L’exigence démocratique ( par Claude DEBONS)

vendredi 31 août 2007.
 

Restaurer la souveraineté populaire, étendre le champ de la démocratie, pour une République sociale au service de l’intérêt général et du progrès social.

Le libéralisme économique, c’est la négation de la souveraineté populaire et du progrès social. Les idéologues néo-libéraux prétendent qu’il n’y a qu’une seule politique possible, celle qui répond aux exigences des marchés financiers et des multinationales ! C’est cette politique qu’ils ont voulu graver dans le marbre d’un Traité Constitutionnel Européen. Selon eux, les choix économiques devraient désormais échapper à la volonté politique. D’où ces discours sur la « bonne gouvernance » qui tient à distance les citoyens jugés inaptes à comprendre la complexité du monde. D’où la multiplication de ces structures technocratiques et comités d’experts prétendument indépendants qui échappent au contrôle des électeurs.

Les souhaits des actionnaires seraient devenus plus légitimes que la volonté des citoyens ! Ces derniers sont sommés d’accepter des politiques de régression des protections sociales, de démantèlement des services publics, de recul des droits civils et politiques. Les droits collectifs et les règles qui protègent sont présentés comme autant d’obstacles au libre fonctionnement du marché. Et tant pis si la mise en concurrence généralisée dans le cadre de la mondialisation capitaliste se fait à coup de dumping social, fiscal et environnemental !

On connaît les conséquences de ce néo-libéralisme économique qui sévit depuis plus de vingt ans : chômage de masse permanent, précarité accrue, pouvoir d’achat en berne pour le plus grand nombre, recul des solidarités, creusement des inégalités, dégâts écologiques. Et cela au moment où notre pays n’aura jamais produit autant de richesses ! En 2006, les entreprises du CAC40 auront réalisé 100 milliards d’euros de profits ! Et le patron naufrageur d’EADS se voit octroyer 8,4 millions d’euros d’indemnisation pour solde d’incompétence et d’irresponsabilité !

Il est grand temps que la volonté populaire reprenne la main pour mettre l’économie au service des besoins humains, pour imposer un partage des richesses favorable au progrès social, pour faire prévaloir l’intérêt général et le bien commun, pour maîtriser les enjeux écologiques, pour placer l’ambition révolutionnaire d’égalité et de solidarité au centre de son action. Face aux choix dictés par une minorité qui détient tous les leviers de commande, il faut replacer la souveraineté populaire au centre de notre projet de transformation sociale.

Nous voulons élargir le champ de la démocratie dans tous les domaines pour redonner aux citoyens la maîtrise de leur avenir. Cela passe par l’abrogation des lois liberticides et de régression sociale mises en place ces dernières années et par la conquête de nouveaux droits d’intervention des citoyens dans tous les domaines.

Démocratie politique

La monarchie républicaine de la 5° République est à bout de souffle. La concentration d’immenses pouvoirs entre les mains d’un seul homme, un gouvernement aux ordres du monarque, un Parlement godillot, c’est toute la substance de la délibération collective et de la démocratie qui s’est appauvrie, creusant toujours plus le fossé entre les citoyens et la classe politique. La crise de la représentation politique n’est pas soluble dans le cadre des institutions actuelles car leur fonctionnement ne permet pas à la souveraineté populaire de trancher les questions fondamentales. Une nouvelle architecture institutionnelle est à bâtir : une 6° République, démocratique et sociale, représentative et participative, laïque et émancipatrice.

- Une République fondée sur les droits fondamentaux et la souveraineté populaire : une nouvelle déclaration des droits réaffirmera les libertés fondamentales et les droits sociaux fondamentaux du Préambule de la Constitution de 1946, affirmera de nouveaux droits, insistera sur leur effectivité réelle nécessitant un engagement de l’Etat pour les mettre en œuvre et assurer leur garantie pour tous ; une Charte de la laïcité la complètera pour réaffirmer les principes républicains.

- Une meilleure représentation des citoyen/ne/s sera assurée par l’élargissement du droit de vote et d’éligibilité à ceux qui résident en France, par l’instauration de la proportionnelle, par la parité hommes/femmes, par le non cumul et la limitation du renouvellement des mandats, par un statut de l’élu facilitant l’implication dans la vie publique, par le rétablissement du scrutin national pour les élections européennes.

- De nouveaux moyens d’intervention citoyenne et de démocratie participative seront instaurés avec le droit d’initiative et le référendum d’initiative populaire, des conseils de délibération et de proposition dans les quartiers et les circonscriptions, l’extension du principe du budget participatif.

- Une refonte des institutions renforcera les prérogatives du législateur face à l’exécutif :

. suppression de l’élection au suffrage universel du Président de la République et réduction de ses pouvoirs à l’image des autres démocraties européennes,

. responsabilité des pouvoirs exécutifs assumée, avec son gouvernement, par le Premier Ministre,

. institution de l’Assemblée nationale en assemblée législative unique et modification de son fonctionnement : maîtrise de son ordre du jour, plénitude de sa fonction y compris en matière budgétaire, contrôle de l’exécutif, évaluation des politiques publiques, suppression des procédures type 49-3 et vote bloqué...

. suppression du Sénat actuel et remplacement par une nouvelle assemblée consultative, une chambre sociale ou Conseil économique et social modifié, pouvant examiner pour avis motivés les projets de loi soumis à l’Assemblée nationale et les initiatives émanant des collectivités territoriales et des citoyens.

- La décentralisation sera refondée et obéira à l’exigence d’égalité républicaine : redéfinition des missions relevant des différents niveaux territoriaux entre l’échelon national et les collectivités dans le respect des principes d’égalité, de service public, de péréquation fiscale et de transparence des procédures de décision.

- Le droit à l’information sera garanti par une loi anti-concentration, un pôle public de l’information refondé et démocratisé, le débat contradictoire et la présentation pluraliste de l’information, le soutien aux réseaux alternatifs de création et de diffusion, une transformation du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

Démocratie économique

Le capitalisme libéral, c’est la recherche du profit maximum pour quelques-uns, à n’importe quel prix pour le plus grand nombre. Les marchés financiers et les multinationales dictent leur loi au détriment de l’intérêt général. La démocratie n’a pas droit de cité dans l’ordre économique. Il faut redonner à la souveraineté populaire les moyens d’intervenir dans les grands choix économiques. La volonté du peuple doit prévaloir sur les appétits des financiers et des marchands.

- Un nouveau partage des richesses sera instauré par l’augmentation du SMIC, des salaires et des minima sociaux, par le relèvement des cotisations sociales des entreprises et de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, par une fiscalité plus forte sur les grandes fortunes et sur les profits non réinvestis.

- Un renouveau des services publics sera assuré par leur exclusion du champ de la concurrence, par le retour à la propriété publique de ceux qui ont été privatisés, par leur démocratisation, par leur extension pour permettre l’accès aux biens fondamentaux pour tous les citoyens dans les zones rurales comme dans les quartiers populaires : poste, télécommunications, transport, énergie, éducation, santé, logement, crèches, maisons de retraite...

- Une nouvelle appropriation sociale sera établie dans des secteurs clés de l’économie au service de l’intérêt général et du bien commun : création d’un pôle public de l’énergie EDF/GDF, nationalisation de Total, propriété publique de tout le secteur de l’énergie nucléaire.

- Un grand pôle financier public permettra une politique du crédit à taux d’intérêts attractifs pour encourager les activités socialement utiles, écologiquement responsables, répondant à l’intérêt général ; et pour soutenir les petites entreprises innovantes ou créatrices d’emplois.

- Un développement de l’économie sociale et solidaire apportera une contribution à la satisfaction des besoins sociaux et environnementaux selon des critères de solidarité.

- Une planification démocratique prospective permettra d’anticiper les besoins nouveaux et les innovations technologiques, d’orienter les choix stratégiques en fonction de visions de moyen et long termes.

Démocratie sociale

Les exigences de rentabilité financière imposent des contraintes toujours plus lourdes aux salariés dans les entreprises. La dictature du profit s’exerce sans partage à coup de licenciements ou de délocalisations, au détriment du pouvoir d’achat et de l’emploi. Les actionnaires, les marchés financiers, les multinationales, dictent leur loi au mépris des intérêts des travailleurs. La démocratie s’arrête aux portes des entreprises. Il faut donner aux salariés de nouveaux droits d’intervention sur la gestion des entreprises pour combattre l’arbitraire patronal et faire prévaloir d’autres logiques.

- Un nouveau statut du salariat fera du CDI la norme et instaurera une sécurité sociale professionnelle (maintien des droits attachés au contrat de travail, financement sur les profits des entreprises, accompagnement en formation/qualification par le service public de l’emploi).

- Un droit de veto suspensif des institutions du personnel sur les licenciements et les délocalisations permettra l’examen des propositions alternatives ; la reprise par les salariés des entreprises délocalisées ou leur appropriation publique en lien avec le pôle public financier sera facilitée ; les licenciements et les délocalisations dans les entreprises qui font des profits seront interdit par les pouvoirs publics.

- De nouveaux droits pour les comités d’entreprise et les organisations syndicales permettront d’intervenir sur les choix des entreprises en matière stratégique, d’investissement, d’emploi, de conditions de travail, d’hygiène et sécurité, de formation professionnelle, de reconnaissance des qualifications.

- Un droit d’intervention des collectivités publiques dans la vie économique locale à travers des commissions territoriales de l’emploi et du développement (patronat, syndicats, collectivités) permettra d’examiner les alternatives aux licenciements et aux délocalisations, et responsabilisera les entreprises vis-à-vis du tissu économique local.

- De nouveaux moyens d’action pour l’Inspection du Travail permettront de mieux faire respecter le Code du Travail, les conventions collectives, les accords de branche et d’entreprises.

Une dimension internationale

La mondialisation capitaliste pèse sur les choix des entreprises et sur les politiques des Etats. Les marchés financiers prétendent imposer aux entreprises des taux de rentabilité exorbitants au détriment de leurs salariés. Les dogmes économiques libéraux réclament des Etats des politiques budgétaires restrictives et des privatisations massives au détriment des protections sociales, des services publics et des besoins des peuples. Les lieux de pouvoir s’éloignent vers les multinationales ou les institutions supranationales (Union européenne, OMC...). La reconquête démocratique doit aussi affronter ces nouveaux enjeux.

Plusieurs terrains devront être investis par l’action politique et les mobilisations populaires :

- la réorientation démocratique et sociale de l’Union européenne,

- la refondation des institutions type OMC, FMI, Banque mondiale,

- la réforme de l’ONU pour une meilleure représentativité et une plus forte légitimité universelle.

Une révolution démocratique

« Le socialisme, c’est la République poussée jusqu’au bout » disait Jean Jaurès.

Nous voulons que les besoins sociaux priment sur les profits et que la souveraineté populaire s’impose face à la dictature des actionnaires et des rentiers. Face à la résistance des détenteurs du capital, l’action politique gouvernementale doit se combiner avec l’intervention citoyenne pour créer les rapports de forces nécessaires. C’est parce que nous avons tiré les leçons des expériences du passé que nous faisons de l’approfondissement et de l’élargissement de la démocratie, le levier essentiel de la transformation sociale.

Claude Debons


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message