Forum thématique Les socialistes et le marché 1 : Les politiques publiques face au nouveau capitalisme (Pascal Cherki)

mercredi 12 décembre 2007.
 

Ce qu’on appelle la « mondialisation » est la conséquence d’un processus combiné de libéralisation, de globalisation des marchés financiers et de libéralisation des échanges commerciaux. Ce processus a été initié à la fin des années 70 comme la réponse du capital à la baisse continue de ses taux de profits. Il s’agit donc dés le départ de décisions politiques prises par une partie des classes dirigeantes occidentales et non d’une évolution indéterminée du capitalisme. Ce mouvement a connu une accélération après la disparition de l’URSS. Privé de son principal et meilleur adversaire le capitalisme s’est senti pousser de nouvelles ailes et ce d’autant plus rapidement que les socialistes et la social démocratie n’apparaissaient pas capables de porter une alternative globale. Cantonnée dans le meilleur des cas à un rôle de résistance, la social démocratie a le plus souvent accompagné le processus de passage progressif vers la domination du capitalisme financier.

Cette conversion de la social démocratie a pris des formes et des rythmes plus ou moins variés selon l’environnement économique et social des pays ou des continents concernés. Ainsi, en Amérique du Sud, certains partis sociaux démocrates ont mis en œuvre ou ont cautionné avec zèle les recommandations du FMI issues du consensus de Washington qui plongèrent ces pays dans une crise profonde. Ceci explique en grande partie pourquoi, à l’exception du Chili, ce sont des forces nouvelles de gauche qui ont été portées au pouvoir au Brésil, au Venezuela, en Bolivie, en Uruguay. En Europe, les socialistes et sociaux démocrates se sont progressivement laissés entraîner vers la définition de politiques publiques intégrant les paradigmes du capitalisme financier. Les privatisations des entreprises publiques et des principaux services publics ont été promues au nom de l’adaptation à la mondialisation et au nom de la reconnaissance des prétendus bienfaits de la concurrence. La politique monétaire s’est prévalue d’une prétendue neutralité et s’est articulée exclusivement autour de la lutte contre une inflation qui, parce qu’elle a complètement disparue, est devenue le paravent commode d’une défense de la rente. La politique fiscale tend à devenir un outil de redistribution au service des seuls riches alourdissant en contrepartie le poids de la dette et nourrissant de ce fait un cercle vicieux. Le plein emploi est resté une proclamation purement théorique contredit par la promotion de nouvelles doctrines comme le NAIRU, l’ « employabilité » ou la « flexisécurité ».

Les socialistes français n’ont pas échappé à cette pente glissante : Pionniers de la libéralisation financière entre 1983 et 1986, promoteurs de la politique du franc fort entre 1988 et 1993 et acteurs importants des privatisations entre 1997 et 2002. La politique des privatisations en est un exemple éloquent. Depuis le milieu des années 80 le montant mondial des privatisations s’est élevé à la somme de 800 milliards de dollars. En France ce montant a atteint la somme de 100 milliards d’euros soit près de 15% du montant total des privatisations effectuées à ce jour dans le monde.

Pourtant on assiste depuis le milieu des années 90 à un réveil des consciences. Les effets des politiques néolibérales sont de plus en plus rejetés par les peuples. Un mouvement d’opinion mondial est apparu à l’occasion du sommet de Seattle et a réussi à faire échouer les négociations initiées dans le cadre de l’OMC. Ce mouvement d’opinion est relayé et nourri par le développement d’une nouvelle pensée critique qui remet en cause les dogmes idéologiques du néolibéralisme jusque parfois dans les rangs mêmes de celles et ceux qui dans des institutions comme la Banque Mondiale, à l’image d’un Joseph Stieglitz, étaient chargés d’accompagner ce processus initié dans les années 80. Confrontés à son tour à la déconstruction des modèles sociaux issus des compromis fordistes qu’elle avait contribués à mettre en œuvre, la gauche européenne est frappée d’une crise profonde. Soit elle persiste dans le cours politique qu’elle met en œuvre depuis les années 80 et elle risque alors de perdre progressivement sa raison d’être, soit elle décide d’écrire une page nouvelle de son histoire et de redéfinir une perspective progressiste qui passe d’abord par une redéfinition de son rapport critique au capitalisme, au libéralisme, au libre échangisme et à la globalisation financière.

Les socialistes français sont les mieux placés pour impulser ce mouvement. Le Parti Socialiste a toujours refusé de s’aligner idéologiquement sur les errements du social libéralisme refusant en 1999 d’adhérer au manifeste de la Troisième Voie cosigné par Tony Blair et Gherard Schroder. Les socialistes français peuvent compter sur une forte disponibilité politique des classes populaires comme le démontre la participation élevée lors des élections ainsi que le vote clairement ancré à gauche pour le non lors du référendum du 29 mai 2005. Enfin, jusqu’à ce jour les socialistes français ont adopté la stratégie du rassemblement de la gauche leur évitant de dénaturer leur action politique dans des gouvernements de coalition avec la droite comme c’est malheureusement le cas dans d’autres pays européens. Encore faut-il que les socialistes appréhendent correctement les transformations du capitalisme survenues depuis les années 80. Encore faut-il qu’ils aient la volonté de promouvoir une politique publique au service de la croissance et du partage des richesses. Encore faut-il qu’ils entendent réorienter effectivement la construction européenne.

1) Développer une analyse sérieuse du capitalisme financier

Depuis le début des années 80 un processus s’est enclenché qui conduit à l’émergence d’un « nouveau capitalisme » (Dominique Plihon). Ce nouveau capitalisme est la conséquence de la prise de pouvoir du capital financier sur le capital productif. Ce nouveau capitalisme a pu émerger grâce à la libéralisation des marchés financiers décidée par les principaux pays occidentaux qui ont mis à bas les principales barrières régulatrices qui avaient été édictées à la suite du krach boursier de 1929. Ce mouvement de dérégulation est plus connu sous le vocable de la politique des 3D : déréglementation, décloisonnement, désintermédiation. Ce mouvement a conduit à la constitution d’un marché financier mondial globalisé dont la principale caractéristique est d’assurer la liquidité permanente du marché. Cette liquidité crée les conditions du retour de ce que Marx appelait le « capital fictif » ou que Keynes appelait « l’économie de casino », c’est-à-dire le moment où « l’argent thésaurisé acquiert en vertu des mécanismes du marché secondaire des titres et de la liquidité, la propriété miraculeuse de faire des petits » (François Chesnais). Il s’ensuit une instabilité permanente de la finance mondiale caractérisée par la tendance à la constitution et l’éclatement de bulles spéculatives boursières successives.

Ce marché mondial financier globalisé a été constamment alimenté par l’organisation de la titrisation de la dette publique d’une part et par le recours à l’émission d’actions ou d’obligations comme mode principal de financement des entreprises. Une attention particulière doit être portée à ce dernier aspect qui à la fois la conséquence de la réorganisation du marché du crédit et la conséquence des privatisations qui se sont multipliées de part le monde depuis les années 80.

Parallèlement à la constitution de ce marché financier mondial, les gouvernements des principaux pays occidentaux ont mené depuis les années 80 des politiques publiques tournées exclusivement vers la lutte contre l’inflation. Ces politiques avaient pour but de « rassurer » les marchés financiers principaux bailleurs de fonds de la dette publique. La lutte contre l’inflation a été la principale réponse trouvée par les gouvernements afin de restaurer des taux d’intérêts réels avantageux pour les créanciers. Les deux aspects les plus marquants de cette politique anti inflationniste furent la désindexation salariale et l’utilisation de la fonction monétaire au service exclusif de la lutte contre l’inflation. Ce dernier aspect étant caractéristique de la politique monétaire depuis le milieu des années 80.

La libéralisation des échanges commerciaux s’est effectuée parallèlement à celle des marchés financiers. Au nom de l’idéologie du libre-échange les régulations douanières ont été remises en cause et le système construit après-guerre et dit système de Bretton Woods a volé en éclat. Les Etats-Unis ont été les principaux promoteurs de ce mouvement, tout en étant à même quand ils l’estimaient nécessaire de protéger certains segments de leur production. L’Europe a accompagné ce mouvement. Or, le libre-échange et la spécialisation des économies qui vont de pair sont des idéologies qui ont fait faillite et furent déjà justement critiquées en son temps par Marx dans la querelle qui l’opposa à propos de la théorie Ricaldienne des "avantages comparatifs". Cette double libéralisation financière et commerciale a ravagé les économies d’Amérique du Sud et d’Afrique. En Amérique du Sud, à l’exception du Brésil et du Mexique, elle a conduit à la déverticalisation de l’appareil de production industrielle. En Afrique, comme en Amérique du Sud elle a aboutit à une concentration des Investissements Directs Etrangers (IDE) dans un petit nombre de foyers au détriment d’un développement harmonieux du continent. C’est pourquoi aujourd’hui plusieurs pays d’Amérique du Sud tentent de s’unir pour bâtir une banque publique continentale susceptible d’offrir une alternative en matière de financement des investissements productifs. L’Europe est à son tour touchée par ce processus qui conduit à délocaliser toujours plus de pans entiers de la production industrielle en direction de zones où les coûts salariaux sont inférieurs. La pérennité de la base industrielle de l’Europe est posée à terme. Or, sans industrie, il ne saurait y avoir d’économie de services pérenne.

Cette double libéralisation a aboutit à une revanche du capital sur le travail par une déformation à l’avantage du premier dans le partage de la valeur ajoutée. La libéralisation commerciale a permis au capital de s’adosser à une armée de réserve industrielle mondiale, notamment en Chine et demain en Inde où la qualification de la population salariée progresse plus vite que les coûts salariaux. La menace des délocalisations fait peser un chantage global sur les salariés en les contraignant à accepter une dégradation de leurs conditions de travail et de rémunération.

Cette double libéralisation a permis la prise de contrôle du pouvoir des entreprises par les actionnaires. Même si, comme en France, le capital des entreprises est dispersé, le pouvoir de contrôle des actionnaires n’a jamais été aussi fort. Les actionnaires, mêmes minoritaires, ont imposé leur standard de gestion où la maximisation du profit et de sa distribution à ceux-ci sont devenus le but ultime de l’activité de l’entreprise. Il s’agit de la fameuse « création de valeur actionnariale » qui constitue aujourd’hui l’horizon indépassable du capitalisme financiarisé. Les fonds de pension, les fonds d’investissement et les fonds mutuels, qui se sont substitués aux banques encadrées par l’Etat dans le financement de l’économie, jouent désormais un rôle majeur en matière de prescription de normes de gestion. Carrefour en est un bon exemple. Il y a quelques mois Colony Capital et Pinault annoncent leur entrée à hauteur de 10% dans le capital de Carrefour. Récemment le PDG de Carrefour a annoncé un plan de rachat d’actions pour un montant de 4,5 milliards d’euros. 3 milliards par la cotation partielle de la filiale du groupe qui possède le patrimoine immobilier de l’entreprise et 1,5 milliard par un plafonnement de l’investissement et la cession d’actifs dits « non stratégiques ». Les dirigeants des entreprises sont devenus les nouveaux « intendants du domaine » des actionnaires (Jean Peyrelevade) au moyen d’une association à la maximisation de la valeur actionnariale grâce à des mécanismes comme les stocks-options.

Cette évolution du capitalisme conduit à une surconcentration des richesses entre les mains d’une infime minorité, qui forme une « nouvelle aristocratie » (Lionel Jospin). Ainsi, selon l’étude annuelle réalisée par Cap Gemini et Merril Lynch sur les High Net Worth Individuals (HNWI), les individus qui possèdent une fortune personnelle de plus de 30 millions de dollars, constituent en 2006 une population mondiale de 94 070 individus, soit 0,0015% de la population mondiale. Ces « élus » totalisent une fortune cumulée de 37 200 milliards de dollars. A l’autre bout de la chaîne, 1 400 000 000 d’individus, soit 50% du nombre total de travailleurs de la planète gagnent moins de 2 dollars par jour. Il faudrait donc à chacun d’entre eux 380 000 années de travail cumulées sans rien dépenser pour atteindre la fortune moyenne d’un de ces HNWI. De même, à titre d’exemple en France, 1% des français possèdent 50% du patrimoine en actions du pays. Aux Etats-Unis, selon une enquête réalisée par la principale centrale syndicale, l’AFL CIO, l’écart moyen de rémunération entre un ouvrier le Directeur Général d’une entreprise est passé de 1 à 42 en 1980 à 1 à 531 en 2000 et il n’a cessé de progresser depuis. Enfin, pour clore la liste des illustrations, selon Camille Landais, économiste à l’Université Paris I, sur la période 1998-2005, les revenus des 10% de français les plus riches ont progressé de 42,6% quand ceux des 90% de français les moins riches n’ont progressé que de 4,6%

Du point de vue des objectifs que les socialistes assignent à l’économie de marché le double mouvement de libéralisation financière et des échanges commerciaux qui caractérise ce que l’on nomme la mondialisation constitue une régression très importante due à une explosion sans précédent des inégalités.

Mais, la mondialisation est aussi un échec du point de vue des objectifs propre au capitalisme. En effet, le capitalisme financier menace la pérennité même du développement capitaliste de l’économie. Le capitalisme financier est devenu un « capitalisme sans investissements » (Patrick Arthus). Un capitalisme où le règne du court terme et la priorité absolue donnée à la rémunération de l’actionnaire obèrent les perspectives de développement économique à moyen et long terme. Cette tendance est renforcée par la mise en retrait volontaire des Etats dans le financement de l’économie dont le dogme de la concurrence libre et non faussée qui prévaut en Europe offre la plus caricaturale des expressions. Nous sommes aujourd’hui dans une phase du développement du capitalisme où le capital a la prétention de devenir le seul facteur de production à être tendanciellement rémunéré.

Aussi, cantonner le débat à la "flexiscéurité" ou à la recherche d’une meilleure compétitivité des entreprises serait pour les socialistes passer à côté de l’essentiel. La principale question qui se pose aux socialistes est de savoir comment il est possible de sortir l’économie capitaliste de la spirale mortifère de la financiarisation. C’est le même débat que celui qui s’est posé après le krach de 1929 et qui conduisit les démocrates américains, sous la houlette de Roosevelt, à mettre en œuvre une politique d’assèchement de la rente. Attendrons-nous que les événements de 1929 se répètent pour envisager des politiques volontaristes ?

A celles et ceux qui estiment que la situation est différente de celle de 1929 au motif que la FED en aurait tiré les leçons, il est utile de rappeler quelques chiffres. En 2006, la somme totale des actifs financiers en circulation était de 140 000 milliards de dollars, soit prés de trois fois le PIB mondial. Pire encore, la somme totale des instruments dérivés était de 286 000 milliards de dollars. Les profits boursiers n’ont jamais été aussi élevés et l’investissement aussi faible. Mis à part la croissance chinoise aujourd’hui et indienne demain, mais dont les ressorts ne sont pas aussi solides que l’on veut bien l’affirmer eu égard au nombre de créances douteuses qu’il y a en Chine notamment, les principaux relais de croissance de l’économie sont des relais spéculatifs par le biais de fusions-acquisitions. En 2006, le montant cumulé des F-A a atteint dans le monde la somme extravagante de 3 000 milliards de dollars. La plupart de ces F-A sont des anticipations purement spéculatives et sont déterminées uniquement dans le but d’acquérir un « pouvoir de marché » futur, c’est-à-dire une position oligopolistique dans le cadre de la constitution d’un marché mondial. De plus une grande partie des profits réalisés par les entreprises sont gaspillés dans de pharaoniques programmes de rachats de leurs propres actions, ultime avatar pour distribuer encore plus de dividendes aux actionnaires dans cette économie géante de casino. Cette frénésie des F-A est à l’origine d’une constitution sans précédent de survaleurs (goodwill) qui menacent la santé des entreprises et ne font avec les multiplications de rachats d’actions que nourrir des bulles spéculatives.

Panne de l’investissement, explosion des inégalités entre les pays et à l’intérieur des pays, il est plus que temps de promouvoir des politiques publiques de soutien à la croissance et radicalement tournée vers la répartition des richesses.

2) Promouvoir des politiques publiques au service de la croissance et du partage des richesses

Au risque d’apparaître iconoclaste, il est nécessaire d’affirmer que l’Etat doit reprendre directement ou indirectement le contrôle des principaux leviers de l’action économique. D’ailleurs c’est à l’ordre du jour. Les principaux Etats occidentaux réfléchissent à se protéger de l’intrusion massive des fonds dits souverains dans leur tentative de prise de contrôle des secteurs économiques stratégiques, énergie, armement...Ainsi le gouvernement Allemand envisage de modifier sa législation. Dominique de Villepin avait décrété le patriotisme économique. Les Etats-Unis demeurent très vigilants. La question cependant n’est pas d’adopter une approche limitée aux seuls secteurs stratégiques mais de développer des politiques qui nous extraient de la pression de la finance mondialisée. Ceci passe par une remise à plat de notre législation fiscale où la rente et le profit boursier doivent être fortement taxés. De même la modification de la fiscalité doit avoir pour objectif de « libérer » l’investissement. La France a un taux d’épargne trop important qui stérilise l’activité économique. Des modifications législatives substantielles doivent être apportées. La puissance publique doit retrouver une capacité de financement de l’économie et une nouvelle réglementation et un nouvel encadrement du crédit doit être envisagé. Enfin la monnaie doit être conçue comme un instrument au service de la croissance et non plus au service d’une inflation vaincue ce qui passe par une remise à plat des missions de la Banque Centrale Européenne à défaut de quoi dans un moyen terme certains pays seront inévitablement conduits à se poser la question d’abandonner l’euro et de revenir à une monnaie nationale afin de rétablir la compétitivité globale de leur économie. L’Etat doit redevenir un acteur industriel stratégique et la même logique doit être mise en œuvre à l’échelle de l’Europe.

Les salaires sont trop bas et la législation sur les bénéfices doit être revue pour encourager l’investissement et la hausse des salaires. Les bénéfices distribués doivent être fortement taxés et les bénéfices réinvestis plus faiblement taxés. Le système du bénéfice mondial consolidé doit être abandonné.

Pour lutter contre les délocalisations, une discussion doit s’engager avec les firmes de dimension mondiale et des droits de douane élevés doivent être imposés aux firmes qui ne produisent pas en Europe mais qui vendent en Europe. De même le système des quotas d’importation doit être systématisé afin de protéger certains pans de notre industrie européenne et la réciproque doit être acceptée de la part des autres pays.

Afin d’éviter les licenciements boursiers, la distribution des bénéfices doit être encadrée et conditionnée par la loi.

3) Réorienter la construction européenne

Mais, les évolutions nationales doivent être accompagnées d’une réorientation de la construction européenne. L’Europe fait fausse route depuis de nombreuses années et la Stratégie de Lisbonne est une impasse dont il faut sortir. La compétitivité de l’économie européenne ne sera pas assurée par le développement de l’employabilité ou autre artifice néolibéral dont le seul objectif est de transférer le coût de la compétition économique sur les salariés. La convergence sociale par le haut doit être recherchée. Nous avons bien été capables sur 10 ans d’organiser une convergence de nos économies et de nos monnaies pour déboucher sur la monnaie unique, l’euro. Nous devons adopter la même méthode pour la convergence sociale. Des critères de convergence, sur les salaires, les mécanismes de protection sociale doivent et des paliers de convergence doivent être définis dans le temps. Afin de lutter contre le dumping fiscal et social, le budget européen doit considérablement augmenter, au moyen d’un emprunt européen si besoin, pour permettre l’homogénéisation des économies des Etats membres.

Enfin, l’Europe doit promouvoir une autre vision de la « mondialisation ». Le phantasme d’une économie globalisée doit être combattu. Si un tout petit nombre de secteurs, comme l’aéronautique, peuvent justifier la constitution d’un marché mondial, pour la plus grande partie de l’activité économique c’est un non sens. Pourquoi, par exemple, faire fabriquer la quasi-totalité des chaussures de sport destinées au marché européen en dehors de l’Europe ? Il n’y a aucune justification à ce système si ce n’est permettre la maximisation du profit ce qui ne saurait être un objectif économique des socialistes. Sans compter les dégâts écologiques d’une croissance dont le ressort principal serait le développement des échanges entre continents. Quand les marchandises fabriquées en Chine mettent six semaines pour être transportées vers l’Europe par bateau, on mesure l’aberration du système. Sans compter le non sens économique à moyen terme avec un baril de pétrole approchant bientôt les 100 euros. C’est pourquoi les socialistes doivent se battre pour faire franchir un saut supplémentaire de civilisation à l’humanité, celui du passage des économies organisées dans des Etats nations vers des économies organisées dans des zones régionales intégrées assurant un développement harmonieux et équilibré de leurs populations. C’est la seule mesure d’enrayer la globalisation commerciale et financière qui n’est que la guerre économique de tous contre tous et qui prépare dangereusement le choc des civilisations de demain.


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