Le nouvel âge du capitalisme aggrave les conditions de vie des milieux ouvriers et populaires ( Manifeste PRS 3)

lundi 21 août 2006.
 

Chaque jour le travail humain donne naissance à une quantité gigantesque de biens et de services. Depuis 1950, la production mondiale a été multipliée par 7. En moins de 2 siècles, le niveau de vie a été multiplié par 15, le volume des échanges internationaux par 100, la production mondiale de biens industriels par 200. Jamais au cours de son histoire l’humanité n’aura produit autant de richesses. Jamais elle n’aura connu un tel développement des sciences et des techniques.

Des servitudes d’un autre âge

Mais, loin d’annoncer une ère nouvelle d’épanouissement, cette période voit le retour en force d’un appauvrissement et d’un enfermement idéologique généralisé des populations.

L’emprise du nouvel âge du capitalisme s’impose partout, sans limites ni frontières, sur les populations humaines comme sur leur environnement, soumettant tout et chacun à la logique de la marchandisation et du profit maximal. Elle réduit partout le travail à une marchandise et pousse des millions d’êtres humains aux limites de la survie.

La paupérisation des populations et le saccage de la planète qui en résultent dégradent les conditions de vie de milliards d’hommes et de femmes, la majorité des populations du Sud sousdéveloppé, comme un nombre considérable et croissant d’habitants du Nord développé.

L’enfermement des consciences par l’idéologie dominante et les obscurantismes soumettent de plus en plus profondément les populations aux normes morales qui servent le système. C’est sans doute la servitude la plus solide car c’est la moins visible. Or il n’est pas d’esclave mieux enchaîné que celui qui se croit libre.

L’emprise du nouvel âge du capitalisme

Le capitalisme de notre époque exerce une domination sans précédent sur l’ensemble des activités humaines. Ralentie durant les Trente Glorieuses et la guerre froide, la puissance destructrice du capitalisme s’est décuplée avec la financiarisation de l’économie dans les années 1980. Puis, en 1989, quand la chute du mur de Berlin a exprimé une irrésistible aspiration à la liberté individuelle, le nouvel âge du capitalisme y a entendu un appel à la concurrence libre et non faussée de chacun contre tous.

Depuis, nous affrontons un processus de marchandisation généralisée du monde. La privatisation et la libéralisation massive des services publics en sont les indicateurs les plus significatifs. Elles en montrent aussi les conséquences. Les services publics étaient les moyens de mettre des secteurs vitaux au service de l’intérêt général. Ils étaient les droits de l’humanité en actes, le droit de se soigner, d’aller à l’école, de se déplacer, de communiquer... Aujourd’hui, ils ont été largement démantelés pour offrir un nouveau terrain de conquête et d’accumulation aux intérêts des actionnaires. Du coup, les droits humains fondamentaux sont remis en cause.

Libéré des règles qui lui étaient jusqu’alors imposées au nom de l’intérêt général, le capitalisme de notre époque a arraché une dégradation considérable de la condition salariale. Pour y parvenir, il n’a pas hésité à se servir du chômage de masse comme d’une stratégie, particulièrement efficace dans une société hautement urbanisée où le salariat est la seule condition sociale possible pour la quasi-totalité de la population. Soumis à une pression croissante, les salariés ont vu le rapport de forces social se dégrader et leurs protections reculer une à une. Le droit du travail et la protection sociale ont été méthodiquement rognés ou détricotés. La majorité travailleuse de l’humanité se trouve alors plus que jamais livrés aux exigences aveugles de la finance et aux variations du carnet de commande.

Dans notre pays, la modification spectaculaire du partage de la richesse produite (plus de dix points de valeur ajoutée sont passés en 25 ans des salaires vers les profits) témoigne du basculement des rapports de force entre capital et travail qui caractérisent le nouvel âge du capitalisme. Il y a dans cette inversion un parfum de retour au 19e siècle, avant les vagues émancipatrices victorieuses qui ont jalonnés le 20e. Le rétablissement du contrat journalier et du droit de licencier sans motif avec le Contrat Première Embauche montre l’ampleur du retour en arrière visé. Le sens du progrès se trouve dès lors inversé. C’est d’autant plus absurde que le progrès technique et technologique est mis au service d’un mode de développement qui gaspille les ressources rares et menace les équilibres écologiques de la planète.

Lorsque les intérêts du capital s’imposent au détriment de l’intérêt général, le peuple des citoyens disparaît au profit d’un marché éclaté de clients renvoyés à l’irréductible différence des pouvoirs d’achat et des préférences de consommation individuelle. La mondialisation néo-libérale prétend rapprocher les hommes. En réalité, elle les divise et les oppose, donnant naissance à un monde morcelé et fracturé où la solidarité et l’unité humaines n’ont pas leur place. Un monde où l’Empire états-unien impose sa domination violente.

La paupérisation des populations : un apartheid social planétaire

Le monde ressemble de plus en plus à un océan de pauvreté où se barricadent quelques îlots de richesse.

Sur les 6,6 milliards d’être humains, près de la moitié, 2,8 milliards, vivent avec moins de 2 dollars par jour. 20% de la population mondiale n’a pas d’eau potable, 40% n’a pas d’installations sanitaires, 40% n’a pas l’électricité. 842 millions de personnes sont sous-alimentées dans le monde (1 habitant sur 8). Si l’on ne fait rien, il y en aura 100 millions de plus d’ici 2015. En face, 1% des personnes les plus riches du monde ont désormais un revenu égal aux 57% les plus pauvres. Les trois personnes les plus riches possèdent une fortune supérieure au PIB des 58 pays les plus pauvres, soient 600 millions de personnes.

La pauvreté n’est pas un à-côté provisoire du système mais son principal résultat en même temps que son moteur. C’est l’appauvrissement des uns qui rend possible l’accumulation toujours plus grande dans les mains des autres.

Au Royaume-Uni, on est passé de 7 millions de pauvres au début de l’ère Thatcher à plus de 12 aujourd’hui. Aux Etats-Unis, de 35 millions à la fin des années 1990 à plus de 40 aujourd’hui, sans parler des 50 millions de travailleurs qui n’ont aucune couverture sociale. En France aussi, la pauvreté se développe à grande vitesse. On y compte désormais 7 millions de pauvres dont 2 millions d’enfants. Cette explosion de la pauvreté est alimentée par la croissance rapide du nombre de travailleurs dont les revenus sont dorénavant insuffisants pour leur permettre de vivre dignement de leur travail. Ce sont les « travailleurs pauvres » naguère réservés aux Etats-Unis.

La pauvreté n’est pas une persistance du passé, un phénomène marginal ou le résultat de comportements individuels. Elle découle du chômage de masse et de la précarisation du travail qui constituent le cœur des politiques libérales. Elle est le résultat direct d’un partage des richesses spoliateur. La pauvreté est le fruit logique d’une oppression accrue du travail par le capital.

La loi scélérate dite « égalité des chances » veut approfondir la précarisation généralisée de la population en vue de son exploitation accrue. Avec le CPE pour les jeunes, le retour de l’apprentissage à 14 ans, le travail de nuit et le week-end des jeunes de 15 ans, la suppression des allocations familiales en cas d’absence à l’école, le gouvernement Villepin a voulu casser la jeunesse populaire et l’enfermer dans une spirale de précarité. Que l’on ne s’y trompe pas. Avec la jeunesse populaire, c’est l’ensemble de la population qui a été visée. L’objectif dorénavant avoué est bien de soumettre tous ceux qui travaillent à la peur du lendemain, en s’attaquant d’abord à ceux que le chômage de masse exclut du marché du travail et pousse à accepter n’importe quel emploi : travailleurs âgés, immigrés, femmes qui représentent la grande majorité des personnes au chômage. Le projet de loi dit CESEDA (code de l’entrée et du séjour des étrangers et demandeurs d’asile) veut instaurer une politique d’immigration choisie en sélectionnant les étrangers en fonction des besoins en qualification, sans se préoccuper du pillage des cerveaux des pays pauvres que cela induit, ni des conditions de vie de ces immigrés, en particulier sur le plan familial. C’est une spirale sans fin.


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