Parfois l’éternité tombe
plus tôt
sur le monde et se fait un foulard
avec les rideaux des fenêtres
On allume alors les ampoules
en plein midi
On lâche les chiens sur les mauvais morts
La lumière
donne
des lèvres
à l’ombre sur les bouteilles
comme si tout avait besoin d’une bouche
pour parler
Nous nous embrassons
sans nous voir
Nous coupons le couteau avec le pain
Nous remplissons à raz bord
la soupe avec des assiettes
Les mouches font et défont
la nuit d’un seul coup
et avertissent chaque chose
les unes après les autres
Sur la table
l’oiseau suggéré de la rose
regarde ceux
qui sont restés assis
et sont devenus des fleurs
On nous a appris l’hospitalité
Nous invitons aussi les chaises
à manger
Le dehors a toujours un dehors plus loin que lui
c’est pour cela qu’on marche sans arrêt
pour trouver un autre dehors
derrière son vêtement de transparence
et de vitres brisées
Les choses sont parfois
comme des oignons
Elles font des couches de peau
à l’infini qui font pleurer
les yeux et le monde
Nous déshabillons le dehors
jusqu’à nous comme dans l’amour
Dehors la lune ne laboure plus la nuit
Une voix dédouble une lèvre
dans une autre voix
Les muscles de l’air saisissent des cailloux
et bâtissent des barricades d’enfants chauves
On tue le soleil à petits coups
de vautours
sur les poubelles
Le dos au noir
on fusille un ange dans chaque mort
Pour saisir le dehors
il nous faut nous-mêmes devenir le dehors
Le poème n’est qu’une méthode pour s’enlever
la peau et trouver le dedans au plus loin de nous
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