Municipales : Le bon cap malgré les sirènes

samedi 15 mars 2008.
 

Attention : l’analyse des résultats d’une élection est un moment de la bataille politique elle-même. Faute de produire un discours clair et cohérent sur le scrutin de dimanche dernier, la gauche risque de laisser noyer l’enjeu du second tour dans la confusion des commentaires médiatiques plus ou moins inspirés par le pouvoir. Avec le danger, au bout du bout, que soit réduite à néant la signification politique de ce qui constitue pourtant le premier rendez-vous électoral pour le nouveau pouvoir.

C’est pourtant Sarkozy lui-même qui disait que « le concept d’élection dépolitisée est absurde ». Même si elle n’avait été comme le serine à l’envi les dirigeants UMP qu’une simple « addition de scrutins locaux », l’élection produit au moins une réalité nationale. Et les effets qui vont avec. Appelés aux urnes le même jour dans toute la France, les électeurs se sont prononcés à 49,5% pour les listes de gauche, 40% pour celles de l’UMP, 3,6% pour le Modem. C’est un rapport de forces inversé par rapport à la dernière élection présidentielle. En moins de 9 mois, Sarkozy a dilapidé sa dynamique politique et électorale. Pire, après avoir été une solution, il est devenu un problème pour la droite. Celle-ci a été contrainte de « localiser » le scrutin afin d’échapper à la sanction nationale. Le désaveu du pouvoir est donc la leçon politique numéro un des urnes. Il survient au moment même où Sarkozy réclame les pleins pouvoirs sur la droite et sur le pays. Les éléments d’une crise politique majeure sont donc réunis. C’est à ce contexte que la gauche doit se préparer davantage qu’à la gestion tranquille de ses positions locales.

Alors qu’en est-il à gauche ? On constate que l’échec de la droite ne provoque pas un mouvement symétrique d’entraînement de la société par la gauche. C’est d’abord l’abstention qui se renforce. Elle atteint un niveau sans précédent à une élection municipale. Là encore c’est un retournement brutal. En 2007, la participation n’avait jamais été aussi élevée à une présidentielle depuis les débuts de la Cinquième République. En 2008 elle n’a jamais été aussi basse à un premier tour de municipale. Le retour d’une abstention record est la leçon politique numéro deux du scrutin.

Si l’échec du pouvoir bénéficie en premier lieu à l’abstention, il entraîne aussi un mouvement de radicalisation politique au sein de l’électorat. Celui-ci prend des formes diverses. A droite, il se manifeste dans la meilleure résistance de l’électorat « petit-blanc » au contact des quartiers populaires qui eux se sont abstenus (voir les succès nets de la droite dans des villes comme Drancy ou Meaux, ainsi que la reconquête du Département de Seine-et-Marne). A gauche, il s’exprime dans les excellents résultats du PCF et la percée des listes de l’extrême-gauche. Dans les zones dominées par les couches moyennes supérieures, cette radicalisation se manifeste également par le vote socialiste (par exemple à Rouen). La radicalisation politique est la troisième leçon de ce premier tour.

Ces trois leçons dessinent la feuille de route pour réussir le second tour : politiser, mobiliser, rassembler la gauche. Tout l’inverse de ce à quoi nous invite une presse qui tente de conjuguer localisme étroit, abandon des préoccupations populaires et alliance avec le Modem en faisant de ce dernier le sésame de la victoire. Les chiffres montrent pourtant le contraire. Les victoires emblématiques sur la droite ont été acquises sans le Modem et souvent contre lui. L’extrême gauche est souvent devant le Modem dans les endroits clés du second tour. Sous la croûte neigeuse du désemparement et de l’abstention, les primevères qui percent traduisent l’envie exaspérée de gauche. Sachons les faire éclore si nous voulons qu’un printemps fleuri succède à ce trop long hiver.


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