Le long travail de reconstruction de la SFIO (de 1921 à 1932)

lundi 7 juillet 2008.
 

L’entreprise de reconstruction de la SFIO, au lendemain du congrès de Tours, n’a pas été un long fleuve tranquille. Elle n’en fut pasmoins inexorable en dépit demultiples difficultés politiques.Un entretien avec Jean-Marcel Bichat, délégué national à l’Histoire auprès du Premier secrétaire.

Au lendemain du congrès de Tours, le Parti est en ruines et ne compte plus qu’une trentaine de milliers d’adhérents, comme en 1905. Quel est au juste l’état des lieux ?

Une quinzaine de fédérations ont disparu et une vingtaine d’autres sont à la peine. Restent les militants les plus anciens, les élus et deux tendances autrefois opposées : les défenseurs de l’Union sacrée, comme Renaudel, Sembat ou Blum, et les partisans de la reprise des relations internationales, comme Longuet ou Paul Faure.

Le Parti a perdu son siège, l’essentiel de ses fonds et L’Humanité. Il bénéficie de la caution de Jules Guesde, qui meurt en 1922, et du concours de cadres expérimentés, tels que Jean Longuet, le petit-fils de Karl Marx, Pierre Renaudel, qui a succédé à Jaurès à la tête de L’Humanité, Bracke-Desrousseaux, helléniste et spécialiste des questions d’enseignement, Vincent Auriol, spécialiste des questions économiques et financières, Compère- Morel, spécialiste de la question paysanne, ou bien encore Paul Faure, secrétaire général du Parti, et Léon Blum, secrétaire général du groupe parlementaire et directeur,avec Jean Longuet, du Populaire. Blum est alors moins connu que Faure, le meilleur orateur du parti, qui multiplie éditoriaux, visites et meetings en province. La reprise des réunions publiques est difficile en raison de l’obstruction du PC qui interdit parfois toute réunion, notamment en région parisienne.

Le Congrès de Paris, en 1921, est l’occasion de faire le point...

Le Parti compte alors 55 000 adhérents, répartis dans 68 fédérations et 1 200 sections. En 1924, la SFIO s’engage auprès des radicaux dans le Cartel des Gauches. Il n’y a ni programme commun ni entente. Les fédérations peuvent présenter des listes PS-radicaux face aux listes uniques de la droite. Cette alliance entraîne une vague d’enthousiasme dans l’opinion de gauche. Les socialistes obtiennent une centaine de sièges à l’Assemblée, comme en 1914, malgré la défaite de Blum à Paris face au communiste Jacques Duclos.

En 1925, la SFIO est présente dans tous les départements. Auxmunicipales,ellemultiplie par deux le nombre de ses élus et de municipalités : elle gagne notamment Bordeaux, Mulhouse, Strasbourg, Rennes et Le Creusot avec Paul Faure.

Comment le Parti fonctionne- t-il ?

Il conserve les statuts acquis de 1905. La section, dotée d’un secrétaire et d’un trésorier, se réunit mensuellement ou chaque semaine et discute de l’actualité ou des textes nationaux, organise la distribution des tracts et l’affichage.

Le Parti connaît une véritable vie démocratique, contrairement au PC.Tout courant peut se faire entendre. Lesmilitants choisissent leurs dirigeants. Il assure un strict contrôle des députés et des sénateurs, contrairement au Parti radical. Élu à Narbonne, en 1929, Blum devient président du groupe, fonction créée à cette époque, Vincent Auriol l’ayant remplacé au secrétariat général du groupe.

Commence alors une longue phase de reconquête, sur fond de tensions internes...

Avec 137 000 adhérents, en 1932, la SFIO compte plus d’adhérents qu’en 1914, mais moins qu’auparavant. Il s’agit surtout d’un parti d’hommes : il n’y a en effet que 3 400 adhérentes en 1934. Une organisation de Femmes socialistes, avec un comité central de 20membres, se crée auprès de la direction du Parti.Les jeunes, soupçonnés de sympathies pour l’extrême gauche, sont sous tutelle, avec un comité national et un secrétariat mixte.

Les étudiants ont enregistré dix fois plus d’adhésions entre 1925 et 1932 et sont présents dans les facultés, à l’ENS et dans les écoles normales. Les « Faucons Rouges », souvent issus de milieux défavorisés, organisent des fêtes, des camps d’été et participent aux manifestations du Parti. La CGT, plus forte que la CGTU - proche des communistes - se rapproche de la SFIO mais demeure fidèle à la Charte d’Amiens et à l’indépendance syndicale, ce qui prive le Parti d’un réel relais syndical. En 1932, la SFIO compte plus de voix que les radicaux, mais moins de députés.

Propos recueillis par Bruno Tranchant


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