Convention citoyenne pour le climat : Macron bloque la taxe sur les dividendes !

dimanche 5 juillet 2020.
 

149 propositions pour le climat à l’opposé de la politique d’Emmanuel Macron depuis 3 ans

Alors que pour Emmanuel Macron, le lancement de cette Convention était un habile moyen de retarder une action concrète en faveur de l’écologie en jouant la carte de la décision citoyenne, son opération semble tourner au vinaigre. Pourtant, les débats avaient été cadrés dès le début par le chef de l’État : il avait demandé aux tirés au sort de formuler des propositions pour réduire de seulement 40 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, là où les experts disent qu’il faudrait au minimum les réduire de 65 %.

Le rapport final de la convention citoyenne pour le climat a été publié fin juin et les 149 propositions qu’il contient sont en opposition totale avec la politique du gouvernement depuis 3 ans. Certaines mesures proposées par les 150 citoyens tirés au sort sont similaires à des amendements ou des propositions de loi débattues à l’Assemblée nationale et rejetées par le groupe LREM. D’autres propositions citoyennes ont, elles, pris le parfait contre-pied des lois adoptés durant le quinquennat. Elles sont par ailleurs plébiscitées par les Français. Selon un sondage Elabe commandé par le Réseau Action Climat (RAC), 78 % des répondants souhaitent que le gouvernement interdise l’aménagement de nouvelles grandes zones commerciales en périphérie des villes. 63 % sont favorables à une obligation pour les propriétaires de faire une rénovation thermique de leur logement à partir de 2024. 75 % réclament l’arrêt des publicités pour les voitures polluantes. La France insoumise annonce 90 % de compatibilité avec les mesures de l’Avenir en Commun

Vendredi 26 juin, la France insoumise a publié un comparatif des propositions de la Convention citoyenne avec les mesures défendues par les insoumis, qu’elles soient présentes dans le programme l’Avenir en Commun ou dans des amendements et des propositions de lois déposées par le groupe parlementaire. Le résultat, c’est que 90 % des propositions de la Convention citoyenne pour le climat sont compatibles avec l’Avenir en Commun. Par exemple : là où la Convention citoyenne propose de limiter les effets néfastes du transport aérien en organisant progressivement la fin du trafic aérien sur les vols intérieurs d’ici 2025 sur les lignes où il existe une alternative bas carbone satisfaisante en prix et en temps, la France insoumise répond que c’est une proposition de loi déposée par plusieurs députés insoumis.

Il existe cependant de rares différences dans les propositions. Par exemple, quand les tirés au sort proposent d’interdire les centres villes pour les véhicules les plus émetteurs de gaz à effet de serre, la France insoumise explique pourquoi elle n’est pas d’accord : « Nous défendons la nécessité de repenser la mobilité individuelle et de diminuer le recours à la voiture particulière. Pour autant, nous n’envisageons pas d’interdire l’accès aux centres-villes sans que des alternatives (transports en commun) ne soient accessibles en coût et en fréquence. La mobilisation des gilets jaunes a montré une claire demande de justice fiscale. Nous considérons que les Zones à faibles émissions (ZFE) mettent en oeuvre la même logique que celle qui a prévalu lors de la tentative de hausse de la taxe sur les carburants : il s’agit d’une mesure plus anti-pauvres qu’écologique. » La supercherie du « sans filtre »

Dès le lancement de cette Convention, il y avait fort à penser que ses propositions pourraient subir le même sort que les propositions parlementaires identiques proposées, notamment par le groupe insoumis à l’Assemblée nationale : systématiquement rejetées, ou bien votées en étant vidées de leur contenu. Le discours de Macron ce 29 juin semble le confirmer. Devant les 150 citoyens qui l’exhortaient à « prendre les mesures sans filtre », Macron a noyé le poisson. Il a annoncé ne pas retenir 3 des 149 propositions, dont la taxe de 4% sur les dividendes ! Le reste sera passé au tamis du gouvernement et du Parlement. Bien des points relèvent du règlementaire, le gouvernement aura donc la main sur la mise en œuvre définitive. Macron s’est dit favorable au référendum concernant l’inscription de la protection de l’environnement à l’article 1er de la Constitution. Mais ce référendum est conditionné au vote préalable d’un projet de loi en 2021 qui devra mettre d’accord les deux chambres du Parlement. Sur le fond, la proposition de rédaction de la Convention Citoyenne est similaire à ce que la majorité avait proposé lors de la 1ère réforme constitutionnelle. Pas étonnant que Macron y soit favorable : règle verte et non-régression du droit de l’environnement que nous défendons en sont absentes.

Des groupes de travail seront mis en place pour noyer le reste, dont la demande de référendum sur l’écocide ! Concernant le CETA, Macron botte en touche : « Si l’évaluation montre qu’il est contraire à l’Accord de Paris, je serais le premier à proposer qu’on l’abandonne. » Son caractère néfaste est pourtant démontré de longue date par les ONG. Sur le plan du financement, le gouvernement a offert en urgence des milliards sans cohérence ni contreparties écologiques aux secteurs polluants : 18 milliards pour le tourisme, 15 milliards pour l’aéronautique, 8 milliards pour l’automobile. Pour l’écologie, il faudra attendre septembre et compter sur trois fois moins. Macron a annoncé que le projet de relance injectera 15 milliards d’euros sur 2 ans au bénéfice de la transition écologique. Il faudrait 50 milliards d’euros par an pour atteindre la neutralité carbone. Le gouvernement n’en prévoit donc que 15%. Un projet de loi spécial « Convention Citoyenne » doit aussi être présenté à la fin de l’été. Une seule certitude sur son contenu : il ne sera pas « sans filtre ».

Par Manon Dervin et Flore Cathala.


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