Contrôle pileux du pubis : un blogueur poursuivi pour diffamation

dimanche 7 septembre 2014.
 

Deux Congolaises sans titre de séjour régulier sont arrêtées par la police. Pour éviter d’être expulsées, elles se disent alors mineures. Mais la police en doute, et les transfère dans un CHU. Où l’on commence, sur ordre du parquet, par leur faire des tests osseux à partir de radios du poignet, une pratique courante pour déterminer l’âge d’un étranger qui se prétend mineur. Courante, mais peu fiable.

Un médecin procède alors à "un examen plus approfondi", en l’occurrence des "tests de puberté" : poils des aisselles et du pubis, aréole des seins. A l’époque, vous aviez pu lire que, sur la base de ces expertises médicales qui les donnaient majeures contrairement à ce qu’indiquaient les papiers qu’elles avaient fournis, les deux Congolaises avaient été déferrées à la justice pour faux et usage de faux. A quoi s’ajoutait de facto l’entrée illégale sur le territoire.

C’est en découvrant l’article de Rue89, qui circulait sur des listes de diffusion du Réseau éducation sans frontières (RESF), que Jean-Jacques Seh Dikongue a découvert ces contrôles de puberté pratiqués par les experts au CHU.

"La pédophilie légalisée dans les hôpitaux ?! Comment est-ce possible ?!"

Le 15 octobre, il embraye sur son blog. Dans un post intitulé "Que sait la direction du CHU sur les agissements de ses médecins ?", il n’y va certes pas de main morte :

"La pédophilie légalisée dans les hôpitaux ?! Comment est-ce possible ?! Telles sont les exclamations et interrogations qui habitent chaque individu au courant du calvaire vécu par deux jeunes filles congolaises sous les coups tordus de leurs bourreaux en blouse blanche, le tout sous le couvert de la direction ?"

Plus loin, Jean-Jacques Seh Dikongue parle des praticiens hospitaliers comme de "pédophiles en blouse blanche" et enfonce le clou :

"Les hôpitaux ne sont plus des lieux sécurisés, surtout lorsque l’on est noir(e)s. (...) Tout y passe, vraiment tout. Du pubis à la forme de l’utérus en passant par les formes des seins, je vous épargne le toucher vaginal. Tout cela pour déterminer la minorité ou la majorité des deux jeunes filles."

Après plus d’une demie année de silence, l’affaire a rebondi le 20 juin, date d’un courrier signé du cabinet de l’instruction, au tribunal de grande instance de Paris. Par ce document qui lui est parvenu fin juin et que Rue89 s’est procuré, Jean-Jacques Seh Dikongue a appris que le parquet envisageait sa mise en examen pour "diffamation publique envers un fonctionnaire public".

Contacté avant son passage devant le juge, le 11 juillet, à 11 heures, le technicien informaticien de 41 ans dit qu’il "ne regrette rien" :

Il n’avait reçu aucune mise en demeure le sommant de supprimer le post incriminé, mais tout de même été informé par l’hébergeur, Canalblog, que le texte avait été retiré après plainte de la direction du CHU. Aujourd’hui, Jean-Jacques Seh Dikongue reconnait que la référence à la pédophilie est "peut-être un mot un peu fort" mais argue qu’il voulait "interpeller".

Par Chloé Leprince


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