La révolution oui, mais par les urnes (Tribune parue dans Le Monde du 7 février 2009)

vendredi 13 février 2009.
 

Il faut souhaiter bon succès au Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). C’est l’intérêt de la gauche. Celle-ci n’est pas menacée par le trop-plein de ses partis. Elle l’est par leur incapacité collective à entraîner la société à l’heure où le capitalisme connaît l’une des crises les plus graves de son histoire. Le communisme d’Etat a échoué. La social-démocratie s’enfonce sous nos yeux dans l’impuissance et le reniement. Dans ce vide, le pire peut s’engouffrer. Nous ne sommes pas trop nombreux à tenter de le combler !

Si elle contribue à entraîner dans l’action, impliquer dans le débat public, faire aller aux urnes, alors la création du NPA est une bonne nouvelle. Qui mieux que les trotskistes peuvent motiver ceux qui se reconnaissent dans la sensibilité communiste révolutionnaire présente de longue date dans notre pays ? A gauche, il y a plus de candidats pour être ministres d’ouverture que porte-parole anticapitalistes. Le degré d’exigence n’est pas le même ! Olivier Besancenot n’a pas volé ses voix. S’il a élargi l’audience de la LCR, il le doit d’abord aux combats qu’il a menés. Il est de bon ton de railler la médiatisation et la personnalisation de son mouvement. Rappelons qu’il en connaît le prix. Postier le jour, dirigeant politique le soir, espionné la nuit : on connaît des existences plus faciles. Les jaloux devraient y réfléchir.

Le NPA tente de prolonger les voix qui se sont portées sur Olivier Besancenot lors de l’élection présidentielle. Cette ambition crée aux dirigeants trotskistes une responsabilité nouvelle. Ils doivent des comptes à 1,5 million d’électeurs. Ceux-ci subissent la crise. Ils sont sans doute nombreux à avoir fait grève et à avoir manifesté le 29 janvier. L’issue politique que leur propose le NPA, c’est la révolution. Il faut leur dire alors en quoi celle-ci consiste et par quelle voie le NPA propose d’y arriver. Le congrès fondateur de ce parti devra permettre de le clarifier.

Pour notre part, Parti de Gauche, nous rejetons tout autre moyen que celui de la démocratie. S’il faut une révolution, cela doit être une révolution par les urnes. C’est une leçon du siècle passé. Et même du siècle qui commence, comme le montre la révolution démocratique qui traverse l’Amérique latine. Alors inspirons-nous de la stratégie d’Evo Morales, qui demande à son peuple de voter, voter et voter encore, pas des foyers de guérilla de Che Guevara.

C’est parce que nous ne connaissons aucune autre méthode pour trancher les divergences politiques que le suffrage universel que nous avons proposé à tous les partis de l’autre gauche la constitution d’un front de gauche pour les élections européennes. Le NPA nous pose une condition "d’indépendance absolue vis-à-vis du PS". Il estime que l’orientation actuelle du PS condamne la gauche à l’impuissance. Il a raison. Les deux dernières élections présidentielles l’ont hélas démontré. Pour autant, l’autre gauche a aussi la responsabilité de faire battre la droite. Car quels que soient les désaccords à gauche, la droite est notre adversaire. Existe-t-il un autre moyen de surmonter cette impasse que de faire trancher notre controverse par les électeurs ? En participant au front de gauche pour les élections européennes, le NPA contribuerait à battre pacifiquement dans les urnes les listes socialistes qui veulent nous imposer le carcan libéral et antidémocratique du traité de Lisbonne. En faisant ce choix de démocratie et d’efficacité, le NPA répondrait à la fois à ceux qui s’interrogent sur son identité et à ceux qui contestent son utilité.

2) Message sur Bellaciao suite à ce texte

La Révolution par les urnes, pourquoi pas ?

j’ai écouté le discours d’A. Krivine lors de l’ouverture du Congrès de la LCR. Dans ce discours, il affirme qu’on a jamais vu la Révolution l’emporter par les urnes dans aucun pays, parce que ce sont les bourgeois qui organisent les élections et qu’ils font tout pour gagner et faire perdre les révolutionnaires (sic). On en attendait pas moins d’eux !

Qu’en est-il alors des cas de la Bolivie et du Venezuela qui ont vu la gauche populaire l’emporter plusieurs fois lors des élections de ces dernières années et qui ont engagé des politiques visant à satisfaire les besoins de leur population (et non une poignée de nantis) en nationalisant notamment des secteurs importants de leur économie.

Et la LCR - section belge en tout cas - ne soutient-elle pas ces gouvernements ? Voir ici :

http://www.lcr-lagauche.be/cm/index...

Alors pourquoi, cela serait-il possible en Amérique Latine et pas en France ? Si la gauche de la gauche française était capable de s’unir lors d’élections (comme les prochaines européennes par exemple), ne pourrait-elle pas passer devant le PS et changer la donne à gauche ?

Le NPA nous dit que non, qu’il faut s’unir sur le long terme et non pour une élection seulement, qu’il faut être d’accord sur tout... Dans ces conditions, mon avis est qu’on risque d’attendre longtemps que le paysage politique français change à gauche.

De : L’abeille


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