Afghanistan. La peur tombe sur Kaboul, livrée aux talibans

lundi 23 août 2021.
 

Les talibans sont entrés dimanche matin dans la ville. Les habitants de Kaboul ne savent pas ce qui va leur arriver.

Zeinab est en pleurs. Des pleurs qui ne s’arrêtent pas. Il y a dix jours, alors que les rues de Kaboul étaient encore pleines de monde, elle nous confiait son appréhension face à une arrivée possible des talibans. «  Il n’y a rien de pire. S’ils entrent dans Kaboul, ils me lapideront parce que je ne suis pas mariée et que je ne suis pas vierge. Vous imaginez ce que cela signifie pour eux  ?  » Pour elle, le cauchemar est devenu réalité.

Si la horde fondamentaliste n’a pas totalement déferlé sur la capitale afghane et se tient encore en périphérie, des groupes ont néanmoins été aperçus, notamment dans le quartier de Pol-e-Surkh, où se trouvent les lieux branchés que fréquentait jusque-là la jeune femme, et celui de Dasht-e-Barchi, à l’ouest, où vit principalement la communauté hazara, de confession chiite.

Ce n’est sans doute pas un hasard, alors que débute la fête de l’Achoura et que les rues sont pavoisées des portraits de Hussein, figure du chiisme. «  L’Émirat islamique ordonne à toutes ses forces d’attendre aux portes de Kaboul  », avait d’abord annoncé sur Twitter Zabihullah Mujahid, un porte-parole des talibans. Puis il a précisé qu’elles étaient autorisées à pénétrer dans les zones de la capitale abandonnées par l’armée afghane pour y maintenir l’ordre.

Avancée fulgurante

Zeinab n’en revient toujours pas de cette avancée fulgurante des talibans. «  Je suis perdue  », crie-t-elle lorsque nous la joignons par téléphone. «  Je ne sais pas ce qui va se passer. Mon avenir est complètement ruiné.  » Depuis le matin, les Kabouliotes vaquaient à leurs occupations. Jusqu’à ce que vers 10 heures, la nouvelle ne se répande comme une traînée de poudre  : «  Ils sont là.  » Immédiatement, ça a été la ruée. Les avenues se sont soudainement engorgées de milliers de voitures.

Sur les trottoirs, les passants avaient du mal à avancer tant la cohue était importante. Tout le monde rentrait chez soi, anxieux. Comme Zeinab, qui s’est précipitée dans son appartement. «  Tout est en désordre, il faut que je cache ou que je détruise tous les posters que j’ai sur mes murs où l’on voit des garçons et des filles s’embrasser  », raconte-t-elle entre deux sanglots, persuadée que les fondamentalistes vont venir défoncer sa porte.

La réalisatrice et directrice de l’Institut du film afghan, qui avait posé pour la couverture de l’Humanité à moitié recouverte d’une burqa, Sahraa Karimi, pourtant si forte, est bouleversée. «  Il n’y aura plus de films en Afghanistan.

Pierre Barbancey


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