Formation politique, besoin vital pour tout militant anticapitaliste

mercredi 26 septembre 2012.
 

Qu’est-ce qu’il me faut lire pour me former politiquement, assez vite, sur l’essentiel ? demandent assez souvent de nouveaux militants. Ils ont raison de vouloir enrichir leur conscience politique ; cependant :

- il n’existe aucun livre miracle pour remplacer ce qui s’apprend et se construit surtout par la vie et sur une vie.

- la formation politique ne doit en rien s’apparenter à un "lavage de cerveau". Son but doit être au contraire de contribuer à donner au militant les moyens de juger par lui-même.

- l’adhérent d’une organisation doit se méfier d’une part des formations ayant pour but essentiel de l’enfermer dans le monde mental du parti, d’autre part des formations trop abstraites, dispensées par des intellectuels et portant trop souvent sur des sujets partiels.

1) Le vécu comme facteur favorisant la conscience politique

Tout bâtiment a besoin de fondations solides. Il en va de même pour la conscience politique dont les meilleures fondations naissent du vécu personnel et collectif. Le syndicalisme ouvrier forme plus de cadres politiques anticapitalistes que la pêche à la ligne. Chaque réunion syndicale, chaque campagne politique, chaque responsabilité ou expérience personnelle de lutte constitue un levain de conscience ; or, il suffit d’une toute petite boule de levain pour épanouir une magnifique tourte de pain.

Les luttes contribuent à la conscience politique par le fait qu’elles mettent à nu la réalité de nos sociétés, en particulier la domination des capitalistes, réalité généralement cachée sous les discours prétendument démocratiques (1 homme, 1 voix) ou prétendument de bon sens (sans patron il n’y aurait pas d’emploi).

Elles y contribuent aussi parce qu’aucune conscience individuelle ne peut être séparée des émotions individuelles, des élans gratuits de solidarité comme de l’enthousiasme des grandes manifestations, de l’admiration pour certaines personnes de qualité comme du mépris des profiteurs et des girouettes.

Toute formation nécessite d’emmagasiner préalablement et conjointement des informations. Or, l’activité militante apporte au fil des jours un grand nombre d’informations qui créent peu à peu dans notre cerveau l’environnement, les pré-requis nécessaires pour passer de l’information à la formation.

Plus l’adhérent d’une organisation participe à des instances d’information, de réflexion et de décision, plus il ressent le besoin de se former, plus il est en capacité de se former. Plus il est en position publique de défendre un projet et un programme, plus il ressent le besoin de faire siens ce projet et ce programme.

2) Construction psychologique de la personne et formation politique

Le modèle de militant formé ne doit surtout pas être celui de l’intellectuel souvent parisien qui dispose par sa famille, sa scolarité, son lieu de vie et ses relations de suffisamment de culture, de méthode, d’informations et de protections pour briller sur de nombreux sujets indépendamment de ses convictions profondes.

C’est ce genre de saltimbanque qui a trahi la Résistance pour la pitance du pouvoir, trahi Mai 68 pour le social-libéralisme gestionnaire, trahi toute idée contraire aux intérêts momentanés de sa carrière personnelle. La caractéristique fondamentale de ce clown, c’est de ne jamais tirer son propre bilan dans tel ou tel contexte parce que ses opinions n’ont de rapport qu’à son ambition ou son plaisir. Les idées socialistes, elles, sont inséparables de la réalité collective vécue ; la formation issue du socialisme historique est inséparable de l’élaboration puis du bilan régulier d’un projet, d’une stratégie, d’une tactique, d’une direction, d’un élu...

La démarche politique d’un militant doit se fonder sur la recherche du maximum de vérité (même s’il en coûte à son organisation). Le problème, c’est que cette vérité ne se trouve dans aucune Révélation, aucun dogme, aucun axiome ; comme toute démarche scientifique, elle ne peut se construire que par l’expérience, la raison, le doute, la confrontation.

La démarche politique d’un anticapitaliste doit se fonder en même temps sur la recherche de l’efficacité pour avancer vers une société plus juste, plus démocratique, plus respectueuse de l’intérêt public.

A mon avis, la conscience politique individuelle s’enrichit d’abord des divers aspects de la vie dont l’expérience politique personnelle et collective.

3) Répondre à la demande de la génération militante d’aujourd’hui

Les grands mouvements sociaux (1905, 1920, 1936...) et les épopées progressistes (Républicains espagnols, Résistance...) ont permis l’éclosion de générations militantes. Durant 35 ans, la tranche d’âge de la population française qui votait le plus massivement et le plus régulièrement à gauche était celle des jeunes qui avaient eu vingt ans dans les années 1967 à 1975, époque où changer la vie paraissait à portée du militantisme quotidien.

Depuis 2007, ce sont les jeunes d’aujourd’hui qui votent le plus massivement et le plus régulièrement à gauche. Ils forment par ailleurs un pourcentage important des manifestants. Leur besoin et leur demande de formation est-elle identique à la nôtre au même âge dans les années 1960 ? Non. Plusieurs raisons expliquent cette demande différente :

- face au capitalisme financiarisé, nous en sommes réduits à défendre l’os des acquis démocratiques et sociaux : la sécurité sociale, la retraite par répartition, le droit du travail...

- l’URSS et les "pays socialistes" d’Europe de l’Est ont disparu

- la Chine n’apparaît plus à une frange militante importante comme le "nouveau soleil rouge" de l’humanité

- les expériences politiques concrètes construites en opposition à l’impérialisme américain demandent à être analysées prudemment.

- les débats et initiatives altermondialistes sans construction de vrais mouvements politiques s’essoufflent naturellement.

Dans ces conditions, toute formation politique doit éviter de répéter seulement les acquis de la formation de générations précédentes.

4) Force et faiblesses du socialisme

Les générations précédentes porteuses d’émancipation humaine se réclamaient globalement du socialisme. Cette référence s’estompe peu à peu.

Nous devons essayer de rappeler son fondement : Le socialisme est essentiellement un combat au présent face aux injustices, un moyen d’action pour les limiter dans la société actuelle, un projet politique essayant de porter les intérêts historiques de l’humanité.

Des grèves aux campagnes électorales, des manifestations aux réunions, l’énergie et le temps disponible des militants s’épuise. La combativité du mouvement social comme le militantisme des anticapitalistes sont assez puissants depuis une vingtaine d’années. Pourtant, nous n’avançons guère ; de nombreux épisodes de la tragique épopée socialiste donnent même l’impression que la mobilisation née de la société dépasse souvent largement les capacités des directions qu’elle se donne.

Aussi, la question des handicaps politiques du socialisme n’est ni abstraite, ni inutile :

- faiblesse de son bilan partagé depuis 2 siècles (dérive social-démocrate, sectaire, stalinienne, gauchiste, ouvriériste...),

- difficulté à assumer la lutte pour construire une hégémonie idéologique dans la société,

- carences stratégiques pour bâtir une société plus propice à l’émancipation individuelle et collective.

- faible capacité à construire des forces organisées aptes à créer sur ces bases nouvelles une alternative au capitalisme

5) Construire le Parti de Gauche et la France Insoumise implique de prendre en compte ces faiblesses

La direction du mouvement Pour la République Sociale en avait conscience d’où plusieurs textes de référence qui contribuaient au débat.

Le Manifeste de PRS en 21 parties :

http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

12 ET 13 MAI 2007 (résolution du CN DE PRS) "La nécessité d’une force politique nouvelle"

LA GAUCHE D’APRES : Résolution votée par la Convention Nationale de PRS des 30 juin et 1er juillet 2007

RESOLUTION DU CONSEIL NATIONAL DE PRS 29 ET 30 MARS 2008 : L’heure est à des réponses de gauche face au règne sans partage du capital, face à la résurgence de la pauvreté, face à l’accélération de la crise écologique

Dans le même temps, entre 2002 et 2008, d’autres forces ont poursuivi le même type de réflexion, au sein du PCF, du NPA, des CUAL, des Alternatifs, du MARS... Citons ici :

28 juin 2003 Appel pour une alternative à Gauche (dit Appel Ramulaud )

Document Programme du Rassemblement antilibéral de gauche

La refondation qui s’impose ( par Christian Picquet, courant UNIR de la LCR)

Dès sa naissance, le Parti de Gauche a essayé :

- de lancer une grande réflexion portant globalement sur le bilan, les références et la stratégie.

REPERES ET RUPTURES POUR UNE NOUVELLE EMANCIPATION (A : COMPRENDRE)

- d’impulser des remue-méninges annuels, lieux de débat ouvert

Remue-méninges 2011 Un succès sur tous les plans

Remue-méninges 2009 du Parti de Gauche : une réussite

Cependant, le Front de Gauche devait nécessairement réussir à s’imposer dans les luttes et dans les urnes entre 2009 et 2015. Cette obligation a limité l’importance réelle donnée par les organisations comme par les militants à la réflexion et à la formation. Le Front de Gauche étant resté un cartel dans lequel certaines organisations n’ont pas joué collectif pour éviter que le Front n’occupe une partie de leur propre espace politique, il a explosé.

Cet échec du Front de gauche ne doit pas conduire à sous-estimer davantage la formation, au contraire.

6) La formation politique restera une nécessité incontournable

Que serait l’individu sans son cerveau ? Rien. De même, le militant n’est qu’un légume sans la théorie. Ami, garde donc un peu de forces pour te bâtir les repères d’une pensée théorique construite.

Tu n’y arriveras pas seul. Aurais-tu appris tout ce que tu sais, sans tes parents, sans l’école, sans des livres ... ? Non. Il en va de même pour la formation politique. Il est du devoir de ton organisation de t’apporter le cadre organisé dans lequel tu puisses te construire théoriquement de façon autonome.

Cependant, la formation politique fonctionne comme la digestion. Un aliment bien digéré est un aliment que le corps transforme pour le faire sien, pour nourrir ses propres cellules. Une formation réussie est une formation qui apporte les éléments de méthode et de savoir au militant afin qu’il puisse la faire sienne (y réfléchir, la compléter, la critiquer ou même la rejeter).

Il serait intéressant de proposer ci-dessous un plan le plus complet possible de formation.

Dans l’immédiat, je mets donc en ligne ci-dessous les liens vers des textes et vidéos qui peuvent participer d’un travail de formation.

7) Rubriques et articles de ce site

Services Publics les propositions du Front de Gauche

États Généraux du Service Public à Orly les 29 et 30 janvier 2011 (Appel Préambule)

Santé et protection sociale : « Pacte 2012 2017 pour une Santé Egalitaire et Solidaire »

Laïcité : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

1) Socialisme ! OUI !

2) L’histoire est au socialisme ce que la mémoire est à l’individu : Indispensable

8) Textes et vidéos de France Insoumise


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