États-Unis : à l’heure de Covid-19, Trump flingue l’OMS et arrose Big Pharma

dimanche 12 juillet 2020.
 

Le président a officialisé la procédure de retrait du pays de l’Organisation mondiale de la santé. Selon Public Citizen, de nombreux lobbyistes travaillant pour les multinationales engagées dans la course au vaccin viennent de la Maison-Blanche.

L’Amérique d’abord : la pandémie fait des ravages dans son pays, mais dans sa croisade solitaire contre le Covid-19, Donald Trump fait le pari de tout régler par l’argent. Dans la nuit de mardi à mercredi, les États-Unis ont officiellement engagé leur procédure de retrait de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Alors que cette sortie éventuelle ne peut être effective avant un an, son adversaire dans la course à la présidence, le démocrate Joe Biden, a d’ores et déjà promis qu’en cas de victoire, en novembre, il annulerait immédiatement cette décision. Aux États-Unis, en plus des démocrates qui plaident pour une forme de leader­ship dans la coopération internationale contre le nouveau coronavirus, les chercheurs sont affligés : ce retrait « ne fera que nuire à la lutte mondiale contre le Covid-19 », dénonce, par exemple, la fédération des scientifiques américains.

Main basse sur les médicaments

Derrière les diversions de Donald Trump, qui accuse depuis des mois l’OMS d’indulgence envers la Chine, les États-Unis s’étendent moins sur d’autres considérations moins conjoncturelles. Lors de l’assemblée de l’agence onusienne, en mai, les représentants du locataire de la Maison-Blanche avaient été plus explicites : ils s’étaient, outre leurs attaques en règle contre la défense des droits à la santé sexuelle et reproductive des femmes – contraception, IVG, etc. –, illustrés en défendant mordicus la propriété intellectuelle des multinationales pharmaceutiques comme unique levier possible dans l’élaboration des vaccins.

Toute la stratégie états-unienne consiste en effet à déverser des milliards de dollars sur Big Pharma afin d’obtenir, au détriment du bien commun mondial, la priorité sur les médicaments et surtout sur les potentiels vaccins. En fin de semaine dernière, Trump a acheté la quasi-intégralité de la production de remdésivir, un antiviral fabriqué par la multinationale américaine Gilead. Avant-hier, son administration a octroyé un chèque de 1,41 milliard d’euros à l’entreprise de biotechnologies Novavax dans le cadre d’un programme de développement d’un vaccin, avec fabrication de 100 millions de doses pour la fin 2020. Ce faisant, il est probable que les États-Unis mettent la main sur le lot complet, alors même que ce laboratoire a reçu, ces derniers mois, plus de 340 millions d’euros du Cepi, la coalition publique-privée internationale qui participe aux opérations de financement à l’échelle du monde entier.

Des manœuvres pour obtenir des financements publics

Pour Trump, l’argent fait la loi, et les passerelles entre son administration et l’industrie pharmaceutique sont multiples. C’est encore plus patent à la lecture d’un rapport rendu public mardi par Public Citizen. Selon cette enquête de l’ONG basée à Washington, une quarantaine de proches du président états-unien travaillent aujourd’hui pour des grandes entreprises engagées, à titre divers, dans la lutte contre le Covid-19. Selon les profils, ils ont travaillé dans son équipe avant son élection ou à la Maison-Blanche, et tous profitent de la crise pour obtenir des financements publics pour leurs clients qui vont des géants comme AbbVie, Johnson & Johnson ou Pfizer, ou à des plus petites entreprises biotechnologiques (Genentech, Arcturus, etc.). Selon Public Citizen, les faits dévoilés dans son rapport « exigent de combattre le favoritisme et la corruption potentielle à court ou à plus long terme ». « L’administration Trump devrait, préconise le think tank, immédiatement faire la transparence totale sur les détails de tous les financements fédéraux dans la lutte contre le Covid-19. »

Thomas Lemahieu


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