"Les jaunes à la Kouchner ne laisseront pas de traces importantes, la gauche s’en remettra" (Gérard Filoche)

dimanche 21 octobre 2007.
 

Renée : la question n’est-elle pas plutôt de savoir si ces gens qui ont accepté de collaborer avec la droite, ne sont tout simplement pas des gens de droite ou du moins des gens qui sont passés à droite ?

Gérard Filoche : Ce sont des gens qui étaient de gauche formellement, et qui ont effectivement franchi un fossé. Pour aller rejoindre ceux qui sont au gouvernement, c’est-à-dire l’état major qui mène une guerre sociale contre une immense majorité des salariés et des pauvres de ce pays. Sarkozy le dit lui même, il veut remettre en cause ce qu’est la France depuis soixante ans. Et Denis Kessler, un ponte du Medef, le confirme en expliquant qu’il s’agit de détruire tout ce qu’a fait le Conseil national de la résistance, en 1945.

Sekwazprod : l’ouverture se fait sur les idées, ensuite sur les personnes. Quelles sont les idées fortes des ministres venant de la gauche ?

Aucune. L’ouverture c’est du débauchage d’un côté, de la trahison de l’autre. On a entendu aucune idée de la part de ceux qui ont changé de camp, sauf de l’un d’entre eux : Kouchner et c’est sur la guerre. Celui-là est un belliciste. Il cherche noise à la Chine au Darfour. Il décide tout seul qu’il faut changer le Président en Irak. Il augmente les troupes en Afghanistan et il est pour étendre la guerre de Bush au Moyen Orient. Celui-là, c’est l’ouverture à la guerre mondiale, Sarkozy l’a bien choisi.

Sekwazprod : pour ma part, je pense qu’il n’y a aucune idée forte mais plutôt "complaisance", "carrière personnelle", êtes-vous d’accord avec cela ?

Oui, parce que quand j’étudie au cas par cas, vu qu’il n’y a pas d’idées, il faut bien chercher l’explication pour beaucoup derrière la corruption et le clinquant du pouvoir.

Sekwazprod : par ailleurs, ne pensez-vous pas que les municipales, quoi qu’on en dise, vont être cruciales ?

Oui, elles seront très importantes, si on réussit à cette occasion à déstabiliser l’actuel omniprésident. Ce sera une élection très politique, et c’est pour cela que la gauche doit y mettre toutes ses forces en s’unissant partout où que ce sera possible, dès le premier tour. Ce n’est pas le moment de faire des concurrences à gauche où de se "compter" pour des questions subalternes. C’est le moment de reconstruire au maximum une gauche unie, qui nous a fait tant défaut, lors des élections passées.

Comaloga : pour moi les ministres qui sont passés chez Sarkozy renient non seulement leurs convictions, mais celles des gens authentiquement de gauche et les combats passés...

La gauche s’en remettra. Ces "jaunes", ne laisseront pas de traces importantes. Mais vous avez raison il faut des idées fortes, si François Hollande avait choisi le non, en 2004 et 2005, il serait sûrement Président de la République, à l’heure qu’il est. Ce fut un mauvais choix, qui a divisé la gauche. Encore aujourd’hui, le mini traité de Sarkozy, tente de faire repasser en contrebande le même TCE. Il faut s’y opposer aujourd’hui, comme hier. Il faut demander un référendum pour ne pas que l’opinion des français soit volée. Il faut dire “non” pour que l’Europe soit sociale, et non pas libérale. Le libéralisme aujourd’hui mène une guerre terrible pour augmenter les profits, réduire les salaires, les protections sociales. Il faut une gauche qui soit aussi fidèle aux travailleurs, que la droite est fidèle au patronat.

Nini : ne pensez-vous pas que cette "ouverture" à gauche va bientôt prendre fin ? et que tous ces ministres vont être "renvoyés" dès le prochain remaniement ?

Probablement. Ils se comportent comme des valets séduits par l’omniprésident, l’omniprésident les traitera comme tels.

Pascal : je suis peut-être hors sujet, mais que pensez-vous du mouvement de grève qui bloque en ce moment les transports, pour le maintien des régimes spéciaux ?

Il est vital. Il n’y a pas de régimes spéciaux, ce sont des régimes normaux. Le problème ce n’est pas de les supprimer, mais de les étendre. Il y a d’autres professions qui ont des pénibilités physiques et mentales, le bâtiment par exemple. Quand je vois un vieil ouvrier de 55 ans, derrière son marteau piqueur, je me dis qu’il devrait être en retraite. Je considère qu’il faudrait un régime spécial pour le bâtiment, c’est 1,1 million de salariés, plutôt que de chercher injustement à supprimer le régime spécial de 18 000 conducteurs de train. Le pouvoir actuel fait semblant de déshabiller Lucien le cheminot, pour habiller Paulette la commerçante, mais le fond de sa politique c’est de faire que les retraites de Lucien et de Paulette baissent dans les deux décennies qui viennent.

Gérard Filoche, inspecteur du travail à Paris, animateur du courant gauche socialiste au PS, a répondu aux questions des Libénautes.


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