Législatives en Espagne (revue de presse)

lundi 28 août 2023.
 

1 Législatives en Espagne : « La droite n’avait rien de concret à opposer au gouvernement »

Article de Benjamin Delille

En espagnol, ilusión peut vouloir dire espoir. Et depuis mercredi dernier, et le débat plutôt réussi de Pedro Sánchez et Yolanda Díaz, la gauche ne cessait de répéter qu’elle était pleine d’ilusión quant à une possible remontada pour les élections législatives anticipées de ce dimanche 23 juillet. La possibilité de former un gouvernement relève encore de l’illusion, mais le moins que l’on puisse dire c’est que le Parti socialiste (PSOE) et Sumar ont solidement résisté – avec respectivement 122 et 31 sièges au Parlement.

Le Parti populaire (PP, droite conservatrice), devient, de justesse, la principale force politique avec 136 sièges. Soit loin des 176 sièges requis pour la majorité absolue, même en cas de coalition avec l’extrême droite qui se contente de 33 sièges. Vox en perd 19 par rapport à 2019, tout en s’affirmant paradoxalement comme la troisième force politique du pays. Cela ne change rien à l’affaire selon Pedro Sánchez : « Le bloc rétrograde du Parti populaire et de Vox a été battu », a-t-il déclaré sous les acclamations de ses partisans.

« La capacité de résistance du parti socialiste est une surprise », analyse Benoît Pellistrandi. Cet historien spécialiste de l’Espagne, et auteur du livre les Fractures de l’Espagne, ne voit a priori « aucune équation possible » pour qu’une nouvelle majorité se dessine, et anticipe de nouvelles élections d’ici « six à huit mois ». « On se retrouve dans une situation de confusion et de blocage très forte. C’est surtout une grande déception pour le Parti populaire que tous les sondages donnaient largement vainqueur et qui est à peine aux portes de la majorité absolue. »

Douche froide

On aurait pu croire le contraire en début de soirée face aux mines ravies des jeunes militants du PP, réunis dès 20h30 devant le siège de la rue de Génova à Madrid. Alors que le dépouillement commençait, ce sont eux qui se disaient pleins d’ilusión. Ils s’appellent Ismael, Francisco, Adrian ou Alberto, ont à peine 20 ans mais sont habillés comme s’ils en avaient le double. Chemises impeccables, blanches ou à rayures, c’est au choix. Ceux qui ne portent pas de mocassins ont des baskets d’une blancheur immaculée. « Quoi qu’il se passe dans les heures qui viennent, c’est une victoire pour Feijóo [le président du PP, ndlr], et surtout pour l’Espagne », veut croire Haizea, la seule fille du groupe, déjà rompue aux tournures de phrases bien policées.

Tous munis de drapeaux espagnols tout neufs, ils attendent l’annonce officielle pour les brandir dans tous les sens. Les jeunes, qui trépignent dans leurs pantalons repassés, ne sont pas disposés à accepter autre chose qu’une soirée de célébration. Mais plus le dépouillement avance, plus l’incertitude s’impose. La rue face au siège se remplit doucement. Un « hourra » est lâché lorsque le PP dépasse pour la première fois le PSOE en nombre de députés. Mais la progression de la droite n’est pas aussi rapide qu’espérée. Les visages se tendent. Les yeux sont rivés sur les téléphones. Les militants essaient de se convaincre que la victoire est proche en chantant les slogans de la campagne. Pour Feijóo, contre le parti socialiste, mais aussi et surtout pour la très populaire présidente de la communauté de Madrid, Isabel Díaz Ayuso.

2) La remontada de Sánchez, victoire de la droite sans majorité..

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Le leader du grand parti de la droite espagnole, Alberto Núñez Feijóo, qui considérait la victoire acquise, est tombé de haut dimanche, remportant sur le papier les élections législatives, mais sans la majorité nécessaire pour être élu Premier ministre. Les sondages réalisés au cours des cinq derniers jours prédisaient tous une large victoire du PP et même la possibilité d’une majorité absolue avec l’appui de Vox.

Cependant, après dépouillement de plus de 99 % des suffrages dimanche soir, le Parti Populaire (PP) totalisait 136 sièges sur un total de 350 au congrès des députés et le parti d’extrême droite Vox, son seul allié potentiel, 33 sièges. Soit un total de 169 sièges, alors que la majorité absolue est fixée à 176.

Le Parti socialiste de M. Sánchez est, lui, crédité de seulement 122 députés et Sumar, son allié de gauche radicale, de 31. Mais M. Sánchez, au pouvoir depuis cinq ans, se trouve paradoxalement dans une meilleure position que son rival conservateur et peut espérer se maintenir au pouvoir, car il a la possibilité d’obtenir le soutien des partis basques et catalans, pour qui Vox est un épouvantail.

La remontada de Pedro Sánchez, « survivant » politique aussi habile que tenace

« Le bloc rétrograde du Parti populaire (NDLR : premier parti de droite) et de Vox (NDLR : parti d’extrême-droite) a été battu », a lancé Pedro Sánchez, chef de file du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), devant des militants socialistes enthousiastes réunis devant le siège du Parti socialiste dans le centre de Madrid. « J’ai appris à donner le maximum jusqu’à ce que l’arbitre siffle la fin de la rencontre », assurait en 2019, cet ancien basketteur amateur, dans une autobiographie intitulée « Manual de resistencia » (« Manuel de résistance »).

Les élections législatives de dimanche, qu’il avait convoquées à la surprise générale après la débâcle de la gauche aux élections locales du 28 mai, ont à nouveau illustré sa capacité de résistance face à l’adversité. Donné largement battu, selon l’ensemble des enquêtes d’opinion, Pedro Sánchez a réussi à n’être distancé que de justesse. Et surtout, il garde des chances de se maintenir au pouvoir grâce à l’appui de la gauche radicale et des partis basques et catalans, la droite et l’extrême droite n’ayant pas à eux deux la majorité absolue.

Alberto Núñez Feijóo, le revers d’une stratégie ambiguë ?

M. Feijóo, 61 ans, que tous les sondages donnaient largement gagnant, a probablement payé sa stratégie ambiguë vis-à-vis de l’extrême-droite, mais aussi une série de gaffes qui ont émaillé la fin de sa campagne. Le leader du PP, qui, durant la campagne, a souvent donné l’impression d’être un peu trop sûr de lui, a aussi accumulé les erreurs lors d’une dernière semaine de campagne cauchemardesque, alors qu’il surfait auparavant sur les sondages.

Il a d’abord trébuché lundi dernier lors d’une interview télévisée sur l’une des questions les plus sensibles pour un politicien, celle des retraites, en soutenant que le PP, lorsque ce parti était au pouvoir, avait toujours augmenté celles-ci d’un pourcentage égal à l’inflation. Ce qui s’est avéré faux. Il a ensuite décidé de boycotter, deux jours plus tard, le dernier débat télévisé entre les principaux candidats, laissant le terrain à M. Sánchez et à son alliée communiste Yolanda Díaz, qui en ont profité pour livrer un assaut en règle contre lui sans qu’il puisse évidemment se défendre.

Il a enfin dû faire face à la réapparition des accusations et des interrogations concernant ses liens étroits dans les années 90 avec un trafiquant de drogue notoire.

Taux de participation de 70 %

La participation a atteint près de 70 %, soit 3,5 points de plus que lors du dernier scrutin, en novembre de 2019.


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