9 Décembre 2008 : RENOVATION ET RESTAURATION au Parti Socialiste

mardi 9 décembre 2008.
 

La nouvelle direction du PS s’est mise en place. Ce que j’en ai lu m’a parfois bien amusé, en connaisseur que je suis de la maison et de ses techniques d’enfumages des médias.

Ainsi donc il s’agirait d’une « direction resserrée ». C’est pourquoi sans doute il y a trois membres de plus au Bureau national que n’en prévoient les statuts. Et l’addition des membres du bureau au titre des motions, plus des secrétaires non membres du bureau plus les dix huit premiers fédéraux membres du BN donnent cent membres de la direction nationale. Encore ne connaît-on pas la liste des « responsables » et « délégués nationaux ». Ca promet un « resserrement » encore plus grand comme on dit dans la novlangue du « parler contraire ». De toute façon le problème de la place autour de la table se règlera tout seul puisqu’il n’y aura plus de Bureau national qu’une semaine sur deux… Et encore celui-ci aura-t-il lieu après le secrétariat national, à l’inverse de toute logique. Je n’évoque ces ridicules d’organisation, qui prolongent à l’identique la période parait-il honnie par tous du règne de François Hollande, et la caricature même, dans le seul but de souligner une fois de plus combien il faut se méfier des récits préfabriqués à propos des changements dans ce malheureux Parti.

Naturellement ces bobards là ne font que prolonger ceux sur la ligne politique. Car tout ce bruit n’aura servi qu’à une chose : reconduire une synthèse, matérialisée par un texte, de « tous » sauf Ségolène Royal. Le système de la carpe et du lapin s’est étendu à toute la direction. Il est devenu une ligne politique. La ligne des carpes et des lapins. Delanoë, Hamon, Cambadélis et Bartolone signent le même texte, ils se déclarent sur la même ligne. Est-crédible ? Qui mentait avant et qui ment depuis ? Le dispositif mis en place répond peut-être à la question. Cambadélis est le responsable national chargé des questions européennes. Tout permet de penser qu’il va dorénavant dire le contraire de ce qu’il disait dans le passé sur le traité de Lisbonne. Non ? Hamon est le porte parole du parti. Donc si jamais Cambadélis ne dit pas ce qu’il faut, le porte parole du parti exprimera son point de vue personnel.

Ce scénario est-il crédible ? Non bien sûr. Le plus frappant dans ce dispositif c’est de trouver Benoit Hamon dans ce rôle. Certes, l’idée de devenir le porte parole du parti correspond à une stratégie de présence médiatique que l’on comprend. Cependant il est frappant de constater que ce soit au prix du fond. Sauf si, en réalité, tout le monde est bien d’accord sur le fond. Reste que la conséquence de ce choix est évidente. La parole de la gauche du parti est subordonnée à sa fonction et à la synthèse grâce à laquelle elle se l’est acquise. C’est exactement le processus d’auto étranglement que j’ai pointé du doigt dans mon livre « En quête de gauche » comme étant à l’origine de la mort subite de la gauche du parti allemand et italien. Si bien que pour moi, cette micro péripétie interne est une confirmation de plus du processus de mise aux normes de la social démocratie européenne du parti français avec tout ce que cela implique dans le moment présent.

Pour l’immédiat on bat des records de double langage. Le Conseil national des socialistes qui adopte un texte affirmant qu’il n’y aura pas d’alliance avec le Modem est présidé par Destot, le maire de Grenoble qui a réalisé cette alliance dès le premier tour et refusé l’alliance avec l’autre Gauche au deuxième tour. Bien sûr il vote le texte. De tels défenseurs de « l’ancrage à gauche du parti » peuvent bien voter ça aussi. Qu’est-ce qui a du sens réellement dans cette pétaudière idéologique ?

DISPOSITIFS ET DISPOSITIONS

N’y a-t-on pas voté une nouvelle lettre au père Noël à propos de l’Europe de demain ? Touchant. Car à Madrid les mêmes ont adopté un « Manifesto » qui propose, comme cadre de ce changement sans doute, d’achever la ratification du traité de Lisbonne. Et pour mieux faire comprendre la terrible révolution que cela implique, les leaders socialistes espagnol et portugais ont demandé la reconduction de l’ultra libéral José Manuel Baroso à la tête de la commission européenne après avoir déclaré qu’ils étaient totalement satisfaits de son travail.

Cela n’empêche pas le texte de synthèse de la nouvelle direction autour de Martine Aubry de déclarer : « Jamais sans doute nous n’avons autant partagé entre socialistes européens la philosophie de la construction européenne… ». On a pu se rendre compte de l’absurdité du propos en découvrant la photo souriante de Martine Aubry posant aux côtés de Frantz Muteffering président du SPD qui gouverne avec la droite. La droite européenne dont le Manifesto dit pourtant « les droites européennes proposent de s’adapter au marché, nous proposons de façonner notre avenir »

Reste que ce Manifesto est tellement aligné sur le modèle libéral compassionnel de la social démocratie européenne qu’il oblige le parti français a une gesticulation supplémentaire. Après avoir déclaré son adhésion au « Manifesto », le PS se sent obligé d’annoncer qu’il va continuer à se battre pour faire avancer d’autres « priorités ». Tel quel. Il s’agit bien de se battre pour faire avancer un texte que l’on juge déjà insuffisant au moment même où on vient de le signer. Et de se battre contre qui ? Les autres membres du PSE, évidemment. Tels sont le PSE, son programme et son parti français.

La liste des idées à faire avancer permet de mesure ce dont la majorité du PSE ne veut pas. Ainsi au lieu d’être un réconfort sur l’imagination et l’audace du PS français cette liste devient celle des divergences avec la majorité du PSE. Lire cette liste c’est donc prendre la mesure de ce dont le PSE est incapable et qu’il ne faut pas lui demander aux prochaines élections européennes. Il s’agit d’audaces folles comme : « Lancer des avants gardes dans les domaines clefs de préparation de l’avenir », « lancer de grands programmes d’investissements », « avancer vers un gouvernement de la zone euro », « refonder la politique agricole commune » et ainsi de suite. A cette lecture on est partagé entre la stupeur devant le degré de généralité de ce genre de propositions et la stupeur que le PSE n’en veuille pas. On réglera tout ça dans les urnes aux élections européennes.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message