Le 7 juin, ne pas gaspiller son vote (texte du MPEP)

jeudi 21 mai 2009.
 

A moins d’un mois des élections européennes du 7 juin, la campagne électorale n’a toujours pas vraiment démarré. Les grands médias, craignant le renouvellement du phénomène qu’ils n’avaient pas anticipé en 2005 autour de la dynamique du « non » au traité constitutionnel européen, étouffent tout véritable débat d’idées. Seuls les « quatre B » ont leurs faveurs : Barnier (coordonateur de la campagne de l’UMP), Bayrou (l’enfumeur du MoDem), Besancenot (du NPA) et Bové/Cohn-Bendit (liste Europe Ecologie). Ces grands médias peuvent ainsi faire la promotion du traité de Lisbonne (les quatre « grands » partis y sont favorables : UMP, PS, MoDem, Verts) et se distraire d’une pointe d’exotisme en lançant des diversions (Besancenot).

Le M’PEP poursuit ici l’exposé des raisons qui l’ont amené à appeler à voter pour le Front de Gauche en donnant des arguments contre l’abstention, contre les listes pro-système et contre les listes de diversion.

I.- PLACER LES ABSTENTIONNISTES DEVANT LEURS RESPONSABILITÉS

Ceux qui avaient voté « non » en 2005 et qui envisagent de s’abstenir en 2009, qu’ils soient « actifs » ou « passifs », renieront non seulement leur vote de 2005, mais prendront en outre une lourde responsabilité puisque leur inertie ne fera que favoriser Sarkozy et la promotion du traité de Lisbonne.

1.- Les abstentionnistes « actifs », s’ils persistent dans leur erreur, vont aider ceux qu’ils veulent combattre

Par « abstentionnistes actifs », il faut entendre tous ceux – nombreux à gauche – qui rejettent le système de Bruxelles et avec lesquels le M’PEP partage l’essentiel des analyses.

Leur dénonciation de l’élection des représentants au Parlement européen repose sur des constats et des analyses solides :

- Les abstentionnistes « actifs » dénoncent Valéry Giscard d’Estaing (VGE) qui est parvenu à faire accepter l’élection au suffrage universel direct du Parlement européen dont la première a eu lieu en 1979, alors qu’auparavant il s’agissait d’une assemblée composée de députés des parlements nationaux. VGE n’ayant jamais été un démocrate, quels pouvaient être ses objectifs, personne ne pouvant croire qu’il ambitionnait de rendre démocratique la « construction » européenne ? Il s’agissait tout simplement de contourner les parlements nationaux dans le but de créer une instance supranationale court-circuitant la souveraineté populaire.

- Les abstentionnistes « actifs » affirment que la démocratie ne peut exister qu’au sein d’un espace national, nul n’ayant encore vu de démocratie supranationale. On peut en rêver, mais pour l’instant elle n’existe pas et personne n’a encore expliqué comment elle pouvait fonctionner.

- Les abstentionnistes « actifs » estiment que voter le 7 juin serait donner au Parlement européen une légitimité qu’il n’a pas, d’autant que ce parlement a porté atteinte à la souveraineté des peuples irlandais, français et néerlandais en votant à une immense majorité pour que les référendums qui se sont tenus dans ces pays ne soient pas pris en compte.

- Les abstentionnistes « actifs » regrettent que les députés de la gauche de gauche n’aient qu’une fonction d’alerte et de témoignage, risquant ainsi de légitimer un système non démocratique.

- Les abstentionnistes « actifs » observent que la plupart des listes en présence sont, à un degré ou à un autre, favorables à l’Europe supranationale.

- Les abstentionnistes « actifs » considèrent que la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a pour mission de « créer du droit », l’Union européenne fonctionnant selon la jurisprudence et non plus à partir du droit voté par le Parlement.

Ces arguments sont parfaitement valables, mais ils ne tiennent pas compte de la réalité de cette élection. Celle-ci, bien que portant sur l’élection des représentants au Parlement européen, ne se limite pas à ce seul enjeu. Il existe également des enjeux dépassant le simple renouvellement du Parlement européen : le sens de la construction européenne elle-même et la situation politique française (comme dans chaque pays).

Les électeurs, qu’ils en aient conscience ou non, en votant pour telle ou telle liste, voteront aussi pour une certaine conception de la « construction » européenne. Ainsi, voter pour les listes de l’UMP, du MoDem, du PS, d’Europe Ecologie reviendra à voter pour le traité constitutionnel européen et son succédané qu’est le traité de Lisbonne. C’est-à-dire pour une conception libérale, même si le discours de ces différentes listes « emballe » le paquet derrière un rideau verbal de « protection », d’ « humanisme », de « valeurs », de « social » ou d’ « écologie ». En s’abstenant de voter contre ces listes, les abstentionnistes leur laissent la voie ouverte et ne font aucunement avancer le débat.

Les électeurs, comme ils le signalent d’ailleurs dans tous les sondages, vont voter majoritairement pour des préoccupations de politique intérieure. Il existe en effet un excellent moyen de sanctionner Sarkozy et ceux qui ne lui offrent qu’une opposition molle : voter pour les autres listes. Plus précisément, aux yeux du M’PEP, c’est la liste du Front de Gauche qui, seule, possède le potentiel d’une transgression de l’idéologie européiste et de reconstruction de la gauche.

2.- Les abstentionnistes « inactifs »

Ces abstentionnistes se trouvent principalement parmi les classes populaires et les jeunes qui ont voté « non » en 2005. Ils ne s’abstiennent pas par véritable choix politique mais par insuffisance de compréhension des enjeux. Les partisans du « oui », de leur côté, participent au scrutin, il n’existe aucun risque d’abstention chez eux ! Car s’abstenir, c’est voter « oui » au traité de Lisbonne et donc annuler le vote de 2005 ! C’est une grave erreur car cet acte – ou ce non acte – n’a pas la signification politique que certains lui prêtent. Ceux qui envisagent de s’abstenir croient que tout le monde comprendra leur message ; en réalité tout le monde comprendra qu’ils n’ont rien à dire. Il suffit pour s’en convaincre d’observer les abstentions passées : elles n’ont strictement rien remis en cause ni rien changé. Elles sont même un sujet de moquerie dans les classes dirigeantes. Il ne faut donc pas rester dans son coin à ronchonner ! Même quand les chiens cessent d’aboyer, la caravane passe ! Qui ne dit mot consent !

II.- AMPLIFIER LA CRITIQUE DE LA POLITIQUE ET DES PROGRAMMES DES PARTIS ET LISTES EURO-LIBERAUX (UMP, MODEM, PS, EUROPE ECOLOGIE)

Il serait invraisemblable que les listes et partis de la « bande des quatre » (UMP, MoDem, PS, liste Europe Ecologie), qui soutiennent le traité de Lisbonne, obtiennent 75 % des suffrages comme l’affirment actuellement les sondages. Ces quatre partis et listes font de la figuration, ils simulent le débat alors qu’ils partagent le même avis sur l’essentiel : le traité de Lisbonne. Ce sont les spécialistes de l’enfumage.

1.- L’UMP veut faire de l’élection européenne un plébiscite pour Sarkozy

L’UMP est persuadée que son meilleur argument de vente est le bilan de la présidence française de l’Union européenne (juillet-décembre 2008) et celui des deux premières années du quinquennat de Sarkozy. Ainsi, le tract et l’affiche de campagne de l’UMP indiquent : « Quand l’Europe veut, l’Europe peut ! » avec la photo de Sarkozy. Michel Barnier, coordonateur national de la campagne de l’UMP confirme : « Tous unis derrière Nicolas Sarkozy ! L’UMP et la majorité présidentielle ont décidé de placer la campagne européenne sous le signe de la défense du bilan du président de la République » (Le Monde, 30 avril 2009).

La réplique à cette propagande est aisée :

- Comme président de l’Union européenne pendant six mois au moment de l’explosion de la crise financière, Sarkozy s’est montré incapable de faire prendre à l’Union les mesures de protection nécessaires sur le plan social, environnemental, économique et financier ; seuls quelques « plans de relance » nationaux ont vu le jour, en réalité des « plans de relance » des profits.

- Comme président de la République française, Sarkozy a été là encore incapable de prendre les mesures susceptibles de protéger la population des nuisances de la finance et du libre-échangisme anglo-saxons.

Michel Barnier, le coordonateur national de la campagne de l’UMP, a dévoilé sur le site Internet de l’UMP les principales propositions de la majorité présidentielle pour le scrutin du 7 juin. Il réclame une « orientation moins libérale pour l’Europe » ! Incroyable ! Il ose affirmer le contraire de ce que fait quotidiennement, depuis deux ans, Sarkozy ! Mais ce qui est intéressant dans cette proclamation, c’est que les libéraux ne peuvent même plus annoncer qu’ils vont mener des politiques libérales, ils sont obligés de les masquer tellement elles sont discréditées. Et ils sont obligés de demander un changement des politiques de l’Union européenne, tant ces dernières sont rejetées. Quel boulevard cela offrirait à la gauche pour peu qu’elle soit véritablement de gauche !

- Le journaliste demande à Barnier « Vous souhaitez une ‘‘Europe qui protège’’. Que peut-elle faire pour les régions industrielles sinistrées ? ». Réponse : « Il existe un fonds d’ajustement à la mondialisation. Nous souhaitons au moins doubler son budget, actuellement de 500 millions d’euros. […] Pour éviter que les régions soient livrées à elles-mêmes quand une entreprise européenne supprime des emplois dans plusieurs d’entre elles, nous pourrions aussi créer un programme interrégional destiné à accompagner financièrement de manière coordonnée les restructurations et les reconversions. Mais notre projet n’est pas seulement défensif. Il est temps de retrouver sur le plan économique l’audace des fondateurs de la CECA [Communauté européenne du charbon et de l’acier] quand ils ont mutualisé l’acier et le charbon européens ou celle de Jacques Delors avec la monnaie unique. »

Commentaire du M’PEP : Hypocrisie ! Ce fonds d’ajustement à la mondialisation est ridiculement sous-dimensionné, il ne sert qu’à justifier le libre-échange et les délocalisations. « Protéger », c’est interdire les délocalisations cyniquement organisées et planifiées grâce au passage de 15 à 27 pays membres de l’Union européenne (l’ « élargissement »). Quant aux modèle de la CECA et de l’euro, le premier a eu pour résultat de liquider quasiment toute la production d’acier en France et le second d’anémier le développement économique de la zone et d’entraver les exportations tout en favorisant les importations !

- Barnier veut « lever un emprunt au niveau européen ».

Commentaire du M’PEP : Démagogie ! Les traités européens n’autorisent pas l’emprunt par l’Union européenne !

- Barnier prétend « tenir à notre système de protection sociale. Cela vaut aussi pour les services publics, qu’il faudrait protéger par une nouvelle directive ».

Commentaire du M’PEP : Mensonge ! L’UMP, au gouvernement comme à Bruxelles ou à Strasbourg a voté toutes les directives de libéralisation des services publics et de destruction de la protection sociale. Les exemples sont innombrables.

- Barnier prétend « équilibrer la politique de libre concurrence » qui, pour lui, « n’est pas un objectif en soi, mais un moyen au service de la croissance et de l’emploi ».

Commentaire du M’PEP : Absurde ! La prétendue « libre » concurrence est incompatible avec la croissance et l’emploi. D’ailleurs, si on observe ces vingt dernières années, plus il y a eu de concurrence et moins il y a eu de croissance et d’emploi ! En outre, les traités européens ne permettent pas d’ « équilibrer » cette concurrence qui doit être « libre et non faussée ».

- Barnier estime qu’ « Il faut être juste avec José Manuel Barroso, qui a été un bon président » de la Commission européenne.

Commentaire du M’PEP : Hallucinant ! Barroso est probablement l’individu le plus médiocre qui ait jamais présidé la Commission européenne depuis Jacques Santer. A ce propos, ce dernier, chrétien-démocrate, nommé à la suite de Jacques Delors (et proposé par lui), membre de la fameuse boite à idées néolibérale la « Commission trilatérale », a présidé la Commission européenne de 1995 à 1999. En mars 1999, après la publication du rapport d’un comité d’experts indépendants sur les « allégations de fraude, de mauvaise gestion, et de népotisme à la Commission européenne », les membres de la Commission européenne démissionnaient collectivement. Mais il ne faut pas s’inquiéter pour l’avenir de Jacques Santer, puisqu’un an après avoir quitté la présidence de la Commission européenne, il entrait au conseil d’administration de General Mediterranean Holdings (GenMed). En 2004 il était nommé président du conseil d’administration de CLT-UFA, maison mère de M6, RTL et Fun Radio en France et filiale de RTL Group…

2.- Démasquer Bayrou et le MoDem qui ne sont que des roues de secours des classes dirigeantes

Il existe des électeurs sincères qui croient en François Bayrou et auxquels il faut dire la vérité. Leur poids n’est pas négligeable puisque les sondages donnent à sa liste pour les élections européennes de 10% à 14%, contre un résultat de 12% aux élections de 2004 et 18,5% aux présidentielles de 2007.

- Voter MoDem n’est pas un acte de rébellion contre Sarkozy et encore moins contre le système capitaliste. Bayrou, lors de la dernière présidentielle de 2007, avait pourtant réussi à capter un nombre significatif de voix qui croyaient précisément voter contre le système. C’est un leurre, un attrape-nigaud. Son dernier livre, par exemple, ne contient que des attaques personnelles contre Sarkozy. Certes Sarkozy est un personnage répugnant. Mais c’est Sarkozy et le système qu’il faut combattre ! Sarkozy n’est que le produit et un agent du système. Bayrou est contre Sarkozy, mais il est pour le système, il ne veut simplement que prendre la place sans rien changer au système. C’est comme Joffrin dans le journal Libération, le journal des Rothschild, qui veut une grande coalition anti-Sarkozy pour préserver le système et favoriser Bayrou par alliance avec le PS !

- Bayrou est un conservateur de droite ; le MoDem est un parti européiste, libéral, libre-échangiste, atlantiste… Dans son programme de 2007, il dénigrait l’impôt sur la fortune au prétexte qu’ « une nation qui accepte l’exil de ses citoyens les plus riches accepte de s’appauvrir » !

- Bayrou a fait toute sa carrière dans les cabinets et les gouvernements de droite. Le groupe de l’Alliance des démocrates et des libéraux, qui héberge les eurodéputés du MoDem au Parlement européen, vote sans aucun problème les directives ultralibérales proposées par la Commission de Bruxelles. Il a toujours soutenu les traités européens… C’était hier un fanatique du traité constitutionnel européen, c’est aujourd’hui encore un fanatique du traité de Lisbonne.

- Dans son dernier livre, Bayrou veut une France gouvernée par « les meilleurs », quelles que soient leurs options politiques. Il surfe sur le « ni droite ni gauche ». Mais partout où s’affrontent des choix de droite ou de gauche – au Parlement européen, dans les collectivités territoriales, à l’Assemblée nationale et au Sénat - le MoDem ne se trompe que rarement : il vote à droite !

- Bayrou se positionne comme le premier opposant à Sarkozy. Mais pour lui les européennes ne sont que l’antichambre des présidentielles. Il ne pense qu’à cela. Il n’est pas centriste, il est « égocentriste » !

- Bayrou ne peut se faire élire que par des voix de gauche en plumant le PS. C’est pourquoi il joue sur l’ambigüité du discours « ni droite ni gauche ». Raison de plus pour « réidentifier » la gauche, comme le propose le M’PEP.

- Bayrou est porté par les grands médias. Cette seule réalité suffit à le disqualifier, car les grands médias ne « fabriquent » que les personnages qui servent le système.

Les « 12 engagements européens » de Bayrou et du MoDem : difficile de faire mieux en matière d’hypocrisie et de double langage

Quelques exemples :

Engagement 1 : « Nous proposons une réponse coordonnée de l’Union européenne à la crise, avec un grand emprunt européen de 3 % du PIB. Nous proposons que les grandes politiques de lutte contre la crise, par exemple le plan automobile, fassent l’objet d’une démarche concertée et coopérative des États de l’Union, en tout cas de la zone euro. »

Mensonge ! Les traités européens interdisent à l’Union européenne d’emprunter. Quant à l’industrie automobile, l’élargissement de l’Union européenne aux pays de l’Est européen avait pour but d’organiser sa délocalisation dans ces pays ! Et tout cela a été soutenu par Bayrou et le MoDem !

Engagement 2 : « Ceux qui ont voulu limiter l’union de l’Europe à un marché ont trahi l’idéal européen. L’Europe ne peut pas se résumer à la défense de la concurrence en tous domaines et sur tous sujets. Pour nous, démocrates français et européens, l’exigence sociale, civique et écologique doit servir de point de repère. »

Hypocrisie ! L’origine de l’Union européenne est le « Marché commun ». Dès le départ il s’agissait d’organiser la compétition entre les travailleurs et les pays. Tous les traités européens, depuis le traité de Rome en 1957, jusqu’au traité de Lisbonne en 2008, sont fondés sur le principe de la « concurrence libre et parfaite » qui surplombe tout le reste. Et Bayrou et le MoDem y sont favorables !

Engagement 3 : « Nous demandons l’équité : pour les pays développés, les produits qui entrent en Europe doivent être soumis aux mêmes règles que ceux que nous fabriquons. Nous devons aider les pays les plus pauvres à appliquer progressivement ces mêmes règles. »

Tromperie ! Bayrou et le MoDem sont-ils désormais favorables au protectionnisme ? Mais les traités, et notamment le traité de Lisbonne soutenu par Bayrou et le MoDem interdisent le protectionnisme !

Engagement 5 : « Nous proposons que soit mis en place une harmonisation fiscale qui permette une coopération et non pas des politiques de dumping fiscal qui visent à délocaliser les entreprises des uns pour les installer chez les autres. »

Manipulation ! La concurrence est la base du système européen. Les délocalisations font partie de la politique de Bruxelles dont le mot d’ordre est : « travailleurs de tous les pays : concurrencez-vous ! ».

Monsieur Bayrou est un opposant d’opérette !

3.- Le Parti socialiste reste totalement noyé dans l’eurolibéralisme

C’est à Toulouse, le 24 avril, que Martine Aubry, la première secrétaire du PS, a tenu son premier discours de campagne. On peut en faire les cinq observations suivantes :

- Une écrasante domination du thème anti-sarkozyste dans l’argumentation du PS.

Certes, il faut faire de cette élection européenne une sorte de référendum anti-Sarkozy, d’autant que le président des la République la présente lui-même comme un plébiscite sur sa personne. Mais il faut aussi parler d’Union européenne et d’Europe ! C’est parce que le PS est d’accord sur le fond (traité de Lisbonne) avec les autres partis pro-système (UMP, MoDem et liste Europe Ecologie), qu’il préfère accentuer sa critique de Sarkozy au point d’en oublier la nature de l’élection à venir…

- Une ambigüité savamment entretenue sur les rapports entre le PS et le MoDem de François Bayrou.

François Hollande, ancien premier secrétaire du PS, dans L’Express (16 avril 2009), se propose de « clarifier les convergences et les divergences » avec le MoDem. François Rebsamen de son côté, sénateur maire PS de Dijon et proche de Ségolène Royal, est favorable à un « dialogue » avec le MoDem autour d’un « programme partagé » en vue de 2012 (Le Figaro, 4 mai 2009). Quant à Laurent Fabius, il juge Bayou « très timide » en matière économique et sociale (Le Figaro, 4 mai 2009), alors que Bayrou est un libéral pur sucre ! La voie ouverte par Michel Rocard (Le Monde, 14 avril 2007), avant le premier tout de la présidentielle, semble s’être élargie puisqu’il plaidait à l’époque pour une « alliance sincère et constructive » entre Mme Royal et M. Bayrou, puisque, selon lui, « rien d’essentiel ne sépare plus en France les sociaux-démocrates et les démocrates sociaux, c’est-à-dire les socialistes et les centristes ». aux municipales de 2008, dans quelques grandes villes, des alliances entre le PS et le MoDem s’étaient nouées (parfois même avec le PCF !), notamment à Dijon, Grenoble et Lille (au deuxième tout).

Devant cette avalanche de politique politicienne, Martine Aubry se tait. Elle devrait pourtant rappeler le texte voté par le PS le soir de son élection comme première secrétaire du PS, qui disait : « Notre stratégie est celle du rassemblement de la gauche […] nous refusons toute alliance avec le MoDem, qui prône aujourd’hui une politique économique et sociale qui se situe aux antipodes de nos orientations ». Elle devrait donc rappeler clairement qu’aucun dialogue n’est à envisager avec François Bayrou qui est quelqu’un faisant partie du dispositif des classes dirigeantes et qui doit être combattu. Le seul fait que le PS considère Bayrou comme un opposant de Sarkozy (ce qu’il est mais pour prendre la place, pas pour changer le système) conforte Bayrou dans son statut. Martine Aubry laisse donc croire que l’on peut réorganiser la vie politique autour du centre. C’est le signe de l’échec du social-libéralisme du PS et de son refus de revenir à gauche. Cette stratégie éventuelle du PS est parfaitement illusoire, car Bayrou ne veut pas d’alliance qui lui lierait les mains. Son seul objectif est d’être présent au deuxième tour de la présidentielle de 2012 face à Sarkozy et de créer une situation pour qu’une partie significative de l’électorat de gauche vote pour lui. Mais pour que ce schéma fonctionne, Bayrou a besoin de maintenir le PS dans une opposition molle et sur des bases social-libérale. Si le PS adoptait une politique de gauche, le mythe Bayrou s’effondrerait. D’ailleurs, Bayrou le dit lui-même : « Je récuse tout alignement. Je ne ferai pas de programme commun ni d’accord d’appareil » (Paris Match, 7 mai 2009).

- Des génuflexions devant l’unité des socialistes européens.

Il n’y a vraiment pas de quoi, car les socialistes européens n’ont même pas le même candidat à la présidence de la Commission, certains partis socialistes ou social-démocrates soutenant Monsieur Barroso ! Martine Aubry a mis en avant le « programme commun » du PSE pour « changer le cours de l’Europe ». Mais comment est-il possible de « changer le cours de l’Europe » lorsqu’on est d’accord avec le traité de Lisbonne ?

- L’illusion de pouvoir « changer l’Europe » à partir du Parlement européen.

Selon le PS, « Pour changer l’Europe, il faut une majorité de gauche au Parlement européen » (L’Humanité, 27 avril 2009). Au meeting de Toulouse il a même été affirmé qu’ « une victoire de la gauche au Parlement européen le 7 juin permettrait donc, dans les 100 premiers jours de la législature, la mise en œuvre de 7 mesures pour lutter contre la récession et le chômage de masse et afin de préserver la cohésion sociale. » Ainsi dans la déclaration adoptée à Toulouse à propos des enjeux des élections européennes ont peut lire l’ahurissante analyse suivante : « L’Union européenne doit changer de cap sans plus attendre. C’est la raison pour laquelle nous demandons instamment aux citoyens européens de voter lors des élections européennes du 4 au 7 juin. Si vous ne votez pas, d’autres prendront les décisions à votre place. […] Au Parlement européen, le PPE et la droite ont eu leur majorité. Nous voyons bien ce qu’ils en ont fait. C’est pourquoi notre objectif est de devenir le premier groupe au Parlement européen afin d’amener les changements fondamentaux dont l’Europe a si urgemment besoin. […] Les élections européennes du 4 au 7 juin seront l’occasion pour les citoyens d’Europe d’exercer leur droit démocratique afin de déterminer quel sera le cours futur de l’Union européenne. » Incroyable ! Croient-ils eux-mêmes à ces assertions ? Car pour changer l’Europe il faut changer les traités (on ne peut pas changer l’Europe avec les traités actuels) ; or le Parlement européen est obligé d’agir dans le cadre des traités sans pouvoir les changer. C’est une véritable tromperie des citoyens : le Parlement européen ne peut pas changer le cours de l’Union européenne.

- Le maintien du cap sur le traité de Lisbonne.

Les socialistes français disposent de plusieurs textes fondamentaux pour la campagne des élections européennes :

- Le Manifeste du PSE (Le Manifesto) adopté le 1er décembre 2008 par les leaders des partis socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes d’Europe.

- Un texte intitulé « Donner une nouvelle direction à l’Europe » adopté le 12 mars 2009 par les militants socialistes français pour « enrichir le manifeste européen, avec nos spécificités, notre approche des problèmes mais aussi certaines de nos réponses ».

- Une déclaration commune intitulée « 100 jours pour changer l’Europe : les premières mesures proposées par le PSE » adoptée à Toulouse le vendredi 24 avril, affichant 7 priorités.

Les lieux communs, niaiseries et autres hypocrisies pourraient remplir un annuaire dont quelques morceaux de choix peuvent être cités :

- « Une directive sacralisant les services publics ». Mais le PS soutien le traité de Lisbonne dont l’objectif est de pulvériser les services publics !

- « Ce n’est pas l’économie sociale de marché qui a échoué, mais le capitalisme qui a oublié le social » (Frantz MÜntefering, président du SPD allemand). Ah bon ? Le capitalisme, un jour, avait intégré « le social » ?

- « Cette crise n’est pas une fatalité : elle est la conséquence, de la cupidité et de l’irresponsabilité, et des excès des marchés financiers, ce qui nécessite une nouvelle règlementation. » Et les politiques néolibérales mises en œuvre depuis une trentaine d’années, relayées avec zèle par l’Union européenne avec le soutien des partis socialistes et sociaux-démocrates, elles n’y sont pour rien, dans la crise ?

- « Nous croyons à une économie sociale de marché qui permette à tous de mieux saisir les opportunités offertes par la mondialisation » ; « Les fonds spéculatifs doivent être contrôlés et régulés plus efficacement. » (Poul Nyrup Rasmussen, président du Parti socialiste européen). Mais c’est interdit par le traité de Lisbonne !

Au total, il est nécessaire de sanctionner le PS en ne votant pas pour ses listes. C’est d’autant plus simple que ce parti ne peut invoquer le « vote utile » en sa faveur lors de cette élection, puisqu’elle ne comporte qu’un seuil tour.

4.- La liste « Europe Ecologie » (autour des Verts) : après le social-libéralisme, l’ « écolo-libéralisme »

On se rappelle que les Verts ont soutenu le traité constitutionnel européen en 2005 et qu’ils soutiennent par conséquent le traité de Lisbonne aujourd’hui. Leurs parlementaires, à l’exception de Martine Billard, ont tous voté avec la droite et la majorité du PS, lors du Congrès de Versailles, pour empêcher la tenue en France d’un référendum sur le traité de Lisbonne. Ce simple rappel devrait dissuader tous ceux qui ont voté « non » en 2005 de porter leurs voix sur la liste Europe Ecologie en 2009, sauf à renier leur vote.

Il faut également rappeler que les Verts ne sont désormais qu’une filiale du PS qui a perdu toute indépendance.

Pour cette campagne des européennes, ils ont publié un texte intitulé « Manifeste Changer d’ère ». Ce texte, sur le plan de la rhétorique, contient d’excellentes analyses sur le bilan et la critique de la situation actuelle et ses menaces. Mais le problème de ce texte, précisément, est qu’il est purement rhétorique. Car d’un côté le verbiage « vert » présente un intérêt certain, mais d’un autre côté rien n’est dit sur le traité de Lisbonne et encore moins sur le capitalisme, silence qui annule, dans les faits, les incantations précédentes. La liste Europe Ecologie inaugure une nouvelle théorie : l’ « écolo-libéralisme ».

Quelques morceaux choisis de l’ « écolo-libéralisme » :

- « L’histoire est en suspens car la déraison s’est emparée du monde. » Et le capitalisme, n’est-il pas la cause profonde de cette situation, qui n’a rien à voir une quelconque « déraison » mais avec la recherche du profit privé maximal à court terme ?

- « Nous n’affichons ni lendemains qui chantent ni programmes miracles. Nous affirmons seulement un autre choix : celui d’une nouvelle régulation, fondée sur l’impératif écologique et social. » Il faut toujours se méfier de ceux qui renoncent aux lendemains qui chantent ou qui annoncent ne pas avoir de programme « miracle ». Car ils témoignent ainsi de leur abdication face à la lutte contre le capitalisme et de leur soumission aux forces du marché. Quant à la notion de « régulation », c’est un os à ronger que les libéraux ont lancé à tous ceux qui veulent faire semblant d’avoir quelque chose à dire sans rien changer au système.

- « Un nouvel espace politique porteur d’une nouvelle politique de régulation ne peut se concevoir d’emblée qu’à l’échelon européen puisque l’Europe est notre famille, et sans frontières puisque le monde est notre village. […] nous sommes convaincus que les Etats-nations n’offrent qu’une réponse de plus en plus partielle et inadaptée aux risques globaux auxquels nos sociétés sont confrontées ». Certes, dans l’idéal il faudrait une réponse internationale et européenne aux nombreux défis qui se posent à la planète et il faut continuer à lutter en ce sens. Mais comment faire lorsque toutes les institutions multilatérales sont aux mains des forces néolibérales, qu’il s’agisse de l’Union européenne, du FMI, de l’OMC ou de la Banque mondiale ? Il est totalement irresponsable de rayer l’échelon national, par principe, alors que c’est le seul espace où peut encore s’exprimer la souveraineté populaire, et qu’il est possible, à ce niveau, de résoudre nombre de problèmes.

- « L’Union européenne, malgré les aléas de sa construction et des pratiques trop souvent technocratiques, a bâti un espace de paix et de coopération entre les vingt-sept Etats et les quatre-vingt-trois peuples qui la composent. Elle a su s’interposer comme une force de conciliation dans les conflits. C’est un formidable acquis, une histoire positive, à rebours des visions archaïques ou souverainistes qui imprègnent encore ce continent qui était celui des guerres. » On croit rêver ! On retrouve dans cette assertion les idées reçues les plus éculées des européistes. Il faut rappeler cette évidence : une « construction » européenne a été possible parce qu’il y a eu la victoire sur le nazisme. Par ailleurs, en se liant les mains avec l’OTAN et en ayant semé et alimenté la discorde dans les Balkans, l’Union européenne est désormais du côté des fauteurs de guerre. C’est donc la paix qui a permis la « construction » européenne, et non l’Union européenne qui a permis la paix.

- « C’est aussi grâce à l’Europe que des questions vitales ont pu échapper au carcan des intérêts et des égoïsmes nationaux et trouver des débuts de réponse allant dans le sens de l‘intérêt général. L’Europe a su par exemple se placer à l’avant-garde dans la lutte contre le réchauffement climatique et les objectifs du paquet énergie-climat sont les nôtres, l’Europe a su mettre en œuvre une protection efficace des espaces naturels sur son territoire, l’Europe a eu le courage d’imposer le début d’une réglementation contraignante à l’industrie chimique… ». Ce jugement de la liste Europe Ecologie rend positif le bilan de l’Union européenne alors qu’il est négatif dans tous les domaines, particulièrement dans celui de l’environnement où l’Union européenne n’a rien trouvé de mieux que d’inciter à la création d’une Bourse des droits à polluer. C’est curieux pour une liste qui place les questions de l’environnement au cœur de ses préoccupations !

- « Les peuples boudent l’Europe parce qu’ils ne se reconnaissent pas dans ses institutions sans visage. Comment s’en étonner, dès lors qu’on leur parle surtout de compétitivité et de concurrence, comme si le marché pouvait à lui seul tenir lieu d’horizon ? ». C’est l’argument classique des européiste pour explique le rejet de ce type de « construction » européenne par les peuples. En réalité, ce rejet tient au fait que les politiques menées n’ont fait que délabrer la condition des classes populaires.

Au total, le « Manifeste Changer d’ère » publié par la liste Europe Ecologie n’évoque jamais l’absence de démocratie au sein de l’Union européenne, la politique monétaire désastreuse, les délocalisations, l’OTAN, les directives de libéralisation qui semblent même ne jamais avoir existé, le capitalisme, la nécessité de rassembler la gauche, l’eurolibéralisme… Cette liste a pour objectif, avec l’aval du PS qui saura récompenser les Verts lors des élections régionales, de ronger autant que faire se peut la liste de François Bayrou. Telle est sa mission !

III.- ALERTER CONTRE LES LISTES DE DIVERSION ET DE DIVISION

Sauf à diviser la gauche, deux listes ne servent à rien : celle du NPA (ex-LCR) et celle de LO. Cela fait trente ans que ça dure… Leurs électeurs potentiels doivent en être informés.

1.- NPA : la liste qui divise

Les sondages donnent au NPA de 7% à 9%. C’est beaucoup trop, même si la tendance est à la baisse. Ce sont des voix perdues qui portent une protestation sans débouché ni perspective. Pour porter une critique argumentée sur l’attitude des dirigeants du NPA, quelques questions de bon sens doivent être posées :

- Le NPA peut-il faire cavalier seul ? Peut-il représenter à lui tout seul toute la gauche ? Peut-il être un jour majoritaire seul (la question s’applique également à tous les partis de la gauche de gauche et aussi au PS) ? La réponse est sans ambigüité : c’est « non ». Il faut donc que le NPA, comme tous les partis de la gauche de gauche, recherche des alliances. Si le NPA se refuse à cette évolution stratégique, il restera éternellement dans la même position, oscillant selon les élections entre 1% et 7% tant que les grands médias le jugeront utile. Mais quelle perspective cela peut-il offrir à la gauche ?

- Le NPA peut-il fédérer la gauche de gauche ? La recomposition de la gauche peut-elle s’organiser autour du NPA ? La réponse est « non ». La même réponse peut d’ailleurs être faite au PCF, au PG, au MRC, aux Alternatifs, au M’PEP… Nul ne peut fédérer la gauche : ni un parti-guide, ni un sauveur suprême. L’unité des forces de gauche ne pourra se réaliser que sur une base d’égalité totale entre ses composantes. Si la perspective est celle de la prise du pourvoir, l’union de la gauche de gauche est incontournable. S’il s’agit de faire de la figuration, alors il n’y a qu’à suivre le NPA.

- La gauche de gauche, comme le fait actuellement le NPA, peut-elle limiter ses ambitions à la protection d’une prétendue pureté doctrinale en évitant de se mettre les mains dans le cambouis en refusant toute participation au pouvoir ? Peut-elle professer le « y a qu’à » ? Peut-elle, à défaut de gouverner, occuper le ministère de la parole revendicative et des vœux pieux ? Peut-elle encourager le tout ou rien ?

- N’est-il pas suspect que tous les grands médias, alliés du conservatisme international, se réjouissent du score de Besancenot et lui déroulent le tapi rouge ? N’est-il pas naïf de laisser Sarkozy faire croire que l’alternative serait entre lui et Besancenot et qu’entre le PS et le NPA il n’y aurait rien ? N’est-ce pas une erreur grossière que de vouloir bâtir une formation politique qui ambitionne à la radicalité et à la novation sur la seule popularité de son porte-parole ? Hélas, les dirigeants du NPA semblent flattés de cette médiatisation, comme si elle correspondait à une reconnaissance. Certes, il peut être agréable de disposer d’une forte audience médiatique quand on dirige un petit parti. Mais attention à l’auto-intoxication et aux phénomènes d’addiction : les grands médias sont des drogues dures !

Finalement, le refus du NPA de participer au Front de Gauche est une grave faute politique doublée d’un gâchis, un coup bas donné au mouvement social. La perspective politique balbutiante que représente le Front de Gauche devait être encouragée, il fallait donner un message d’espoir à la population.

Un programme de pur verbiage et de rhétorique

Le programme du NPA contient de nombreuses bonnes idées. Mais ce ne sont, précisément, que des idées. Elles ne sont pas accompagnées des moyens et méthodes concrets qui les rendraient crédibles. Quelques exemples :

- Le NPA exige « un CDI pour tous ». L’idée est excellente, mais elle est présentée comme cela, brute de décoffrage. A-t-elle la moindre chance de convaincre quelqu’un ? N’a-t-on pas le droit de savoir comment le NPA compte s’y prendre pour parvenir à cet objectif ? Faut-il le croire les yeux fermés ? Comment inciter aux luttes sur ces bases, si rien n’est expliqué ?

- Même chose pour « le droit au travail pour les handicapés (handicaps acquis ou accidentés du travail), la suppression des ghettos de travailleurs handicapés, l’intégration de tous dans les collectifs ordinaires de travail  ». Comment ça fonctionne ?

- Même chose encore quand on lit ceci : « Nous sommes pour une loi d’interdiction des licenciements, et pour le contrôle des salarié-e-s sur les conditions d’emploi et d’embauche. » S’il-vous-plait, camarades du NPA, dites-nous comment cette proposition pourrait fonctionner ! Par exemple dans une entreprise qui a perdu des clients (peu importe la cause ici), qui a donc perdu du chiffre d’affaires, et qui devrait continuer à payer ses salariés ? Comment seront-ils payés ? Que feront-ils, toute la journée, s’il n’y a plus de commandes ? On veut bien y croire, à l’interdiction des licenciements, mais on voudrait comprendre !

- Le NPA est vraiment naïf, ou fait semblant de l’être ! Comment peut-on affirmer une énormité pareille : « Contre la mise en concurrence des salarié/es, l’Europe que nous voulons rendra obligatoire un salaire minimum dans chaque pays européen. Un salaire minimum qui serait l’équivalent, en termes de pouvoir d’achat, des 1500 euros net que nous revendiquons en France. » Il faudrait quand même rappeler que la politique sociale n’est pas une prérogative de l’Union européenne mais de chaque nation. Heureusement ! Aucune harmonisation sociale n’est possible dans le contexte politique, idéologique et électoral européen actuel. Il n’y aura donc pas de SMIC européen à court ou moyen terme, même si l’idée est sympathique et qu’il faut le revendiquer. Mais attention au risque du bavardage ! Ceci dit, les pays qui voudraient lutter contre la concurrence entre les travailleurs peuvent le faire tout de suite en DÉSOBÉISSANT à l’Union européenne : augmenter les salaires, instaurer un salaire minimum et prendre des mesures protectionnistes dans le cadre universaliste de la Charte de La Havane de 1948.

- « Il faut que les salariés, la population contrôlent les comptes des entreprises et les mouvements de capitaux, imposent la fermeture des paradis fiscaux et la taxation des profits. » D’accord ! Mais comment fait-on ? Quand commence-t-on ?

- « L’urgence économique exige que les populations contrôlent également les banques centrales, en particulier la Banque Centrale Européenne. » Formidable ! Par où s’y prendre ?

Après cette avalanche de vœux pieux, le NPA se prononce pour un extravagant « processus constituant européen » (à combien de pays ?). Il confond par ailleurs systématiquement l’échelon européen et l’échelon national, notamment en matière sociale : c’est pourtant bien à l’échelon national, tout de suite, que peuvent s’appliquer des transformations progressistes. Par ailleurs, le NPA est muet sur des questions essentielles qui ruinent son projet : sur la manière de modifier le rapport des forces au sein de l’Union européenne, sur le libre-échange, sur la désobéissance européenne…

2.- Lutte Ouvrière : la liste qui ne sert à rien

Les grands médias, après nous avoir vendu « Arlette » pendant trente ans, pensent avoir trouvé mieux avec le nouveau concept marketing « Olivier », siphonnant ainsi l’une au profit de l’autre. Il n’en reste pas moins que toutes les voix qui se porteront sur les listes de LO seront des voix perdues. Comme depuis trente ans. On se rappellera au passage que nous devons peut être à Lutte Ouvrière l’échec, d’un cheveu, du référendum sur le traité de Maastricht. Ce dernier a eu lieu le 20 septembre 1992, LO avait appelé à l’abstention. Le « oui » avait obtenu 51,04% (13 165 475 voix) et le « non » 48,96% (12 626 700 voix). Il y avait donc un avantage de 538 775 voix en faveur du « oui ». Or, Arlette Laguiller était candidate aux deux élections présidentielles qui « encadraient » ce référendum : celle de 1988 et celle de 1995. En 1988, Arlette Laguiller obtient 606 775 voix ; et en 1995 elle en obtient 1 661 653. Il est évidemment impossible de réécrire l’histoire et d’affirmer que tous les électeurs de LO auraient votés « non » si LO avait lancé ce mot d’ordre. Néanmoins, le doute subsiste et fait porter sur LO une responsabilité énorme dans la victoire du « oui » au traité de Maastricht qui a ouvert la voie au développement de l’eurolibéralisme.

Sur le fond, les positions de LO sont totalement aberrantes. Quelques exemples tirés d’un texte intitulé « Lutte Ouvrière aux élections européennes » et rédigé par Arlette Laguiller :

- Selon LO : « Quant à l’écrasante majorité des électeurs, ils ont d’autres préoccupations en cette période où les coups pleuvent sur le monde du travail, où les plans de licenciements, voire les fermetures d’usines, se succèdent et où de plus en plus de familles ouvrières ont du mal à boucler les fins de mois avec des salaires amputés par le chômage partiel. » Mais cette situation des travailleurs, qui est parfaitement décrite, n’a-t-elle pas de relation avec les politiques menées par l’Union européenne ? Les fermetures d’usines ne sont-elles pas causées en partie par les délocalisations favorisées par l’élargissement de l’Union européenne à 27 ? Mais de qui se moque-t-on ? LO veut-elle protéger l’Union européenne ?

- LO affirme « quel intérêt ont donc ces élections européennes alors qu’il paraît évident, même pour les plus naïfs, que leur résultat n’aura pas d’influence pour modifier la situation des classes populaires ? » Mais c’est faux ! Un bon résultat des listes favorables au traité de Lisbonne et un mauvais résultat des listes de la gauche de gauche pèsera négativement sur les rapports de forces. C’est évident, pourtant, non ?

- Lutte Ouvrière « se présente néanmoins à ces élections européennes car, si les résultats du scrutin ne peuvent pas modifier la marche réelle des choses, ce vote permet au moins d’exprimer une opinion politique et de pousser un cri. » D’accord ! Voilà pourquoi il faut voter le 7 juin, pas pour les listes LO, mais en faveur de celles du Front de Gauche !

Un autre texte est tout aussi significatif. Il s’agit d’un entretien avec Nathalie Arthaud, nouvelle porte-parole de Lutte Ouvrière, paru dans l’édition de mars 2009 de Lyon Capitale.

Question du journal : « Il y a une reconfiguration à gauche avec la création du Parti de Gauche et du Nouveau Parti Anticapitaliste. Alors que vous êtes d’accord sur l’essentiel, on ne voit toujours pas naître ce grand parti d’extrême gauche ? »

Réponse : « À l’inverse de la majorité des gens, nous ne pensons pas qu’il faille forcément se rassembler. Les capitalistes et la bourgeoisie ont eux aussi une multitude de partis qui sont à leur service et qui ont des visions différentes. Que les travailleurs aient plusieurs partis qui les représentent et qui s’expriment avec des sensibilités différentes n’est pas un problème. Ceux qui disent que c’est un problème sont électoralistes. Ils se disent que les meilleurs scores électoraux sont réalisés par l’unité. Nous voulons combattre l’illusion que l’on peut peser sur la situation par des scores électoraux. […] Il y a la grève générale de 1936 et mai 1968. »

Incroyable ! LO se prononce contre l’unité des forces de gauche et le revendique haut et fort. C’est d’ailleurs ce que fait cette organisation depuis trente ans : diviser. Quant aux considérations sur les élections, on peut simplement rappeler ici que les grèves de 1936 faisaient suite à la victoire électorale du Front populaire ! Et inversement, les grèves de 1968 ont été suivies par des élections législatives désastreuses pour la gauche !

Question du journal : « Allez-vous encore faire campagne sur le rejet de l’Europe ? ».

Réponse : « C’est marrant de présenter les choses comme ça parce qu’à Maastricht nous nous sommes abstenus en raison de l’euro. Dire non à une monnaie commune nous embêtait. Tout ce qui permet de rassembler les peuples, nous y sommes plutôt favorables. Nous étions contre la constitution puisqu’elle consacrait vraiment la domination des pays les plus puissants de l’Europe sur les autres. Il y avait des rapports de domination que l’on voulait dénoncer. Mais sur le fond nous sommes pour une Europe unie des travailleurs, la plus large, élargie même à la Turquie et au Maghreb. »

Ah bon ? L’euro « rassemble les peuples » ? LO est donc favorable à l’Union européenne ! Cette organisation est d’ailleurs muette sur le traité de Lisbonne.

CONCLUSION

Devant cette indigence, et malgré les balbutiements de la démarche du Front de Gauche, c’est ce dernier, aux yeux du M’PEP, qui porte le potentiel le plus évident d’un retournement de la vie politique française et de la transformation de l’Union européenne.


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