Montebourg est-il encore de gauche ? 2022 : le candidat de tous les souverainistes ?

vendredi 29 janvier 2021.
 

Seize mois avant les prochaines présidentielles, les candidats potentiels commencent à dévoiler leur jeu. C’est le cas de l’ancien ministre socialiste du Redressement productif Arnaud Montebourg.

Il n’est pas encore officiellement candidat à l’élection présidentielle mais ses soutiens s’activent. Arnaud Montebourg se prépare. Arrivé troisième sur le podium de la primaire socialiste avec 17,8% des voix, il croit plus que jamais dans ses chances de victoire. Parmi ses premiers soutiens, la sénatrice Laurence Rossignol : « J’observe que depuis une quinzaine d’année, c’est un homme politique qui a de la cohérence. Il a structuré sa pensée autour d’un diagnostic qui est celui de la mondialisation et de la crise démocratique », a-t-elle déclaré sur France 2, le 13 janvier dernier. Déjà en 2001, il fondait avec Bastien François, la C6R, la Convention pour une sixième République, pour changer en profondeur nos institutions. Il faut également reconnaitre que l’ancien ministre de l’économie – d’abord dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault puis de Manuel Valls dont il faut rappeler qu’il a permis par un pacte plus ou moins secret, avec Benoît Hamon, l’accession à Matignon – est depuis longtemps engagé dans un combat politique : la démondialisation. On se souvient encore de cette Une du Parisien où il partageait l’affiche avec Yves Jegot pour vanter le « made in France ». Depuis, il a quitté la vie politique pour se lancer dans la production de miel et d’amandes sous la marque Bleu Blanc Ruche. Ainsi pour Montebourg, il faut relocaliser la production. « La mondialisation est terminée », a-t-il même assuré.

Protectionnisme solidaire ou protectionnisme économique, indépendance : il y a plusieurs tendances de mots pour en appeler au retour de la souveraineté. Montebourg partage sur ce point beaucoup des idées de Jean-Luc Mélenchon qui ne désespère pas de le compter parmi ses futurs soutiens. Déjà en 2016, Eric Coquerel déclarait : « On peut dire qu’il y a une mélenchonnisation du discours de Montebourg. Il serait le bienvenu pour travailler avec nous ». Même intention du côté de l’écologiste Yannick Jadot qui espère convaincre Montebourg de travailler ensemble : « relocalisation et souveraineté industrielle, ça me va, on a un espace en commun », a-t-il déclaré hier. Ce que dénonce Jadot chez Mélenchon trouve grâce à ses yeux chez Montebourg. Etonnant. À gauche donc, on bataille pour ramener Montebourg à soi. Pourtant, pour une partie de la gauche, cette centralité de la thématique de la souveraineté inquiète et dérange. Parce que pour cette gauche-là, de souveraineté à souverainisme, il n’y a qu’un pas.

À l’instar de François Ruffin, Montebourg plaide pour le retour aux frontières nationales : « Je crois qu’un État ne peut pas faire l’économie de contrôler ses propres frontières, à la fois sur les entrées de biens et services ou pour toute personne qui cogne à sa porte. Pour moi, c’est la base de la reconstitution de notre indépendance : des frontières nationales », a-t-il lancé sur Europe 1 en novembre dernier. Montebourg surprend aussi lorsqu’il voit dans la politique de Donald Trump, quelques vertus : « certains éléments de sa politique devaient être considérés comme ceux que l’Europe aurait dû mettre en œuvre ». Depuis quelques mois, bien que rivaux, Montebourg échange très volontiers avec le président de la région des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, au point que certains de ses proches évoquent l’idée d’un tandem pour l’élection présidentielle. L’hypothèse a de quoi surprendre. Enfin, on oublie difficilement qu’en 2016, lors de sa candidature à la primaire socialiste, le camp souverainiste des Florian Philippot, Nicolas Dupont-Aignan et autres François Asselineau, revendiquaient la paternité des idées de Montebourg. Pas étonnant alors que la journaliste Caroline Roux ait ainsi interrogé Laurence Rossignol sur France 2 : « Montebourg veut dépasser le clivage traditionnel droite/gauche. L’union de la gauche vous y croyez moins et vous préférez l’union des souverainistes ? » Malaise de la sénatrice socialiste qui improvise une réponse et reste ambiguë.

Une ambiguïté qu’entendent bien exploiter certains des soutiens de Montebourg. Sur le média en ligne Le Vent se Lève, l’ex insoumis Georges Kuzmanovic – qui dissimule à peine son rêve de réunir les souverainistes de tous bords – l’assure : « Arnaud Montebourg est le seul à pouvoir arriver au second tour ». Si l’on a coutume de dire que nous avons les amis que nous méritons, pas sûr que le monde de Kuzmanovic soit du goût du probable futur candidat à l’Elysée. En effet, le 31 janvier dernier, pour fêter la victoire du Brexit, il s’était affiché aux côtés de François Asselineau, Nicolas Dupont-Aignan, Florian Philippot, Jean-Frédéric Poisson ou encore Jacques Chaminade. Du beau monde. Un monde connu pour ses penchants nationalistes, adeptes des théories complotistes pour certains. De Manuel Valls à Xavier Bertrand en passant par Georges Kuzmanovic ou Yves Jegot, on peine parfois à percevoir la cohérence d’Arnaud Montebourg, tant vantée par Laurence Rossignol dans l’interview de France 2. Et s’il assume désormais de vouloir dépasser les clivages politiques traditionnels, une question se pose désormais : Arnaud Montebourg est-il encore de gauche ?


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