* Leo Ferre Les Anarchistes
http://www.youtube.com/watch?v=_1Pc...
* Léo Ferré - Ton style
http://www.youtube.com/watch?v=OBPH...
* Léo Ferré - Ni Dieu, Ni Maitre
http://www.youtube.com/watch?v=zp92...
* LEO FERRE - Poète, vos papiers !
http://www.youtube.com/watch?v=CDlB...
* Léo Ferré - C’est extra
http://www.youtube.com/watch?v=x0rM...
* Léo Ferré - Les étrangers
http://www.youtube.com/watch?v=UPUA...
* Léo Ferre Aragon - EST CE AINSI QUE LES HOMMES VIVENT ?
http://www.youtube.com/watch?v=5tL-...
Depuis quelques jours une rumeur s’enfle. Un événement marquera ce concert. Bernard Lavilliers, la chanson finie, de sa voix de centaure l’annonce : « Je vous fais un cadeau particulier. Une surprise. Parce que je sais que vous êtes attachés aux mots et à ceux qui nous ont précédés et qui chantaient sur une autre longueur ce que nous avons essayé d’exprimer. J’ai énormément de respect et d’amour pour un homme qui s’appelle Léo Ferré. Tant qu’il sera debout, Léo chantera. C’est un grand honneur qu’il nous fait : Léo Ferré. »
Oui, il est bien là, pour deux chansons. Le vieux lion à la blanche crinière s’avance en vêtements noirs, le pas court, marqué par les années. Le visage creusé de rides, expressif comme jamais. Il n’arrête pas de cligner des yeux en regardant cette foule qui, battant des mains par-dessus tête, lui fait un accueil colossal. Il s’approche du micro, visiblement ému. On ne sait si son rictus est celui de l’angoisse ou si des larmes d’émotion sont en train de poindre. La musique, sa musique, démarre. Pas n’importe laquelle. Dans son impressionnant répertoire, il a extrait une chanson qui résume tout ce qu’il était venu dire pour ce qui fut sa dernière apparition sur scène.
« Est-ce ainsi que les hommes vivent ? » Pour le dixième anniversaire de la mort d’Aragon, à la Fête de l’Huma, dans un spectacle de Bernard Lavilliers, qui a repris avec bonheur cette chanson dans un de ses disques, que choisir de mieux ? Léo doit s’aider de quelques notes sur un papier qu’il déchiffre, mais ses accents forts sont là : « Tout est affaire de décor / Changer de lit changer de corps / A quoi bon puisque c’est encore / Moi qui moi-même me trahit... »
Sur le côté de la scène, musiciens, éclairagistes, preneurs de son, tous ces techniciens du spectacles, habitués de l’inhabituel, se sont groupés pour ne pas perdre une miette. Bernard Lavilliers est resté discrètement en retrait.
Aux applaudissements ponctuant cette première chanson, succèdent quelques notes. Le visage de Léo se fait grave. La foule se tait. Que va-t-il chanter ? Dès les premières mesures, la foule l’a reconnue. Les premières paroles, dans un silence de glace, l’ont confirmé : « Y’en a pas un sur cent / Et pourtant ils existent / La plupart Espagnols / Allez savoir pourquoi / Faut croire qu’en Espagne / On ne les comprend pas / Les anarchistes. » La foule se dégèle un peu. On commence à lire sur les lèvres, au loin, dans l’immensité anonyme, des paroles murmurées. Un chant accompagné. Des poings se lèvent au-dessus des têtes. Des drapeaux rouges s’agitent. Peu à peu, avec toujours plus de conviction, dans un frisson comme seul le spectacle vivant en offre, le chant est repris à pleine voix. Même le service d’ordre s’y met.
L’artiste, dont le visage grave est repris plein cadre sur l’écran géant par les caméras de la SFP dirigées par Jean-Christophe Averty, scrute cette masse qui le comprend et l’approuve. Il crie ses convictions quand la musique s’arrête : « Fais-toi anar » et un « Ciao » en guise de fin. Bernard Lavilliers vient le remercier, mais c’est le vieux lion qui a envie de dire merci. Merci à Bernard : « On dit Lavilliers, moi je dis Bernard. » Les deux hommes s’étreignent. Longuement. Et Léo reprend le micro pour dire à ceux qui l’ont si bien compris : « Ne vous laissez pas faire ! Par personne. T’as compris ? Ne vous laissez pas faire ! Bordel de dieu ! » Il sort sous les acclamations, accompagné d’un tonitruant « Ni dieu ni maître » de Lavilliers.
Le public ne le voit plus. Il descend les marches vers les loges. Il crie encore : « Ne vous laissez pas faire. » Une sorte de rage. Un message qu’il tenait absolument à faire passer. Marie, sa compagne, de sa douceur naturelle, le prenant par le bras, lui dit : « Oui, Léo. »
Dans sa loge l’attend Michel Boué qui lui demande s’il a entendu le silence qui a accueilli le début des « Anarchistes ». « Non, répond le chanteur, qui disait ne pas avoir le trac. J’avais trop la trouille. » De cette chanson, il en est encore question avec Roland Leroy, venu le saluer. Les deux hommes se rappellent le temps où Léo Ferré se produisait dans les fêtes fédérales de Seine-Maritime. « Tu te rappelles, dit le directeur de « l’Humanité », quand tu as écrit cette chanson, je t’ai dit qu’elle était très bien, sauf que j’aurais remplacé anarchiste par communiste ». Les deux hommes rient. Marie aussi.
Bernard Lavilliers, épuisé par un long spectacle où il s’est donné encore plus que d’habitude, arrive. Pas pour souffler, mais pour savoir si Léo est content de leur prestation. Pour un peu le loub chercherait un père. Léo le regarde avec affection, avec la même émotion qui l’a étreint tout à l’heure, lui murmurant, sans que les micros ne puissent l’enregistrer : « Embrasse-moi. »
BRUNO PEUCHAMIEL.
http://www.youtube.com/watch?v=k3Ib...
Pour la flamme que tu allumes
Au creux d’un lit pauvre ou rupin
Pour le plaisir qui s’y consume
Dans la toile ou dans le satin
Pour les enfants que tu ranimes
Au fond des dortoirs chérubins
Pour leurs pétales anonymes
Comme la rose du matin
Thank you Satan
Pour le voleur que tu recouvres
De ton chandail tendre et rouquin
Pour les portes que tu lui ouvres
Sur la tanière des rupins
Pour le condamné que tu veilles
A l’Abbaye du monte en l’air
Pour le rhum que tu lui conseilles
Et le mégot que tu lui sers
Thank you Satan
Pour les étoiles que tu sèmes
Dans le remords des assassins
Et pour ce cœur qui bat quand même
Dans la poitrine des putains
Pour les idées que tu maquilles
Dans la tête des citoyens
Pour la prise de la Bastille
Même si ça ne sert à rien
Thank you Satan
Pour le prêtre qui s’exaspère
A retrouver le doux agneau
Pour le pinard élémentaire
Qu’il prend pour du Château Margaux
Pour l’anarchiste à qui tu donnes
Les deux couleurs de ton pays
Le rouge pour naître à Barcelone
Le noir pour mourir à Paris
Thank you Satan
Pour la sépulture anonyme
Que tu fis à Monsieur Mozart
Sans croix ni rien sauf pour la frime
Un chien, croque-mort du hasard
Pour les poètes que tu glisses
Au chevet des adolescents
Quand poussent dans l’ombre complice
Des fleurs du mal de dix-sept ans
Thank you Satan
Pour le péché que tu fais naître
Au sein des plus raides vertus
Et pour l’ennui qui va paraître
Au coin des lits où tu n’es plus
Pour les ballots que tu fais paître
Dans le pré comme des moutons
Pour ton honneur à ne paraître
Jamais à la télévision
Thank you Satan
Pour tout cela et plus encor
Pour la solitude des rois
Le rire des têtes de morts
Le moyen de tourner la loi
Et qu’on ne me fasse point taire
Et que je chante pour ton bien
Dans ce monde où les muselières
Ne sont plus faites pour les chiens...
Thank you Satan !
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