Eau, gaz, agriculture : La Bolivie avance, la France recule !

samedi 5 août 2006.
 

Pour la Bolivie, la question du gaz est aussi fondamentale que la question de l’eau et de la réforme agraire. Ce peuple a mené la « guerre de l’eau » (entre autres contre les multinationales françaises qui pillaient son eau, sans entretenir sa distribution et en la faisant payer au prix fort, honteusement). Il a mené la “guerre du gaz” (dés que d’énormes gisements de gaz ont été découverts, les deuxième en importance en Amérique latine) pour empêcher que ces richesses ne lui soient volées par la privatisation aux « majors » des Usa... Il a enfin combattu pour une réforme agraire, qui vise à redistribuer les terres inexploitées des grands propriétaires, et à permettre aux cocaleros de vivre décemment.

Il a fallu des années de lutte pour y arriver : l’establishement bolivien (des partis dits de gauche liés à des partis bandits de droite) n’avait pas hésité à tirer à la mitrailleuse lourde contre des manifestations populaires descendues des hauts plateaux sur La Paz. Mais les élections, en dépit de tous les blocages, ont finalement été gagnées, et les indiens aymara et quechua sont enfin arrivés au pouvoir dans leur propre pays. Et leur élu, Evo Morales a pris le chemin de tenir ses promesses : il annonce la nationalisation des hydrocarbures et précise que les compagnies étrangères (dont le Français Total, l’Espagnol Repsol ou le Britannique BG) ne recevront pas d’indemnités si elles ont réalisé des bénéfices à hauteur de leurs investissements. "Nos ressources naturelles sont pillées et nos matières premières exportées depuis plus de 500 ans. Il est temps que cela cesse", a déclaré le nouveau président bolivien, lors de sa première visite en Europe en tant que chef d’Etat début mai 2006.

"Il n’y aucune raison de songer à leur verser des indemnités", a-t-il affirmé. "Si nous avions exproprié des capitaux ou des technologies, nous aurions offert des dédommagements, mais il ne s’agit pas ici d’expropriation." Evo Morales a également affirmé qu’il ne s’était senti aucune obligation de se concerter avec les investisseurs et les gouvernements concernés avant de passer le décret de nationalisation du 1er mai 2006.

"Rien ne m’obligeait à demander la permission et à prendre en considération les orientations politiques d’autres pays", a-t-il précisé.

Il a enfin accusé les plus gros investisseurs étrangers en Bolivie, d’agir "dans l’illégalité et contre la constitution".

Les responsables brésiliens du secteur de l’énergie ont déclaré qu’ils acceptaient de renégocier leurs contrats avec les autorités boliviennes. La compagnie pétrolière bolivienne YPFB, avait d’ailleurs affirmé que la Bolivie verserait des dédommagements à la compagnie brésilienne Petrobras pour l’expropriation partielle de deux raffineries dans le cadre de la nationalisation.

Le décret de nationalisation du 1er mai accorde 180 jours aux compagnies étrangères pour renégocier leurs contrats. Passé ce délai, elles sont invitées à quitter le pays, qui possède désormais les réserves de gaz les plus importantes d’Amérique latine après le Venezuela. Un autre type d’Union économique peut en découler en Amérique latine, défaisant les traités libéraux imposés jusque là par les Usa...

Nous avons eu le plaisir de rencontrer le président Evo Morales à Paris, à la mi-mai, d’abord à la Mairie du 12° arrondissement, ensuite au Sénat, dans un repas amical à l’invitation de Mme Danielle Mitterrand. (Dommage que le Ps lui-même n’ait pas organisé son accueil). Ce fut l’occasion d’entendre le leader paysan, syndicaliste devenu « président » en bras de chemise, sans protocole, expliquer sa mission : répondre aux aspirations de son peuple, permettre qu’enfin la Bolivie, profitant de la manne de ses ressources naturelles nouvelles, échappant au pillage du capital financier, sorte de la misère. « Je suis devenu le chef de l’armée, je suis allé les visiter et j’étais surpris, ils me traitaient vraiment comme le chef ». « On a voulu m’écarter de toutes les façons : il y a longtemps, un prêtre de l’Eglise m’avait proposé une bourse pour je fasse des études supérieures, j’allais accepter bien sur, mais il fallait que je parte cinq ans aux Usa, je me suis renseigné, finalement, cette bourse, en sous-main, c’était le gouvernement qui allait me la donner ... pour m’éloigner, j’ai donc du refuser, mais je travaille, je m’informe, j’étudie pour faire mon travail de président ».

La presse française traite ces informations par dessus la jambe, comme elle a traité honteusement les « guerre de l’eau » et la « guerre du gaz » : forcément les intérêts des financiers français sont opposés à ces nationalisations... Et puis, en France, les ultra libéraux intégristes cherchent à faire le contraire, à brader le contrôle de nos ressources énergétiques, à casser un secteur public qui marche au profit de groupes privés. La petite Bolivie et le président paysan indien sont plus intelligents et tournés vers l’avenir que les Villepin-Breton-Chirac taraudés par les grands groupes Enel, Suez, et tous les actionnaires qui veulent faire main basse sur notre gaz et notre électricité... Mais ça passera : le temps reviendra où nous reconstruirons nous aussi, ou nous renationaliserons, aussi bien tout le secteur énergétique Edf-Gdf que le secteur de nos télécommunications (France télécom doit revenir aussi au secteur public).


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