Sarkozy président Mai 2007 Mai 2009 : L’homme qui ne donne qu’aux riches

jeudi 7 mai 2009.
 

Anniversaire. Depuis son entrée à l’Élysée, Nicolas Sarkozy n’est pas parvenu à imposer le remodelage en profondeur du modèle français espéré par son camp.

Le bilan présidentiel doit être assumé, revendiqué et valorisé. Les cadres et les élus de l’UMP savent à quoi s’en tenir. Si Nicolas Sarkozy n’entend pas faire l’autopromotion de ses deux années passées à l’Élysée, sa majorité a consigne d’en assumer la charge. En pareille situation, la moindre hésitation apparaîtrait comme un aveu de faiblesse et un recul.

Disciplinés, Xavier Bertrand et Michel Barnier sont donc les premiers montés au front, dès la semaine dernière, pour réhabiliter l’action présidentielle et ses deux années de réformes libérales. Certes, la stratégie ne convaincra pas les Français, mais on lui reconnaît à l’UMP le mérite de garder soudé le noyau dur de l’électorat de droite à la veille des élections européennes. La débâcle des municipales de 2008 a laissé des traces, le président de la République, alors au centre de mille polémiques, ne trouvait guère sur le terrain de candidats UMP prêts à relayer l’action engagée par son gouvernement.

Une action qui, malgré les gesticulations, les outrances et les provocations du chef de l’État pendant ces deux années au pouvoir, n’en demeure pas moins cohérente.

« Raccrocher la France au monde »

Derrière le discours de rupture de Nicolas Sarkozy se profilait l’alignement pur et simple du modèle social français sur le modèle libéral anglo-saxon. Une mise aux normes de la société pour « raccrocher la France au monde ». « Au fond, de quoi s’agit-il ? Jeter les fondements de l’économie française du XXIe siècle. Nous le ferons en délestant l’État des missions et des dépenses du passé pour en faire l’instrument décisif de l’avenir », prédisait le chef de l’État en juin 2007 devant un parterre de députés UMP. Ainsi, malgré la crise, le gouvernement maintient-il la suppression de 30 000 postes dans la fonction publique en 2009. Pour asseoir son dispositif libéral, dès août 2007, le gouvernement avait d’ailleurs mis en place une réforme de la fiscalité, avec un bouclier fiscal rehaussé à 50 %, conduisant l’État à faire des chèques de plusieurs centaines de milliers d’euros aux Français les plus aisés. Les réformes de l’hôpital public, des universités, de la justice, de la fonction publique, des institutions ou du marché du travail ont participé de ce remodelage de la société française et leur simultanéité n’avait d’autres objectifs que de rendre irréversible le processus engagé.

La crise a certes différé les mesures les plus radicales, et la remise en question du modèle libéral tempérait les ardeurs du pouvoir, mais l’interventionnisme de Nicolas Sarkozy, depuis quelques mois, ne vient en rien contredire son projet. Après tout, ceux qui voyaient en creux, dans le discours de Toulon en septembre dernier, une conversion soudaine de Nicolas Sarkozy aux préceptes de la gauche ont oublié que le renflouement des banques et le sauvetage du secteur privé grâce aux deniers publics ne sont que la transposition à plus grande échelle d’un recours éprouvé du système capitaliste.

Imposer l’hégémonie idéologique

Pour autant, la tentative assumée par le leader de la « droite décomplexée » d’imposer au pays l’hégémonie idéologique de son camp a-t-elle réussi ?

Nicolas Sarkozy l’a bien cru lorsqu’il affirmait devant ses supporters, le 5 juillet dernier à Paris, que « la France est en train de changer, elle change beaucoup plus vite et beaucoup plus profondément qu’on ne le croit. Désormais, quand il y a une grève en France, personne ne s’en aperçoit ». Des propos vite démentis, par les immenses cortèges battant le pavé dans tout le pays en janvier et mars derniers, obligeant le chef de l’État à admettre qu’il « regrettait » ses mots.

À l’approche d’un scrutin européen désormais qualifié de « crucial » par l’UMP, la mise en exergue de l’action gouvernementale et la prestation sur la scène internationale, pendant la présidence française de l’Union jusqu’en décembre 2008, restent les fils conducteurs de la campagne à droite. « Quand l’Europe veut, l’Europe peut », mentionne le tract de l’UMP. Allusion au volontarisme politique de Nicolas Sarkozy. L’autoproclamé « président du pouvoir d’achat », le champion du « travailler plus pour gagner plus » avait réussi la rafle des voix du Front national en 2007, avec un discours populiste et sécuritaire, comptabilisait bon nombre de suffrages des classes populaires en déplaçant le clivage des inégalités sociales au sein même des catégories précaires, jouant le érémiste contre le chômeur, le salarié pauvre contre le érémiste. Glorifiait une France qui se « lève tôt » qu’une France paresseuse et assistée privait de son dû… Une rhétorique qui a sans doute perdu de ses effets après deux ans d’une hyperprésidence dont les Français mesurent mieux les intérêts prioritaires qu’elle en charge de servir.

Frédéric Durand dans L’Humanité


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