Fusion IRSN/ASN : la sûreté nucléaire torpillée par les macronistes et le RN

dimanche 21 avril 2024.
 

Ce 9 avril 2024, l’Assemblée nationale a voté en faveur de la fusion de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). L’opposition à ce texte s’est étalée des insoumis à LIOT. Le RN, au départ opposant à ce texte, a finalement voté en sa faveur. Girouettes.

Battus en mars 2023 sur ce sujet, les macronistes ont fait voter leur loi au forceps un an plus tard. Objectif affiché du camp présidentiel : « fluidifier les processus d’examen technique et de prise de décision de l’ASN », alors que la filière nucléaire est massivement soutenue par l’exécutif, notamment par la construction de 6 nouveaux EPR, accompagnés de petits réacteurs nouvelle génération (SMR/AMR).

Problème : une telle fusion est conspuée par les salariés des deux organismes, par de nombreux experts, plusieurs rapports dont deux de la Cour des Comptes. En fusionnant ces deux organismes, le camp présidentiel et le RN vont affaiblir la sûreté nucléaire dans notre pays, augmentant dès lors le risque d’incidents nucléaires. « Nous sommes dévastés », ont réagi les salariés de l’IRSN sur Twitter. « C’est la fin du modèle de sûreté nucléaire français. Contre les salariés, contre les professionnels, contre les experts. C’est une grave erreur. Nous reconstruirons tout », a déclaré Clémence Guetté, députée LFI. Notre article.

Pourquoi la fusion IRSN/ASN met à mal la sûreté nucléaire du pays

« Nous sommes dévastés », ont déclaré les salariés de l’IRSN sur Twitter, à la suite du vote de l’Assemblée nationale en faveur de la fusion des deux organismes. Une réaction qui ne laisse guère de doute quant à leur position à ce sujet. Pourquoi cette fusion va mettre à mal, in fine, la sûreté nucléaire du pays ? Parce que ce sujet, au-delà de la sûreté et la qualité des infrastructures nucléaires, est avant tout lié au facteur humain.

Le démantèlement de l’IRSN par sa fusion avec l’ASN, va aboutir à un choc de culture entre les deux organismes, mettant à mal la « fluidité » renforcée recherchée par le camp présidentiel. D’un côté, l’ASN, dont la majorité des dirigeants est nommée par le président de la République, avec une culture d’État, propre à une administration, voire du secret. De l’autre côté, l’IRSN, un établissement public à la culture scientifique, défenseur du partage du savoir, publiant un rapport annuel sur l’état de ses travaux.

Au-delà de ce choc des cultures, se pose la question de la transparence des décisions prises et de l’indépendance des experts du nucléaire. Aujourd’hui, tout l’intérêt de la séparation entre les deux organismes est de permettre une expertise et un contrôle bicéphale (à deux têtes, ndlr) du secteur nucléaire.

Actuellement, « l’IRSN fait des recherches et produit des expertises sur les risques des installations nucléaires qu’il fournit à l’ASN pour éclairer cette dernière dans sa décision », explique Reporterre. Ainsi, « les opposants à la nouvelle organisation craignent que le regroupement de ces deux fonctions entraîne une perte d’indépendance des experts. Mais aussi un manque de transparence pour le public, puisque les avis de l’IRSN sont publics depuis 2015 ».

Experts, salariés, syndicats, rapports : le gouvernement avance tête baissée concernant la sûreté nucléaire

« Le projet de loi actuel conduit à des régressions majeures dont certaines vont même à l’encontre des recommandations techniques de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Ce choix s’accompagne également de risques majeurs qui entraîneront des conséquences néfastes sur le système d’évaluation et de gestion des risques radiologiques et nucléaires dont une désorganisation au plus mauvais moment du plan de relance du nucléaire voulu par le président de la République ». Dans une lettre diffusée à l’ensemble des parlementaires, la CFDT, la CFE-CGC et la CGT ne sont pas dans la nuance.

Thierry Charles, ancien directeur général adjoint de l’IRSN, a par ailleurs alerté sur la perte de compétences possible de l’IRSN. En effet, il « réunit en son sein des compétences sur la sûreté et la radioprotection ; sur la sûreté et la sécurité nucléaires — alors que l’ASN n’est compétent que sur la sûreté ; et sur les installations nucléaires civiles et de défense — là aussi partagées entre l’ASN et l’Autorité de sûreté nucléaire de défense ». Des spécificités de l’IRSN qui manqueront progressivement dans l’expertise publique du nucléaire, mettant à mal la sûreté des installations in fine.

Les salariés des deux organismes n’y étaient pas favorables, de même que leurs syndicats, un grand nombre d’experts… même la Court des Comptes. En 2014, elle écrivait : « La fusion de [l’ASN et de l’IRSN] constituerait une réponse inappropriée par les multiples difficultés juridiques, sociales, budgétaires et matérielles qu’elle soulèverait. »

Depuis l’annonce de leur fusion il y a plus d’un an, les salariés de l’IRSN ont mené une lutte exemplaire. Ils ont multiplié les rassemblements, les prises de paroles, lançant une pétition à plus de 10 000 signatures, alertant l’opinion publique sur les dangers de cette fusion. Les députés LFI, notamment Clémence Guetté, Maxime Laisney et Anne Stambach-Terrenoir ont toujours été à leurs côtés. Par leurs votes, les macronistes, le reste de la droite et le RN mettent à mal la sûreté nucléaire du pays.

Par Nadim Février


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