Ce mercredi 10 novembre 2021, à cinq mois de l’échéance présidentielle, Adrien Quatennens et Ugo Bernalicis, députés insoumis du Nord, ont reçu à Lille la présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, et le député de Seine-Saint-Denis, Alexis Corbière, pour un meeting à la salle du Gymnase. Fait inédit : un meeting présidentiel…. sans le candidat, qui a pourtant rassemblé plus de 500 personnes. Une véritable démonstration de force des insoumis. Nouvelle confirmation de l’un des plus précieux atout de Jean-Luc Mélenchon : avoir réussi à constituer autour de lui une équipe solide, jeune et prête à gouverner. Sécurité et justice, démocratie et 6ème République, planification écologique et écologie populaire, partage des richesses et plein-emploi, pendant plus de 2 heures, le quatuor insoumis a impressionné. Notre article.

Deux salles, deux ambiances

Lille, mercredi 10 novembre 2021. Deux salles, deux ambiances. À quelques encablures du meeting des insoumis, un certain Christophe Castaner, en campagne pour la majorité présidentielle : quelques petites dizaines de personnes. Salle du Gymnase, dès 19h, une demie heure avant le début du meeting, les insoumis se pressent pour décrocher les dernières places. 19h15, la salle de 500 places est pleine à craquer.

19h30 et des poussières, le meeting débute. C’est l’un des deux députés du Nord qui ouvre le bal, Ugo Bernalicis. Le spécialiste chez les insoumis des questions de justice et de sécurité ne mâche pas ses mots et lance une première charge contre le « climat médiatique fascisant », en rappelant un fait : « ils vous parlent constamment des faits divers, de la délinquance, pourtant les chiffres de la délinquance sont… en baisse ! ». On imagine les chaînes d’information en continu et leurs éditorialistes s’évanouir.

L’appel d’Ugo Bernalicis au respect des droits et de la dignité humaine des exilés à Calais

Le commissaire aux lois de poursuivre sa charge contre le climat politique nauséabond : « Pécresse, Bertrand, Zemmour : ces gens-là vous proposent de déchirer la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ! » et d’enchaîner : « il faut que cette police aux frontières arrête de massacrer les exilés notamment à Calais, c’est insupportable. Il faut un accueil digne pour tous les exilés dans ce pays. On ne discute pas avec la dignité humaine ».

Un rappel salutaire alors que depuis 33 jours deux militants associatifs, Anaïs Vogel et Ludovic Holbein, sont en grève de la faim pour exiger enfin le respect de la dignité et des droits des personnes exilés. La veille dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, un autre membre du quatuor présent sur scène ce mercredi soir, avait déjà interpellé le gouvernement sur le sujet. Adrien Quatennens s’était déjà rendu au début du mois à Calais en soutien à cette grève de la faim.

Face à la crise démocratique que traverse le pays, le plaidoyer d’Alexis Corbière pour la 6ème République

« Après moi ce sera encore-bière (en-Corbière) ». Un calembour pour finir, et Ugo Bernalicis de laisser la place à Alexis Corbière. Le député de Seine-Saint-Denis hausse le ton dès les premières secondes de son intervention : « Ce soir nous écrivons les pages de l’Histoire de France. Ce sont vous, femmes et hommes, qui écrivez l’Histoire, ne l’oubliez jamais. Je porte en cette veille du 11 novembre un bleuet en mémoire aux victimes de la première guerre mondiale, alors que certains rêvent de nous précipiter à nouveau vers la guerre. Ils ont assassiné Jaurès, ne l’oublions jamais ».

Le professeur d’Histoire, auteur de l’ouvrage Jacobins ! Les inventeurs de la République, de souligner le cancer démocratique d’un pays où 70% des électeurs ne sont pas déplacés lors de la dernière échéance électorale : « nous avons aujourd’hui un gouvernement minoritaire. La clé est de pouvoir refonder avec l’expression de la souveraineté populaire ». Comment parvenir à ce défi démocratique ? « L’Assemblée Constituante est la seule solution : que le peuple rédige et adopte une nouvelle constitution ».

Alexis Corbière rappelle alors qu’à quatre reprises dans son Histoire, le peuple de France a convoqué une Assemblée Constituante : en 1789, en 1848, en 1945 et en 1946. Et enfonce le clou : « convoquons une cinquième Assemblée Constituante, pour continuer à écrire notre Histoire et à dérouler le fil rouge lancé lors de la grande Révolution française ! C’est le sens de la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Le peuple en a tellement besoin ! ». Une solution à la crise démocratique qui gangrène le pays qui porte un nom : la 6ème République.

Charge de Mathilde Panot contre le bilan écologique du quinquennat Macron, et éloge de l’écologie populaire

Vient le tour de Mathilde Panot. La plus jeune présidente de groupe parlementaire de l’Histoire de l’Assemblée nationale, se lance dans une charge au vitriol contre Emmanuel Macron. Traités de libre échange signés, revirement sur le glyphosate, les néonicotinoïdes, la suppression massive de postes au ministère de l’écologie, le tapis rouge déroulé à Total et Amazon, l’enterrement des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat, la répression des militants écologistes, les 2 condamnations de ce gouvernement pour inaction climatique : la présidente des insoumis démolit le bilan écologique du quinquennat.

La jeune députée du Val de Marne alerte sur les catastrophes climatiques non pas devant nous, mais déjà sous nos yeux. Mathilde Panot prend l’exemple de la situation à Madagascar : « la première famine directement liée au dérèglement climatique dans l’Histoire. 1,3 million de personnes qui souffrent de malnutrition sévère. Des enfants qui mâchent des lanières de cuirs ».

À l’encontre de l’écologie libérale, la présidente du groupe LFI souligne la rupture du projet écologique que défendent depuis de longues années les insoumis : « Nous assumons que l’écologie populaire que nous portons est une rupture nette avec le capitalisme. Un système où 500 familles doublent leur fortune quand 4 millions de Français basculent dans la pauvreté. L’écologie populaire c’est cibler le capital ». À l’heure où 100 multinationales sont à l’origine de 70% des émissions de gaz à effet de serre, le capital détruit la planète donc, et le travail.

« Oui, nous allons porter la question sociale dans cette présidentielle », Adrien Quatennens

La transition est toute trouvée, Adrien Quatennens, le coordinateur du mouvement insoumis, monte sur scène et annonce la couleur : « oui nous allons porter la question sociale dans cette présidentielle. Depuis le début du quinquennat, nous avons raison : Emmanuel Macron est le président des riches. Le pouvoir d’achat a bien augmenté dans ce pays comme l’affirme ce gouvernement : pour les 500 familles les plus riches de ce pays qui se sont gavées dans un océan de misère ».

Le député insoumis, qui dénonce les inégalités sociales et prône le partage des richesses depuis le début du quinquennat, rappelle un chiffre : « Bernard Arnault gagne en 6 secondes ce qu’un travailleur gagne en moyenne en une année de labeur ». 6 secondes, un an. Adrien Quatennens rappelle la proposition des insoumis de porter le SMIC à 1400 euros net, proposition plébiscitée par plus de 80% des Français.

Le coordinateur de La France insoumise s’attaque ensuite au discours prononcé par Emmanuel Macron la veille, et notamment contre deux réforme, la sanglante réforme de l’assurance chômage à l’œuvre, et la réforme des retraites annoncée en cas de second quinquennat Macron. « Il y a plus d’inscrit à pole emploi aujourd’hui qu’en 2017. Hier, Macron a rayé de la carte 3 millions de chômeurs (les catégories B et C, NDLR) . Celles et ceux qui vont le plus subir la réforme de l’assurance chômage, sont déjà les plus précaires d’entre nous ».

Puis d’enjoindre les insoumis à ne pas baisser la tête face à ceux qui martèlent que comme nous vivons plus longtemps, nous devons travailler plus longtemps, mais de mener fièrement la bataille culturelle. Adrien Quatennens : « puisqu’on vit plus longtemps il faudrait travailler plus longtemps : mais si on vit plus longtemps, c’est justement car on travaille moins longtemps. Il y a 13 années d’écart d’espérance de vie entre les 5% les plus riches et les 5% les plus pauvres ».

« À 5 mois de l’élection présidentielle, aucune force politique n’est capable sans son candidat de réaliser un tel tour de force »

Le député du Nord, fier de ses troupes venues en nombre, électrise la salle : « à 5 mois de l’élection présidentielle, aucune force politique n’est capable sans son candidat de réaliser un tel tour de force ». Et d’appeler les troupes insoumises à sillonner le pays : « votre tâche avec nous est de rallumer la flamme, réchauffer les cœurs. La force ira comme toujours à la force. Mélenchon est passé de 11 à 19% en 4 petites semaines en 2017. Plus la participation va progresser, plus nos chances vont augmenter ».

Et de conclure en mentionnant le grand absent de la soirée. « À nous de convaincre porte après porte, ami après ami, repas de famille après repas de famille. Il y a 10 ans tout juste, j’assistais à mon 1er meeting, d’un certain Jean-Luc Mélenchon. Il avait cité un poème de Paul Eluard :

Les hommes sont faits pour s’entendre

Pour se comprendre pour s’aimer

Ont des enfants qui deviendront pères des hommes

Ont des enfants sans feu ni lieu

Qui réinventeront les hommes

Et la nature et leur patrie

Celle de tous les hommes

Celle de tous les temps ».

Par Pierre Joigneaux.