Pollution de l’air et de l’eau : la France sommée d’agir… par la Commission européenne !

jeudi 12 novembre 2020.
 

Ce n’est pas la première fois que le gouvernement français est rappelé à l’ordre pour ne pas avoir mis en œuvre les mesures nécessaires. La France a été condamnée en octobre 2019 pour avoir dépassé « de manière systématique et persistante » les valeurs limites concernant le dioxyde d’azote (NO2). Les principaux secteurs émetteurs de ces deux polluants sont le transport principalement routier, le chauffage domestique mais aussi… l’agriculture !

Cela n’est pas la première fois et pourtant… La Commission européenne poursuit et met en demeure la France pour non-respect des valeurs limites en matière de pollution de l’air. La pollution de l’eau est également pointée du doigt. Alors que chaque jour nous rappelle un peu plus que l’urgence climatique n’est pas un enjeu dérisoire, le Gouvernement semble peiner à prendre la mesure de ce qui se joue. Manon Dervin, contributrice au Monde en Commun nous livre une analyse sur ce que la Commission reproche à la France et livre quelques propositions.

Vendredi 30 octobre, la Commission européenne a tancé le gouvernement français pour son inaction en matière de pollution. Que fait le gouvernement Macron ? Rien. Et même pire !

La France mise en demeure pour pollution de l’air et de l’eau

La Commission européenne a tout d’abord annoncé traduire la France devant la Cour de justice de l’Union européenne pour non-respect des valeurs limites en matière de pollution de l’air. Elle précise que « les données fournies par la France confirment le non-respect systématique des règles de l’UE relatives aux valeurs limites des PM10 dans les zones de Paris et de Martinique pendant douze et quatorze ans respectivement ». Depuis plus de douze ans donc, des populations respirent un air fortement pollué. Ce n’est pas la première fois que le gouvernement français est rappelé à l’ordre pour ne pas avoir mis en œuvre les mesures nécessaires. La France a été condamnée en octobre 2019 pour avoir dépassé « de manière systématique et persistante » les valeurs limites concernant le dioxyde d’azote (NO2). Les principaux secteurs émetteurs de ces deux polluants sont le transport principalement routier, le chauffage domestique mais aussi… l’agriculture !

La Commission européenne a également mis en demeure la France pour pollution de l’eau, et plus précisément non-respect des teneurs en nitrates dans l’eau potable. « Depuis longtemps, l’eau potable fournie à des dizaines de milliers de personnes en France contient des quantités excessives de nitrates » explique-t-elle. La France a deux mois pour répondre, au risque sinon d’être également renvoyée pour ce motif devant la Cour de justice de l’Union européenne. La pollution aux nitrates correspond principalement à un usage intensif d’engrais et fertilisants. Elle est indissociable de l’agriculture industrielle productiviste.

Pollutions et pandémie : une inaction qui coûte cher

Le contexte actuel prouve que l’inaction en matière de lutte contre la pollution de l’air et de l’eau coûte cher.

Un récent rapport des experts de l’ONU en matière de biodiversité (IPBES) établi formellement les liens entre dégradation de la nature et pandémies. Pour ces experts, pandémies, crise écologique et crise climatique ont pour origine les mêmes activités humaines. Au premier chef de ces activités néfastes : les changements d’utilisation des terres et l’expansion et intensification de l’agriculture et son cortège d’engrais et de pesticides. Ils appellent à un changement profond de modèle économique. Et pour cause : prévenir les pandémies coûterait 100 fois moins cher que d’en subir les conséquences.

Une fois le virus transmis aux humains, la globalisation des transports achèvent de transformer l’épidémie en pandémie planétaire incontrôlable. La pollution de l’air, corollaire de cette globalisation, coûte, elle aussi, et à tous points de vue, très cher. Elle est la cause principale de mortalité liée à l’environnement en Europe, selon l’agence européenne de l’environnement (EEA). Elle fait jusqu’à 76 000 morts par an en France chaque année, environ 400 000 en Europe. Elle a également un coût financier élevé : 943 euros par an et par Français. Soit près de 11 milliards d’euros annuel pour les 67 villes françaises étudiées.

Finalement, quand pandémie et pollutions se superposent, le cocktail est explosif. Il est maintenant clair que la pollution de l’air accroît le risque de mourir du Covid-19. Une récente étude internationale conclue qu’environ 15 % des décès dans le monde en raison du Covid-19 pourraient être attribués à une exposition à long terme à la pollution de l’air et aux particules fines PM2.5, voisines des PM10. Cette proportion s’élèverait à 18 % en France et à 27 % dans les régions les plus polluées de la planète, comme l’Asie de l’Est.

Que fait le gouvernement Macron ? Rien, et même pire !

La lutte contre ces deux pollutions aux conséquences désastreuses est un enjeu vital. Cela implique une planification. Mais le gouvernement Macron fait tout l’inverse. C’est un cancre en matière d’écologie et un spécialiste en organisation du chaos. Les transports et l’agriculture en sont deux exemples notoires.

Lutter contre pollution de l’air implique de faire bifurquer notre modèle de transports au profit du train. Il est de loin le plus écologique et le moins polluant. Nous avons déjà perdu la moitié de nos lignes depuis 1950 et le fret ferroviaire ne représente plus que 9 % du transport de marchandises contre 89 % pour la route. Mais Macron s’acharne à démolir le ferroviaire et privilégie le tout camion. En juillet 2020, sans que le gouvernement ne dise mot, France Rail Industry, principal fournisseur en rails de la SNCF était confié au groupe anglais Liberty et Alstom annonçait vouloir se séparer de son usine d’assemblage de TER hybrides située dans le Bas-Rhin. Côté fret, le train des primeurs Perpignan-Rungis n’est toujours pas relancé et la SNCF veut supprimer 10 % des postes de conducteurs fret. La somme de 4,7 milliards mise sur la table dans le cadre du plan de relance est un trompe-l’œil. Cela correspond à peine aux pertes subies par la SNCF durant la période de confinement. Elle ne permettra pas de sauver les petites lignes ou de développer à nouveau le train de nuit !

Pour lutter contre la pollution de l’eau et de l’air, il faut aussi changer de modèle agricole au profit d’une agriculture plus respectueuse des écosystèmes. Pourtant, deux ans après l’adoption de la loi relative à l’Agriculture et l’alimentation, dite « loi EGalim », 28 syndicats et associations dresse un constat d’échec et l’enterrement pur et simple du texte et de ses ambitions. Les pesticides sont partout. On trouve des pollutions aux pesticides ou à certains produits industriels supérieures aux seuil autorisés dans la moitié des cours d’eau français. D’après un rapport d’UFC-Que Choisir, 2 millions de français boivent une eau non conforme en pesticides. Les principales zones où l’eau du robinet est contaminée correspondent aux zones de cultures intensives. Mais en l’espace de trois ans, Macron a refusé d’interdire le glyphosate, attaqué devant le tribunal administratif les arrêtés des maires instaurant des zones tampons et réautorisé les néonicotinoïdes. L’usage des pesticides devait baisser de moitié, il a augmenté d’un quart en dix ans. Le bilan de Macron y contribue largement.

Tout indique l’ampleur de l’urgence écologique et climatique et la nécessité d’y faire face. Même la très libérale Commission européenne, qui ne s’illustre pas par ses ambitions écologiques, en vient à sommer la France d’agir. Définitivement, Macron et la République en Marche vont à contre-sens.

MANON DERVIN


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