Birmanie : vers la guerre civile ?

dimanche 4 avril 2021.
 

Face à une junte qui réprime aveuglément, beaucoup de Birmans songent à prendre les armes. Et pourraient être épaulés par les armées des minorités ethniques qui peuplent les marges du pays.

Après la journée du samedi 27 mars, au cours de laquelle plus de 100 personnes ont été abattues par des soldats ou des policiers, soit plus de 500 depuis le début de la répression, la Birmanie “risque de plonger dans une guerre civile”, écrit depuis l’Australie The Sydney Morning Herald le 30 mars. Parmi ceux qui, depuis le 1er février et le coup d’État qui a renversé Aung Sang Suu Kyi, descendent chaque jour dans la rue, beaucoup sont tentés par des formes plus violentes de résistance. Face à la répression aveugle, ils commencent à s’armer, même si, précise The Economist, ce n’est “avec rien de plus que des frondes et des cocktails Molotov”. Ce que nuance The New York Times, qui parle de “guérilla” “érigeant des barricades” face “aux incursions des militaires” et “apprenant sur Internet comment fabriquer des bombes fumigènes”.

Les risques de guerre civile semblent encore plus grands à la périphérie du pays. Les minorités ethniques qui peuplent ces régions disposent, pour beaucoup, de leurs propres armées. Pour certaines en rébellion ouverte contre le pouvoir central, pour d’autres en sommeil, en vertu de fragiles accords de paix. Depuis le 1er février, des foyers insurrectionnels sont signalés ici et là.

Un front uni ?

Dans le Nord, “la Kachin Independence Army (KIA) a lancé des attaques simultanées le 28 mars contre au moins quatre bataillons de police dans le township de Hpakant”, relate le site Myanmar Now, qui précise que, dès le lendemain du coup d’État, “des combats ont eu lieu entre les forces armées de la junte et la KIA, y compris dans l’État Shan voisin”. Le régime aurait eu recours à des hélicoptères contre la KIA.

Dans le Sud, en territoire karen, le long de la frontière thaïlandaise, ce sont des avions de chasse qui ont été appelés en renfort et ont frappé plusieurs villages le 27 mars, faisant au moins trois morts et poussant plusieurs milliers de personnes à fuir. Des frappes en représailles “de la prise d’un avant-poste sur une colline” par le bras armé de la Karen National Union (KNU), écrit The Irrawaddy. Quelques jours avant, la KNU avait exhorté la junte à “arrêter de tuer des civils et [à] libérer tous ceux qui ont été incarcérés depuis le 1er février”. Dans un communiqué similaire, dont fait état Myanmar Now, la KIA disait qu’“elle se battrait au côté des citoyens contre la dictature”. Le 30 mars, trois autres “organisations ethniques armées, qui contrôlent de larges pans du territoire”, ont proféré une menace similaire, rapporte The Sydney Morning Herald.

Ces armées pourraient-elles former un front uni ? C’est l’un des projets d’un groupe de députés dissidents qui tente de mettre sur pied un gouvernement civil, selon The Economist :

“Des discussions sont en cours en vue de regrouper plusieurs milices représentant des minorités ethniques en une armée ‘fédérale’ afin de résister à la Tatmadaw [l’armée birmane].”

Parallèlement, raconte The New York Times, des citadins ont commencé à rejoindre les rangs de ces armées. “Dans la forêt, ils s’entraînent aux rudiments de la guerre et apprennent comment saboter des installations liées à l’armée.” Une collaboration indispensable, aux yeux de la correspondante du quotidien américain, pour qu’une telle rébellion armée “ait une quelconque chance de succès”.

Courrier International


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