À 17 ans, une jeune fille se suicide après une humiliation transphobe dans son lycée

lundi 21 décembre 2020.
 

Mardi 15 décembre, Avril (1), une lycéenne de 17 ans, s’est suicidée. La nouvelle a ému beaucoup de monde sur les réseaux sociaux. La jeune femme, qui résidait à Lille, était transgenre. Chaque jour, elle subissait une forme de transphobie ordinaire. L’école refusait de l’appeler par son prénom, la genrait au masculin, lui interdisait de s’habiller comme elle le souhaitait. Si les raisons d’un suicide sont toujours complexes et personnelles et ne peuvent rarement être attribuées qu’à une cause unique, la part de responsabilité de l’Education nationale dans cet événement tragique est évident, comme en attestent des vidéos prise par la jeune lycéenne. Pour lutter contre les discriminations, l’école a encore beaucoup à faire.

Avril n’est malheureusement pas un cas isolé. En septembre, Doona, une étudiante trans de Montpellier, se donnait la mort après que le CROUS l’avait menacée d’expulsion. Derrière les nombres, il y a des vies brisées. Pour prévenir ces tragédies, l’Etat peut agir.

L’école doit remplir son devoir de protection

Des vidéos postées sur les réseaux sociaux dévoilent la manière dont Avril était reçue par le personnel éducatif. Interdite de venir au lycée avec une jupe, sa tenue lui était reprochée par un responsable de l’établissement. D’après les dires de ses camarades, il lui aurait été interdit de venir au lycée « tant qu’elle ne s’habillait pas en garçon ». Des camarades pour la soutenir seraient venus également au lycée en jupe, et ils auraient apposé dans le lycée des affiches de soutien, lesquelles auraient été retirées dans la journée. De plus, le personnel éducatif n’aurait cessé de l’appeler par son ancien nom et de lui parler en la genrant au masculin, niant son identité.

Dans une lettre adressée à Jean-Michel Blanquer, Bastien Lachaud, président du groupe d’études sur les discriminations et LGBTQI-phobies dans le monde à l’Assemblée nationale, et Adrien Quatennens, député de Lille, demandent des comptes au ministre de l’Education nationale. Ils y rappellent qu’il est impératif et urgent que les établissements scolaires soient informés et accompagnés par le ministère pour apprendre les ressorts d’une prise en charge adéquate des élèves trans. Il faut que la communauté éducative sache d’intervenir pour faire accepter la transidentité de certains élèves, et être un soutien pour eux, et en aucun cas un acteur supplémentaire de rejet.

Le savoir, pédagogique et humain, sur la prise en charge des enfants et des adolescents trans en milieu scolaire existe. Les personnes trans elles-mêmes ont participé à le développer, pour ne pas que se reprodusient les situations qu’elles ont pu vivre. Une partie de la communauté éducative se mobilise aussi depuis longtemps sur la question, mais peine à changer les pratiques sans appui institutionnel. Des discriminations tout le long de la vie

Les violences et discriminations subies à l’école ne sont que le premier obstacle que rencontrent les personnes trans dans une société qui les excluent régulièrement adminsitrativement et judiciairement. Aujourd’hui encore, changer son sexe et/ou son prénom à l’état civil reste une longue et difficile bataille. Comment ce que l’Etat ne reconnaît qu’au prix de longs mois de démarches judiciaires pourrait-il être évident et logique pour tout le monde ?

En mettant en place le changement libre et gratuit à l’état civil, nous faciliterions grandement la vie des personnes transgenres, et l’on accorderait une légitimité collective à tout changement de genre dans nos entourages.

Une question sociale

Avril vivait dans un foyer de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), et vivait dans une situation très difficile. Toutes les études à ce sujet en témoignent : les personnes trans sont toujours particulièrement frappée par la pauvreté et l’exclusion. Leur situation sociale, méconnue du grand public, touche pourtant des dizaines de milliers de nos concitoyen·nes. Les femmes transgenres subissent aussi le sexisme dans ses formes les plus déshinibées : difficultés d’accès à un emploi, inégales rémunérations, hyper-sexualisation, harcèlement de rue…

Les personnes trans ne sont pas condamnées à subir ces violences.

Dans un environnement sécurisé financièrement, avec un entourage bienveillant, une transition de genre est souvent beaucoup moins difficile. La transition peut alors être pleinement heureuse et émancipatrice, pour une personne qui peut enfin vivre pleinement dans le genre qu’elle souhaite.

Lutter contre les inégalités, assurer des moyens matériels à tou·tes, mettre des moyens dans l’aide sociale à l’enfance et former les personnels éducatifs et les accompagnateurs, c’est aussi lutter contre les LGBTIphobies.

L’équipe thématique droits nouveaux lgbti.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message