Le plan Trump pour Gaza « répond aux objectifs de guerre d’Israël », selon Netanyahu

mardi 14 octobre 2025.
 

La proposition de « paix » prévoit que Gaza soit administrée par une junte internationale dirigée par Tony Blair et Donald Trump lui-même. « Si le Hamas rejette son plan, monsieur le Président, ou s’il l’accepte en apparence puis cherche à le torpiller, alors Israël achèvera le travail lui-même. Cela peut se faire facilement ou difficilement », a déclaré Benyamin Netanyahu, Premier ministre israélien, après que Donald Trump ait présenté sa feuille de route pour mettre fin à l’invasion de Gaza lors d’une conférence à la Maison Blanche.

« Votre plan, monsieur le Président, répond à nos objectifs de guerre », a ajouté le criminel israélien. À ses côtés, Trump s’est contenté de souligner que la majorité des Israéliens souhaitent la fin du conflit, tout en reprenant les menaces de Netanyahu. La conférence avait été précédée d’une campagne diplomatique menée par plusieurs pays arabes pour convaincre Trump de rejeter l’annexion de la Cisjordanie et d’annoncer un plan intégrant l’initiative de monarchies comme les Émirats arabes unis, le Qatar, l’Arabie saoudite et de la dictature militaire d’Égypte. Celles-ci proposent la mise en place d’un gouvernement technocratique palestinien, soutenu par la communauté internationale, après le retrait des troupes israéliennes.

Cette initiative se heurte toutefois au projet de Netanyahu, qui vise à établir une junte militaire internationale acquise à Israël, chargée de superviser un programme de reconstruction et d’administration sans calendrier clair pour transférer le pouvoir à une autorité palestinienne élue. La feuille de route de Trump semble être un compromis entre les deux approches et, à court terme, vise à imposer ce qu’Israël n’a pas réussi à obtenir par les armes : le désarmement et l’éradication du Hamas. Notre article.

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« Il est clair que ce plan n’est pas réaliste » Pour relancer les négociations, Netanyahu a personnellement contacté le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdulrahman Al Thani, afin de présenter ses excuses pour l’attaque israélienne à Doha contre l’équipe de négociation du Hamas. Il a également promis de verser une indemnisation pour la mort du garde qatari tué lors du bombardement — condition préalable exigée par Doha pour reprendre son rôle de médiateur entre Israël et le Hamas.

La conférence commune Trump-Netanyahu à Washington a aussi semblé destinée à alléger la pression internationale sur Israël, alors que ses forces encerclent la ville de Gaza et que plusieurs pays arabes, asiatiques et européens ont reconnu un État palestinien.

Le Hamas, de son côté, a déclaré ne pas avoir été informé du plan avant son annonce publique : « ses termes reflètent largement la vision israélienne et représentent une tentative de freiner l’élan international vers la reconnaissance de l’État palestinien », a déclaré le groupe armé.

La proposition en 21 points prévoit qu’une fois l’accord accepté par Israël, dans les 72 heures, tous les otages israéliens, vivants ou morts, devront être remis. En échange, « une fois tous les otages libérés, Israël relâchera 250 prisonniers condamnés à perpétuité, ainsi que 1 700 Gazaouis détenus depuis le 7 octobre 2023, y compris toutes les femmes et les enfants arrêtés dans ce contexte ».

Le texte prévoit également l’échange de dépouilles : « Pour chaque otage israélien dont les restes seront restitués, Israël remettra les corps de 15 Gazaouis décédés. » Entre-temps, « les forces israéliennes se retireront vers une ligne convenue afin de préparer la libération des otages. Toutes les opérations militaires seront suspendues, y compris les bombardements aériens et d’artillerie, et les lignes de front resteront figées jusqu’à ce que les conditions d’un retrait complet et progressif soient réunies ».

Pour plusieurs observateurs, ces conditions semblent conçues « pour que le Hamas les rejette, offrant à Netanyahu un prétexte pour préserver son gouvernement » Le plan propose aussi une amnistie sélective pour le Hamas. « Une fois tous les otages libérés, les membres du Hamas bénéficieront d’une amnistie israélienne s’ils s’engagent à une coexistence pacifique et déposent les armes », précise le document. « Les combattants qui souhaitent quitter Gaza disposeront d’un passage sûr vers des pays d’accueil. »

Le désarmement inclut la destruction de l’infrastructure militaire du Hamas — tunnels, ateliers d’armement — et l’interdiction de sa participation à tout futur gouvernement de la bande de Gaza.

Pour plusieurs observateurs, ces conditions semblent conçues « pour que le Hamas les rejette, offrant à Netanyahu un prétexte pour préserver son gouvernement », dominé par des éléments extrémistes favorables à l’occupation permanente de Gaza et à l’annexion de la Cisjordanie. Le Hamas a réaffirmé qu’il ne déposera pas les armes tant qu’un État palestinien avec Jérusalem pour capitale n’aura pas vu le jour, et que tout échange d’otages doit être accompagné d’un retrait progressif de l’armée israélienne. L’organisation se dit toutefois disposée à ne pas participer à un futur gouvernement à Gaza.

Le plan inclut également un acheminement immédiat d’aide humanitaire : réhabilitation des infrastructures (eau, électricité, assainissement), hôpitaux, boulangeries, déblaiement des ruines et réouverture des routes. Cette assistance devrait être gérée par l’ONU, le Croissant-Rouge et d’autres organismes, sans interférence des parties. Le document rappelle notamment qu’Israël a détruit des infrastructures vitales et bloqué l’aide humanitaire, des actes assimilés à des crimes de guerre en droit international.

De tels éléments pourraient constituer des preuves dans les nombreuses procédures ouvertes contre Israël, Netanyahu, ses officiers et ses soldats devant la justice internationale.

L’administration de Gaza par un comité technocratique ? Le texte prévoit que Gaza soit administrée par un comité technocratique apolitique durant une phase de transition, chargé de gérer les services publics. Sa supervision incomberait à une « Junte de la paix » présidée par Donald Trump, aux côtés d’autres personnalités, dont l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair. Cette instance contrôlerait les fonds de reconstruction jusqu’à ce que l’Autorité palestinienne soit jugée apte à reprendre la gestion de Gaza de manière sûre et effective. Elle serait épaulée par une force militaire internationale chargée du désarmement et du maintien du monopole de la violence.

L’objectif affiché est que, grâce à la reconstruction et aux réformes, émergent des conditions favorables à l’autodétermination et à la création d’un État palestinien — une promesse vague, sans calendrier ni garantie ferme.

On ignore si ce projet s’inspire de la proposition transmise par Tony Blair à l’administration Trump, qui évoquait une « Autorité internationale de transition pour Gaza » placée sous tutelle étrangère. Blair en aurait assuré la présidence et la diplomatie, ainsi que la sécurité stratégique vis-à-vis d’Israël, de l’Égypte et des États-Unis.

L’organigramme présenté prévoit des secrétariats chargés de l’administration, de l’humanitaire, de la reconstruction et des affaires juridiques, au-dessus d’une Autorité palestinienne désignée par la junte internationale. Des représentants soutenus par des pays arabes garants de l’accord pourraient y participer.

Parmi les noms évoqués pour cette junte figurent Sigrid Kaag (coordinatrice spéciale de l’ONU pour le processus de paix au Moyen-Orient), Marc Rowan (homme d’affaires pro-israélien), le milliardaire égyptien Naguib Sawiris, ou encore Aryeh Lightstone, du Institute of Peace des Accords d’Abraham. La Fondation humanitaire de Gaza, liée à des responsables israéliens et américains, pourrait servir de tremplin pour un gouvernement de transition, proche de celui proposé par Trump.

Les 21 points comprennent aussi un volet économique particulièrement intriguant : création d’une zone spéciale avec tarifs préférentiels, constitution d’un panel d’experts, incitations aux investissements et facilitation du commerce international. Parmi les projets cités figurent les autoroutes « MBS Ring » et « MBZ Central », en référence aux princes Mohammed ben Salman et Mohammed ben Zayed, ainsi qu’une « zone de fabrication intelligente Elon Musk » à la frontière entre Gaza et Israël pour exporter vers l’Europe.

Le plan propose aussi la création d’« îles Trump » — stations touristiques artificielles inspirées des îles Palm de Dubaï. Contrairement à certaines versions antérieures, il affirme qu’aucun habitant ne sera contraint de quitter Gaza : chacun pourra partir, revenir ou rester pour « bâtir une meilleure Gaza ». Mais au-delà de ces promesses pour le moins hasardeuse, la feuille de route confère à Tel Aviv un droit de regard sur tout retrait militaire et sur l’application des termes de l’accord. Les Forces de défense israéliennes conserveraient la possibilité d’intervenir à leur discrétion.

En pratique, le plan américain offre aux Palestiniens un gouvernement à Gaza conçu comme une structure emboîtée : plusieurs niveaux décisionnels dictés par des responsables favorables à Israël, sous la supervision d’une junte présidée par Trump. Pour Ibrahim Joudeh, un Palestinien de 39 ans réfugié dans un abri à Gaza, « il est clair que ce plan n’est pas réaliste ».

Par Bruno Sgarzini


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