Feuilleton socialiste sur le Traité européen ce mardi 15 janvier

jeudi 17 janvier 2008.
 

Ce mardi, c’était la journée où tout allait s’accélérer au PS à propos du référendum et du traité de Lisbonne. Comédie en trois actes, un à l’Assemblée nationale, un au Sénat, le dernier à Solferino.

Pour commencer, me voila en retard à la conférence de presse du Comite national pour un référendum qui ouvre la matinée, au bureau numéro 5 de l’Assemblée Nationale. Heureusement Yves Salesse a pris en main la présidence de la tribune, Marie Georges Buffet a commencé une belle présentation de la situation et les choses sont allées à leur rythme sans dégâts. Alain Krivine était encore plus en retard que moi. Et François Delapierre de même. Ca rend nerveux. Du coup j’ai mangé la consigne de transmettre le salut de José Bové que j’avais eu au téléphone la veille et qui est dans son coin de campagne pour refaire ses forces après sa belle victoire sur les OGM. Un romain serait rentré chez lui. La matinée a réellement commencé à se déboutonner quand on a appris le résultat du vote de la motion référendaire présentée par les communistes à l’assemblée : 146 voix pour, 165 contre ! Incroyable ! Un écart aussi serré n’était pas prévu ! La droite a eu chaud ! Le débat a parait-il été très riche et on m’a recommandé de lire l’intervention du socialiste landais Alain Vidalies qui est parait-il très bien argumentée. Je transmets le conseil.

FIN PITEUSE DU BOYCOTT

Suite du feuilleton, la réunion du groupe socialiste à l’assemblée. Je résume : la ligne du boycott du congrès de Versailles est mise en déroute. Jean-Marc Ayrault ressort en short de sa tentative de coup de force. Le reste de la journée va voir se déployer l’onde de choc de cette fin piteuse. La réunion du groupe socialiste à l’assemblée s’achève sur un vote confus en faveur de l’abstention « à condition que chacun la respecte ». Mais Vals et Lang ont déjà dit qu’ils voteraient oui quoiqu’il se décide. De leur côté, dix minutes après la fin de la réunion de groupe, les députés socialistes partisans du référendum, réunis à l’initiative d’Henri Emmanuelli, décident que de toute façon ils voteront non. Je me trouve seul sénateur à cette réunion.

J’ai là beaucoup d’amis personnels et c’est une occasion d’embrassades qui sont une aubaine pour l’expansion de mes microbes. N’empêche : je remarque la détermination sur les visages et dans les interventions. J’en conclus que l’abstention fraichement décidée est déjà morte et enterrée. Elle a tenu dix minutes. Ce n’est pas fini.

AU SENAT

L’après midi au groupe socialiste du Sénat, l’ambiance habituelle de bonhommie et d’écoute n’empêche pas une nette radicalisation des positions. Une claire majorité de présents, très Strauss Kahniens, se prononce pour le vote « oui » plutôt que pour l’abstention, en dépit de la proposition du président du groupe Jean-Pierre Bel. Personne ici ne raconte de salades. Tout le monde sait ce qui va se passer en réalité et chacun des orateurs annonce qu’il agira « en conscience et en cohérence ».

Adieu l’abstention, là aussi. Avantage on se quitte tranquilles : personne n’a menti ni essayer de manipuler les autres. Cela peut paraître dérisoire mais dans l’ambiance étouffante et venimeuse des postures et des simagrées qui règne dans le parti, c’est un havre de fraicheur politique. Un argument a cependant été sorti du chapeau : le non à la réforme de la Constitution bloque le système mais n’oblige pas à convoquer un référendum. C’est absurde. Si le système reste bloqué le traité n’est pas adopté et c’est le même résultat que si l’on votait non au référendum ! Par conséquent si la réforme est bloquée, le référendum sera obligatoirement convoqué avant le début de la présidence française de l’Union et il suffit que la question inclue la révision de la Constitution française pour que l’ordre juridique y trouve son compte. Je crois que cette trouvaille va vivre sa vie quelque jour contre les partisans du vote non au congres de Versailles puisque nous avons déjà démonté tous les autres.

ENTRACTE Avant le dernier acte, je prends le temps d’une halte à la librairie. J’achète « Ines de mon âme » d’isabel Allende. Pendant les fêtes j’ai été voir au cinéma « Rue santa fé » de Carmen Castillo. Une merveille pour faire réfléchir un militant sur le sens de l’engagement politique. Le bouquin d’Isabel Allende n’est pas dans le même registre. Mais il parle aussi de courage et de détermination. Indispensable pour maintenir tendu le ressort qui vous lie à vous-même dans les périodes glauques et confuses ou le bout du tunnel n’est plus visible.

LA SERINGUE

Quand arrive l’heure du bureau national du parti, tout le monde est déjà mort de fatigue et assommé d’ennui à l’idée de répéter ses arguments pour la troisième ou quatrième fois de la journée devant des interlocuteurs qui les ont déjà entendus autant de fois. Plus personne ne peut plus convaincre qui que ce soit. Hollande propose une trêve des arguments et des débats. Il sait que le boycott est mort. Pas la peine de l’enterrer une nouvelle fois. Il manque vraiment beaucoup de monde à ce bureau national....

Bons camarades, nous épargnons à Hollande l’humiliation d’avoir à revenir sur sa position. A quoi bon ? Pour le reste autant fermer le ban avec discrétion. Il sait que l’abstention est une façade. Pourtant, "il prend acte" que c’est la position qui a été retenue. Les sénateurs socialistes présents tordent le nez. Point. En version sous titrée : « que chacun fasse comme il le sent, et qu’on arrête le massacre ». On passe soudain au point suivant de l’ordre du jour.

A Versailles, pour le congrès, un par un, chacun pour soi, chaque parlementaire socialiste votera en conscience. Comme il le sent. Un sénateur avait rappelé la phrase d’un illustre radical : « quand on s’est mis dans une seringue, on ne peut sortir que par le trou de l’aiguille, à quel endroit, et dans quel état ! » Je n’y tiens pas. Je voterai non à la réforme de la Constitution et non au traité dans tous les cas. Et comme moi, nombre d’autres socialistes.


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