L’UMP recycle l’extrême droite

samedi 29 décembre 2007.
 

Élections 2008 . Le parti du président, qui se pose en dernier refuge d’élus d’extrême droite soucieux de conserver leurs postes, entend en tirer profit face à la gauche.

Pour préparer les municipales, l’UMP ne compte pas que sur des alliances à gauche. L’ex-député UMP Jérôme Rivière (depuis passé au Mouvement pour la France de Villiers) l’avait préconisé de longue date, dans le Figaro du 4 avril 2007 : « La question d’un accord avec le FN ne doit plus être taboue. » Or, si nationalement le Front national s’effondre, l’extrême droite et ses alliés restent parfois incontournables localement. Le parti de la majorité présidentielle entend s’appuyer sur eux pour « barrer la route aux socialo-communistes », comme il entend s’appuyer sur les élus qui, il y a quelques années, ont « trahi » la droite dite « républicaine » en s’alliant à l’extrême droite.

L’occasion d’une reconversion

Adhérent au Front national depuis 1974, Daniel Simonpiéri a été élu en 1995 maire de Marignane, une des villes « laboratoire » du parti (avec Toulon, Vitrolles et Orange). En 1986, Jean-Claude Gaudin fait alliance avec le FN pour être élu président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur. L’occasion pour de nombreux élus, dont Simonpiéri, d’entamer une reconversion au sein de la « droite républicaine ». En 2000, le maire de Marseille lui fait une place à la communauté urbaine de la métropole marseillaise. En 2004, le groupe UMP-UDF au conseil régional l’accueille sur son banc. Son blanchiment sera total à l’occasion des prochaines municipales : grâce à Jean-Claude Gaudin, président de la commission d’investiture UMP, Simonpiéri est candidat du parti de la majorité présidentielle. À Lyon, la droite « sera unie » sous la houlette de Dominique Perben, investi par l’UMP. Il a trouvé « un accord avec les anciens colistiers de Charles Millon », ex-président de la région Rhône-Alpes élu avec les voix du FN. Au grand dam de sa propre association de soutien, Lyon Nouvel Horizon, dont le président, Philippe Genin, a déclaré à 20 Minutes, le 15 novembre : « La présence de certains élus (millonistes) sur les listes de Dominique Perben me poserait un cas de conscience. » À Nice, le maire sortant, Jacques Peyrat, UMP mais ancien du Front national, s’est fait souffler l’investiture UMP par le secrétaire d’État à l’Outre-Mer, Christian Estrosi. Proche de Nicolas Sarkozy, il a lui aussi été allié au Front national en PACA. Mieux : en tant que conseiller régional RPR partisan d’un accord avec Jean-Marie Le Pen, il avait accueilli des transfuges du FN dans les rangs du RPR, s’assurant la tête de l’opposition et passant à loisir des accords avec le FN et le MNR.

Une idéologie de droite dure

Le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers, « sas de décontamination » entre l’extrême droite et la droite dite « républicaine », est jugé « plus fréquentable » que le FN par l’UMP. Il pourrait lui aussi signer des accords avec le parti du président de la République. Comme lors des élections législatives, durant lesquelles le parti de Nicolas Sarkozy n’a présenté personne face aux deux sortants MPF de Vendée. Le but de l’UMP est davantage d’asseoir une idéologie de droite dure que d’obtenir un avantage stratégique : implanté essentiellement en Vendée, le MPF représente environ 2 % de l’électorat national. Le but de son secrétaire général, Guillaume Peltier, chargé de négocier avec l’UMP, est pragmatique : garantir la réélection de ses maires, Jacques Bompard à Orange (Vaucluse) et Jean-Louis Millet à Saint-Claude (Jura). « Le mot d’ordre est aux accords locaux, avec pour objectif de tripler le nombre des conseillers municipaux du MPF », souligne Guillaume Peltier. Des accords seraient déjà trouvés dans le Rhône, les Hauts-de-Seine, en Bretagne, dans le Nord... En tout, le parti espère « 500 places éligibles d’adjoints ou de conseillers municipaux ». Et des têtes de liste assurées dans quelques communes telles que Bollène (Vaucluse), que brigue la femme du maire d’Orange, Marie-Claude Bompard, ou Vénissieux (Rhône).

Les alliés d’hier du Front national profitent de sa débâcle électorale pour frayer avec la « droite décomplexée ». Avec d’autant moins de frilosité que Nicolas Sarkozy, bouclant sa stratégie d’embrasser tout le spectre politique, a signé l’amnistie des élus qui ont lancé des passerelles vers leur droite : « L’alliance avec le FN, c’est du passé. Il y a prescription », avait-il estimé en mars 2006 à l’intention de Charles Millon. La maison UMP accueille à nouveau les brebis égarées. Surtout lorsqu’elles ont facilité le rapprochement avec l’extrême droite. Après tout, n’est-ce pas un des facteurs de la victoire de Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle ?

Grégory Marin


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message