Des pesticides perturbateurs endocriniens, cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques présents dans l’air en France

jeudi 27 février 2020.
 

ATMO France a publié le 18 décembre dernier un document très important sur la présence de pesticides dans l’air en France à partir duquel Générations Futures a construit un nouveau rapport. Ce document d’ATMO regroupe les mesures de pesticides réalisées en France entre 2002 et 2017 par les différents Associations Agréées de Surveillance de la Qualité de l’Air de France (AASQA).

Malgré les limites des données fournies par ATMO France[1], on y trouve de nombreuses informations très intéressantes. Ainsi, nous avons utilisé ces données compilées pour évaluer globalement la proportion des pesticides retrouvés dans l’air étant des Perturbateurs Endocriniens (PE) suspectés ou des Cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR)[2].

Nous avons réalisé deux analyses différentes complémentaires :

Analyse 2017 : Recherche des substances retrouvées dans l’air en 2017, l’année la plus récente étudiée par ATMO, dans toutes les régions ayant fait des analyses cette année-là, analyse des propriétés de ces substances et détermination de la proportion des analyses quantifiées de substances PE et CMR. Les données sont les plus récentes possibles (force) mais cela ne prend pas en compte toutes les régions (faiblesse).

Analyse France « entière » : Recherche des substances retrouvées dans l’air en prenant en compte les recherches les plus récentes dans chaque département en ayant fait, analyse des propriétés de ces substances et détermination de la proportion des analyses quantifiées de substances PE et CMR. Les données représentent tout le territoire (force), mais certaines données peuvent être anciennes (faiblesse).

Les propriétés CMR (1 ou 2) et le statut d’autorisation des substances pesticides en Europe ont été définies en fonction de la base de données de l’Union européenne sur les pesticides en février 2020[3]. Les propriétés PE suspectés ont été définies en utilisant la base de données TEDX[4].

Principaux résultats[5] :

Analyse 2017 :

Plus du quart (27,55%) des quantifications de pesticides dans l’air en 2017 était le fait de pesticides classés CMR 1 ou 2 selon l’UE ! Cela concerne 28,84% des 52 substances actives (SA) retrouvées en tout au moins une fois.

Plus de la moitié (56,33%) des quantifications de pesticides dans l’air en 2017 était le fait de pesticides suspectés PE selon la base TEDX ! Cela concerne 61,53% des 52 SA retrouvées en tout au moins une fois.

Analyse ‘France entière’ :

3 quantifications de pesticides dans l’air sur 10 (29,94%) dans cette analyse ‘France entière’ étaient le fait de pesticides classés CMR 1 ou 2 selon l’UE ! Cela concerne 33,65% des 104 SA retrouvées en tout au moins une fois.

Plus des 2/3 (68,86%) des quantifications de pesticides dans l’air dans cette analyse ‘France entière’ étaient le fait de pesticides suspectés PE selon la base TEDX ! Cela concerne 66,34% des 104 SA retrouvées en tout au moins une fois.

« Ces résultats témoignent du fait que l’air est une voie d’exposition réelle des populations à des pesticides PE et/ou CMR. Ceci est particulièrement préoccupant pour les groupes vulnérables que sont les riverains des zones cultivées, particulièrement exposés. La présence fréquente de substances actives PE parmi les résidus de pesticides quantifiés dans l’air est particulièrement préoccupante car pour ces substances c’est plus la période d’exposition qui fait le risque que le niveau d’exposition, et donc même des quantités faibles de pesticides PE dans l’air peuvent avoir potentiellement des effets néfastes si l’exposition a lieu à des périodes spécifiques de la vie (fenêtres de sensibilité). » Déclare François Veillerette, directeur de Générations Futures.

« Nous attendons donc des pouvoirs publics qu’ils prennent rapidement les mesures[6] qui s’imposent : réduire rapidement l’utilisation des pesticides en agriculture dans une optique de sortie de l’utilisation des pesticides de synthèse à termes comme le demande l’Initiative Citoyenne Européenne en cours, soutenue par plus de 100 ONG européennes[7] ou l’Appel des coquelicots en France ; accélérer le retrait des substances CMR et PE reconnues mais également suspectées, mieux informer et protéger les populations les plus exposées en milieu rural en introduisant des zones tampons réellement protectrices d’au moins 100 m. A l’heure actuelle, les mesures proposées par le Gouvernement ne permettent pas de protéger les populations et les milieux, c’est d’ailleurs pour cette raison que notre ONG, avec une collectif d’autres organisations, déposera prochainement un recours juridique devant le Conseil d’Etat. » conclut-il.

NOTES

[1] Les limites de ces données sont présentées dans le rapport complet

[2] Nous avons également repéré les pesticides non autorisés au sein de l’UE en 2020. Il conviendra d’être prudent avec cette donnée car, bien qu’interdits aujourd’hui, certains des pesticides étaient peut-être autorisés au moment des relevés effectués par les AASQA et d’autres, par leur présence et leur interdiction ancienne, peuvent témoigner d’une forte persistance dans l’environnement, ce peut être le cas du Lindane par exemple.

[3] https://ec.europa.eu/food/plant/pes...

[4] https://endocrinedisruption.org/

[5] Résultats complets disponibles dans notre rapport : Rapport Pesticides dans l’Air – EXPPERT 11

[6] Vous trouverez le détail de nos demandes dans le rapport complet

[7] https://www.savebeesandfarmers.eu/fra/


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