Grippe aviaire : vigilance en France après des cas de transmission aux humains en Russie

jeudi 25 février 2021.
 

Sept employés d’une usine russe auraient été contaminés par la souche H5N8. Si cela était confirmé, ce serait la première fois que ce sous-type du virus franchit la barrière des espèces. Côté français, où l’on dénombre 466 foyers de grippe aviaire depuis décembre, on se veut rassurant. Mais les spécialistes restent très attentifs...

Certains scientifiques le voyaient comme l’un de ceux les moins susceptibles d’infecter l’être humain. Mais tous étaient d’accord pour dire que sa capacité à muter rendait l’évaluation incertaine  : samedi, le couperet est tombé. Dans un discours télévisé, Anna Popova, directrice de l’agence sanitaire russe Rospotrebnadzor, a annoncé l’identification d’un premier cas de transmission de la souche H5N8 de la grippe aviaire à l’humain. Des scientifiques ont isolé son matériel génétique chez sept travailleurs d’une même usine de volaille, au sud de la Russie, où une épidémie de grippe A avait frappé les animaux en décembre.

«  Le temps de se préparer  »

L’état des malades n’était pas jugé inquiétant. Ils «  se sentent bien  », estimait Anna Popova. Tous travaillaient en contact avec les animaux  : rien n’indique à ce jour que ce virus soit transmissible d’humain à humain. Une nouvelle mutation n’est toutefois pas à exclure. La découverte de ce week-end, estime Anna Popova, «  donne au monde entier le temps de se préparer  » en créant des tests et un vaccin «  dans le cas où ce virus deviendrait plus pathogène et plus dangereux pour l’homme  ».

Le laboratoire d’État russe Vektor, qui a identifié la mutation, n’est pas une structure parmi d’autres. Installé à Koltsovo, en Sibérie, tout près de Novossibirsk, le Vektor State Virology and Biotechnology Center, de son nom complet, a déjà mis au point de nombreux vaccins, dont l’EpiVacCorona, concurrent national du Spoutnik-V contre le coronavirus.

Les équipes françaises attentives

Le Moscow Times rapporte qu’à l’époque soviétique, ce laboratoire a mené des recherches secrètes sur les armes biologiques et stocke encore plusieurs virus mortels, dont Ebola et celui de la variole. En septembre 2019, une explosion survenue dans ses locaux avait mis en alerte la communauté internationale. Moscou avait aussitôt écarté toute menace de contamination. Aujourd’hui, Rinat Maksyutov, chef de Vektor, déclare que le laboratoire est prêt à commencer à développer des kits de détection des cas potentiels de H5N8 chez les humains, et à travailler sur un vaccin.

Côté français, où l’on dénombre 466 foyers de grippe aviaire depuis décembre, on se veut rassurant. Dans un communiqué, les ministres de l’Agriculture et de la Santé insistent sur le fait qu’aucun cas de contamination d’oiseaux à humain n’a été constaté sur le territoire. À ce jour, 130 séquences virales complètes ont été effectuées, affirment-ils  : «  Aucune des analyses réalisées par l’Agence nationale de sécurité sanitaire et alimentaire n’a montré de propriétés laissant craindre un risque de transmission à l’homme du virus de l’influenza aviaire présent sur des volailles en France.  » Les équipes disent toutefois rester attentives, cherchant à comparer les données du virus qui a infecté les travailleurs russes à celle du virus circulant chez les volailles en France.

23 sous-types de la grippe A

Si l’analyse de l’agence sanitaire russe est confirmée, «  ce serait la première fois que le H5N8 infecte les humains  », souligne l’OMS. Ce ne serait toutefois pas la première fois qu’une souche de la grippe aviaire passerait de l’oiseau à l’homme.

Il existe 23 sous-types de la grippe A. En dehors du H1N1, la plupart ne sont pas pathogènes pour l’humain. D’autres peuvent l’infecter. Les sous-types H5N1, qui circulent en Asie et en Afrique du Nord-Est, en sont les cas les plus connus. Depuis 1997, ils ont provoqué plusieurs centaines de décès. D’autres sous-types, comme H7N7 et H9N2, ont également déjà franchi la barrière des espèces, causant dans la plupart des cas des maladies bénignes. L’Institut Pasteur mentionne, enfin, de très rares cas de transmissions du virus d’humain à humain. Cela se serait déjà vu de façon exceptionnelle et sans qu’il y ait de suite, avec le H5N1.

Marie-Noëlle Bertrand


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