Pandémie : Le Covid long frappe 60% des patients qui sortent de l’hôpital selon l’Inserm

vendredi 14 mai 2021.
 

Le Covid long, cette maladie encore mal connue, serait aussi très sous-estimé dans la population. Une étude de l’Inserm met en lumière son ampleur dans l’Hexagone.

Alors qu’en France, les chiffres du coronavirus affichent enfin un net reflux à quelques jours des premières mesures de déconfinement, une étude de l’INSERM met en lumière l’ampleur du problème du Covid long, cette maladie touchant les personnes guéries du coronavirus, mais qui continuent de traîner des mois durant un ou plusieurs symptômes parfois très handicapants.

Dénommée French Covid et menée depuis janvier 2020, l’étude publiée dans le journal Clinical Microbiology and Infection suit le cas de 4310 patients atteints de cas de Covid nécessitant une hospitalisation. Ces patients ont ensuite été examinés dans les mois suivant leur guérison, alors qu’en temps normal la convalescence permet de retrouver l’intégralité de ses facultés (odorat, goût...) et de son énergie.

Mais ces contrôles ont permis de mettre avec précision le doigt sur une réalité longtemps sous-estimée : de nombreux malades continuent de souffrir d’un ou de plusieurs problèmes liés au Covid, longtemps après leur guérison. D’après l’étude française, 60% des patients hospitalisés ressentent toujours au bout de six mois l’un des principaux symptômes de la maladie : fatigue, essoufflement, douleur des articulations ou des muscles. Pour 25% des personnes suivies, la situation est encore pire, avec au moins trois symptômes encore présents.

Rapportés au nombre total des hospitalisations pour Covid, ces chiffres ont de quoi donner le tournis. Depuis mars 2020, 452.000 patients atteints du Covid ont été hospitalisés : cela signifierait que plus de 270.000 personnes souffriraient d’un Covid long... sans prendre en compte les malades qui ne sont pas passés par la case hôpital.

Plus d’un million de personnes en Grande-Bretagne

Le chiffre est élevé, mais il rappelle les estimations faites ailleurs sur la base de sondages ou d’études de cohorte. Au Royaume-Uni, un questionnaire en ligne a montré que plus d’un million de personnes disent souffrir, plus de trois mois après leur guérison, d’un ou plusieurs symptômes du Covid ! Le constat, s’il n’est donc pas nouveau sur le fond, permet de rendre compte de l’importance de la question des traitements du Covid long, qui restent cantonnés aujourd’hui aux soins des symptômes, et non de la maladie elle-même.

L’origine du Covid long reste sujette à de nombreuses interrogations, plusieurs théories se faisant face pour expliquer cet état qui perdure : le Covid long pourrait être entraîné par une inflammation à bas niveau du cerveau (d’après une étude britannique parue en février), ou encore une réaction auto-immune de notre organisme, dont les anticorps s’attaqueraient aux cellules de notre cerveau, comme en fait l’hypothèse cet article de la revue Nature.

Mais notre matière grise n’est pas la seule mise en cause. Une étude parue dans le Clinical Medicine Journal y voit plutôt un problème du système nerveux qui ferait notamment baisser la pression du sang ; pour d’autres, la responsable serait une molécule présente dans nos cellules, le nicotinamide adénine dinucléotide, dont le dysfonctionnement entraînerait toute une série de symptômes.

Ces hypothèses restent encore à confirmer, mais l’étude apporte une donnée supplémentaire à la compréhension du Covid long. Il semble que les personnes ayant souffert des formes les plus graves de la maladie soient proportionnellement plus touchées que les autres, les malades passés par les services de réanimation faisant état plus fréquemment d’un Covid long. Un constat en ligne avec les études internationales parues ces derniers mois, comme cette étude de cohorte de janvier 2021 sur les patients d’un hôpital de Wuhan.

Un besoin de reconnaissance

D’autres données confirment la carte d’identité du Covid long, ce dernier semblant affecter plus fréquemment les femmes que les hommes. Là encore, le constat de l’Inserm recoupe les recherches menées à l’étranger. Ces données restent néanmoins insuffisantes, et le suivi des participants à l’étude French Covid va continuer jusqu’à 18 mois après l’infection.

En mettant en avant la proportion importante de malades atteints de symptômes de Covid long, l’étude française met un peu plus la pression sur les autorités sanitaires, pointées du doigt par les associations de malades qui estiment que les structures d’accueil ne sont pas en place.

Il y a certes eu des progrès en 2021 : le 17 février, l’Assemblée nationale a adopté une résolution reconnaissant les personnes souffrant des symptômes prolongés du Covid-19. Un acte fort, bien que symbolique. De son côté, la Haute autorité de santé a publié un document destiné aux professionnels de santé confronté à des malades atteints de Covid long.

Mais ce que réclament les associations va beaucoup plus loin, avec la création de centres pluridisciplinaires dans les hôpitaux , ainsi que l’obtention du statut d’affection longue durée (ALD) pour les malades. Cela permettrait une prise en charge à 100% des soins par l’Assurance-maladie, pour des malades qui ont parfois dû cesser toute activité professionnelle. L’étude de l’Inserm met d’ailleurs le doigt sur le handicap causé par le Covid long : un tiers des personnes ayant encore des symptômes après 6 mois n’est pas retourné travailler.

Matthieu Balu


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