19 mars : Une mobilisation plus importante que le 29 janvier (articles Le Monde, L’Humanité et Libération)

samedi 21 mars 2009.
 

1) Une mobilisation plus importante que le 29 janvier Article du Monde

Pour les syndicats, la manifestation du jeudi 19 mars est une mobilisation "réussie", plus importante en tout cas que celle du 29 janvier. Destinée à arracher de nouvelles mesures au gouvernement en faveur des salariés, elle a fait descendre dans la rue entre 1,2 million de manifestants (selon la police) et 3 millions de personnes (selon les organisateurs) contre 1 à 2 millions en janvier. Face à cette ampleur, les syndicats ont demandé au gouvernement "des réponses".

Mais le premier ministre François Fillon a réaffirmé, lors d’une intervention jeudi au journal de 20 heures de TF1, que son gouvernement n’envisageait "aucun nouveau plan de relance". Selon M. Fillon, il faut "attendre" que le premier plan de relance annoncé en décembre, d’un montant de 26 milliards d’euros, "produise ses effets". L’augmentation du smic, par exemple, n’est "pas la priorité dans une crise aussi grave", a-t-il jugé. "La priorité c’est la mobilisation pour l’emploi, c’est de sauver les emplois", a maintenu le premier ministre, estimant que "la mobilisation ne résoudra pas les problèmes de la crise mondiale".

Seule véritable annonce faite par François Fillon : la mise en place d’un comité de suivi qui se réunira chaque mois "pour vérifier que les mesures prises sont appliquées" et "efficaces". "Le cas échéant, s’il faut adapter ces mesures, on les adaptera", a-t-il fait valoir.

"SI ÇA CONTINUE COMME ÇA, LES CORTÈGES S’ALLONGERONT"

L’affluence a été très forte quasiment partout en France, dans les grandes villes comme Paris, Marseille ou Bordeaux mais aussi dans des villes moyennes comme Rennes ou Le Havre (voir la carte des manifestations ville par ville). Le cortège parisien a rassemblé entre 85 000 personnes selon la police, et 350 000 personnes selon la CGT. Agents hospitaliers, cheminots, salariés du privés, retraités, chômeurs : les cortèges étaient composés, comme le 29 janvier, d’un large éventail de catégories sociales. Les manifestants étaient plus nombreux à battre le pavé malgré un taux de grévistes moins important qu’en janvier. Selon le ministère de la fonction publique, 21,1 % des fonctionnaires ont fait grève jeudi contre environ 25 % le 29 janvier. Symbole de la colère, un millier d’employés de l’usine de pneus Continental de Clairoix (Oise), dont la fermeture est annoncée, sont allés gonfler les rangs des manifestants à Compiègne.

Les dirigeants syndicaux ont jugé, à l’instar de François Chérèque (CFDT), que le "silence complet" du gouvernement et du patronat ne devait pas être la réponse, au risque d’aggraver la crise sociale. "Qu’est-ce qui fait qu’en période de crise (...) les salariés descendent dans la rue, relèvent la tête ? C’est qu’ils ont un profond sentiment d’injustice sociale", a estimé de son côté Jean-Claude Mailly de FO. "Si ça continue comme ça, les cortèges s’allongeront", a ajouté le patron de la CFE-CGC, Bernard van Craeynest. Les huit centrales syndicales qui avaient à appeler à la mobilisation doivent se retrouver, vendredi, pour décider de la suite du mouvement. Aucun n’exclut la poursuite du mouvement.

L’opposition, quant à elle, était également dans la rue (Voir le portfolio L’opposition mobilisée mais éparpillée). "Il est important que le gouvernement change sa politique économique, sociale et fiscale", a ainsi affirmé le maire de Paris, Bertrand Delanoë. Pour Daniel Cohn-Bendit (Europe-Ecologie), Nicolas Sarkozy doit "symboliquement retirer le bouclier fiscal, la législation sur les heures supplémentaires". Refus du côté de Matignon : sur TF1, le premier ministre a de nouveau une fin de non-recevoir à cette demande. Les députés PS ont fait savoir qu’ils défendraient, fin avril, une proposition de loi visant à supprimer le bouclier fiscal et à mettre fin au système des bonus et des parachutes dorés pour les dirigeants de banques.

2) Journée du 19 mars 2009 : La preuve par trois millions Article de L’Humanité

L’intransigeance du gouvernement n’a pas découragé le mouvement social. Bien au contraire ! Celui de Nicolas Sarkozy devra revoir son attitude, à l’issue d’une journée de mobilisation sans précédent depuis l’élection du chef de l’Etat.

La marée monte, la colère gronde. Toute la journée, mails et coups de téléphone ont afflué à la rédaction de l’Humanité. « Bien mieux, plus nombreux que le 29 janvier » de Bretagne ou d’Auvergne, du Nord à Saint-Denis de la Réunion, le même constat, la même mesure. La mobilisation populaire, loin de s’épuiser face un président et un gouvernement lui opposant morgue et mépris affiché, s’est renforcée, s’est élargie à de nouveaux secteurs sociaux professionnels.

Les chiffres s’égrènent. Tous confirment la même tendance. Dans la matinée, la manifestation marseillaise établit un record : la barre des trois cent mille manifestants est franchie. Plus au nord, Grenoble affiche 60 000 manifestants, dans l’après-midi d’autres chiffres record s’alignent 75 000 à Nantes, 50 000 au Mans….. Dans la capitale, 350.000 Franciliens envahissent l’espace entre la République et la Nation. Dans les états-majors syndicaux, les calculettes s’affolent, le cap des trois millions de manifestants est en vue… Il sera atteint.

Les travailleurs du privé ont bravé en plus grand nombre la pression patronale, donnant aux immenses cortèges des manifestations une tonalité nouvelle. Lors des grandes grèves de 1995, les cheminots étaient soutenus par tout le monde du travail, qui « faisait grève par procuration ». Ce phénomène s’est répété depuis à plusieurs reprises. Jeudi, au contraire, tout se passait comme si chacun tenait à prendre sa place dans le mouvement. C’est seulement à ce prix que les salariés pourront établir un rapport de force qui fasse reculer l’intransigeance du couple Sarkozy-Parisot. Il faut dire que les travailleurs du secteur privé sont durement frappés pour permettre de maintenir à flot, par temps de crise, la grosse part du gâteau aux actionnaires, de garantir le pactole de stock options des hauts dirigeants et les parachutes en or des patrons déchus.

Dans les rues de Compiègne, qui a connu sa plus puissante manifestation de mémoire de syndicaliste, les ouvriers de Continental ont été accueillis par une haie d’honneur. Victimes d’un chantage à l’emploi, qui les a conduits à subir une augmentation gratuite du temps de travail pendant deux ans, ils ont appris que leur patron, le groupe allemand Schaeffler va fermer l’usine pourtant bénéficiaire. Des millions de salariés se reconnaissent dans le combat des « Continental » dans la colère contre le scandale des licenciements « boursiers »

Ils sont descendus dans la rue, les ouvriers de Caterpillar, de la région grenobloise, que cette société multinationale (production d’engins de chantier) veut liquider. Ceux de Rhodia, de Sanofi, les travailleurs de l’automobile, mais dans chaque rassemblement, dans les villes les plus modestes, où l’on a manifesté aussi en plus grand nombre, les banderoles des syndicats des entreprises locales côtoient celles des enseignants, des travailleurs de la santé. Et dans les rangs des manifestants, des hommes et des femmes participent à leur première manif, n’imaginaient même pas devoir un jour battre le pavé contre l’injustice sociale. Combien sont-ils ces primo-manifestants, clercs de notaires, secrétaires dans des PME qui, faute de disposer d’une force syndicale, ont posé des RTT pour aller manifester ? Les sondages indiquent, les uns après les autres, que la majorité des Français soutiennent les manifestations contre la politique du gouvernement et, pour beaucoup, sont prêts à y participer. Une tendance qui va crescendo, le dernier en date, de l’IFOP, estimait à la veille du 19 mars que la journée de mobilisation était soutenue par 78 % des Français. La journée de jeudi a confirmé cette évaluation.

L’unité syndicale, réaffirmée, a puissamment contribué à la dynamique. Ils se rencontrent dès vendredi à onze heures pour déterminer la suite du mouvement. Les responsables des confédérations auront analysé les réactions du gouvernement, dont l’intransigeance face aux revendications salariales n’a guère découragé le mouvement social, bien au contraire. Le soutien affirmé de la gauche affirmée dans un texte commun a aussi contribué à cette dynamique. Fait nouveau, ces manifestations ont été l’occasion d’une présence remarquée du Front de gauche crée à l’initiative du PCF et du Parti de Gauche.

Jean-Paul Piérot

3) Le succès des manifestations met la pression sur le pouvoir Article de Libération

Un nombre record de manifestants depuis l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Elysée est descendu jeudi dans la rue, ce qui a encouragé les syndicats à exiger « des réponses » à la hauteur de cette mobilisation.

Sous un soleil printanier avant l’heure, entre 1,2 million (police) et 3 millions (CGT) de personnes ont défilé dans 229 manifestations à l’appel des huit syndicats (CGT, CFDT, FO, CFE-CGC, CFTC, Solidaires, FSU, Unsa). Le 29 janvier, de 1,08 million (police) à 2,5 millions de personnes (syndicats) avaient battu le pavé.

Ces manifestations, qualifiées de « réussite » par les syndicats, et soutenues par la gauche, égalent les pics de mobilisation de 2006 contre le Contrat première embauche (CPE), et montrent l’ampleur de l’inquiétude et du mécontentement suscitées par la crise et la saignée de l’emploi qui l’accompagne.

Raymond Soubie, conseiller social de Nicolas Sarkozy, a toutefois estimé que « l’on n’avait pas franchi d’étape dans la protestation par rapport au 29 janvier » et exclu des mesures nouvelles, au-delà de celles annoncées lors du sommet social du 18 février.

Le Premier ministre François Fillon devait s’exprimer dans la soirée. « Un événement politique »

En début de semaine Bernard Thibault (CGT) avait prévenu que « si la mobilisation est plus importante que le 29 janvier, ce sera un événement politique ».

Le cortège parisien a rassemblé entre 85.000 personnes selon la police (65.000 le 29 janvier), et 350.000 personnes (300.000) selon la CGT.

Outre les grandes villes, de Rennes (14.000 à 40.000) à Marseille (30.000 à 320.000) en passant par Bordeaux (36.000 à 100.000), l’affluence a été très forte quasiment partout, y compris dans des villes moyennes (Le Havre, Tarbes…).

« C’est la mobilisation de M. et Mme Toutlemonde, qui expriment leur ras-le-bol », s’est exclamé Gilbert Debard (Unsa), parmi les manifestants lyonnais (de 24.000 à 45.000).

A Clairoix (Oise), symbole de la colère des salariés, un millier d’employés de l’usine de pneumatiques Continental, dont la fermeture est annoncée, sont allés gonfler les rangs des manifestants à Compiègne.

A Paris, les dirigeants syndicaux ont jugé, comme François Chérèque (CFDT), que le « silence complet » du gouvernement et du patronat ne devait pas être la réponse, au risque d’aggraver encore la crise sociale.

« C’est maintenant qu’il faut soutenir la consommation et prendre des décisions », a déclaré Jean-Claude Mailly (FO).

François Fillon a déjà prévenu qu’il n’y aurait aucune « enveloppe supplémentaire » après les mesures adoptées lors du sommet social du 18 février.

« Changer de cap »

« Il faut changer de cap », « Bouclier social » : pancartes ou slogans invitaient jeudi le gouvernement à modifier en profondeur sa politique en faveur de l’emploi et du pouvoir d’achat.

Les perturbations jeudi dans les transports ont été globalement limitées, en partie grâce au service minimum. En région parisienne, les transports en commun ont circulé légèrement mieux que le 29 janvier, mais ont été très affectés à Bordeaux, Reims, Strasbourg et Nice.

La plupart des grandes villes avaient décidé de mettre en oeuvre, au moins en partie, le service minimum d’accueil, mais à Paris seuls 2.400 écoliers sur 136.000 en ont profité, selon la mairie.

Dans la Fonction publique, la grève a été moins importante que le 29 janvier, notamment dans l’éducation. Nombre de fonctionnaires ont défilé, comme les enseignants-chercheurs, au nombre de 50.000 à Paris (selon Unef et FSU), la plus grosse mobilisation depuis le début du mouvement.

Les dirigeants syndicaux se retrouvent vendredi. Tous ont d’ores et déjà souligné la nécessité de « durer » et de rester unis.

(Source AFP)

4) 19 mars en Haute Loire : 200 euros pour les salaires et les retraites (CGT, CFDT, CFTC, CGC, FO, FSU, Solidaires, UNSA)

PDF - 158.4 ko

Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message