard, une fois la présidentielle remportée, il expédie son copain à Bercy comme directeur de cabinet de Jean-Louis Borloo, puis ensuite de Christine Lagarde. Chez Connex, Stéphane Richard n’a pas tout à fait la même cote auprès des salariés. À Marseille, Jean-Paul Israël, secrétaire général des marins CGT à l’époque de la reprise de la SNCM par l’attelage Butler-Connex, dénonce : « Stéphane Richard, c’est le gars qui se vante d’avoir réussi à négocier de manière fructueuse avec la CGT, c’est l’une des grandes fiertés de sa carrière, explique-t-il tout le temps, mais c’est complètement faux, on ne l’a jamais vu pour des négociations ! Ce n’est vraiment pas rassurant pour les copains qui vont devoir traiter avec lui à France Télécom… »

Thomas Lemahieu


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message