Grève des enseignants Le Perou au bord de l’explosion sociale : 3 morts, 160 arrestations

lundi 16 juillet 2007.
 

Après une semaine de protestations sociales, le président Garcia a ordonné à la police d’occuper les rues de Lima et à l’armée de surveiller des installations. Il a accusé les "communistes" d’être responsables de la grève et a ordonné d’emprisonner les syndicalistes.

Après les protestations populaires de mercredi dernier contre son gouvernement qui ont paralysé la plus grande partie du pays et ont fait trembler le régime, le président Alan Garcia a durci la répression et a tendu encore plus la corde de la crise sociale. Plus de 150 manifestants antigouvernementaux ont été arrêtés dans tout le pays et le gouvernement a ordonné la capture des dirigeants du syndicat des maîtres, en grève depuis huit jours. La grève des maîtres publics a enclenché les protestations de la semaine dernière qui se sont soldées par trois morts.

Entre jeudi et vendredi, les principaux dirigeants du Syndicat Unique des Travailleurs de l’Education Péruvienne (Sutep) ont été arrêtés par la police. Avant les arrestations, la police avait violemment réprimé les marches de protestation.

Vendredi les principales rues de Lima ont été fortement gardées par des tanks et des milliers de policiers pour empêcher de nouvelles mobilisations. Les forces armées, de leur côté, défendaient les principaux locaux publics. Les dirigeants syndicaux arrêtés ont été accusés devant le ministère public d’altérer l’ordre public et d’empêcher la libre circulation avec leurs marches. L’ex-député et ex-candidat présidentiel du Parti Socialiste Javier Diez Canseco a aussi été arrêté quand il est s’est rendu dans un commissariat pour avoir des informations sur la situation des maîtres incarcérés dans ce lieu. Diez Canseco a été libéré hier mais il a été dénoncé pour une supposée agression contre un colonel de la police au moment de son arrestation, ce que nie l’ex-parlementaire et la police n’a pas pu prouver l’agression. Vendredi a aussi été libérée Robert Huaynalaya, important dirigeant du Sutep, mais il est sous le coup d’une plainte déposée par le gouvernement et se trouve en liberté conditionnelle. Au moment de l’envoi de cet article, la plupart des dirigeants syndicaux détenus était toujours emprisonné.

Tandis que les professeurs en grève exigeaient la libération de leurs dirigeants et étaient prêts au au dialogue avec le gouvernement pour lever la grève, le président Garcia est revenu à la charge contre les grévistes. "C’est le communisme qui se refuse à mourir et qui est toujours derrière toutes ces choses. Répression (main dure) pour ces gens. C’est ce que veut le peuple", a menacé Garcia, qui semble avoir oublié qu’en 2004 il a participé, au côté des dirigeants syndicaux que maintenant il attaque, à des protestations similaires, bien que de moindre ampleur, contre le gouvernement d’Alejandro Toledo. Les mots durs de García en annonçant "main dure" pour apaiser les revendications sociales ont été bien accueillis par les entrepreneurs, la droite et le fujimorisme. De l’autre côté, Mario Huaman, président de la Centrale Générale des Travailleurs du Pérou (CGTP), a dénoncé que le gouvernement de Garcia "se comporte comme la dictature fujimoriste".

Bien que le gouvernement insiste sur sa stratégie d’accuser des "petits groupes radicaux" d’être responsables des protestations sociales, l’amplitude de celles-ci ne laisse pas de doutes sur le vaste soutien qu’ont eu les manifestations antigouvernementales, ce qui reflète le croissant mécontent envers un président qui est arrivé au pouvoir en offrant de changer la politique néolibérale et de restituer les droits du travail et qui, une fois en place, a oublié ses promesses. Le résultat est une chute spectaculaire de sa popularité Selon un sondage de l’Institut d’Opinion publique de l’Université Catholique, publié hier, le niveau d’approbation de la gestion de Garcia est descendu à 35 pour cent. Il y a un an, le président péruvien a commencé sa gestion avec une approbation proche des 70 pour cent. Le mécontentement le plus fort envers le gouvernement a cours dans l’intérieur du pays : dans la zone de l’orient l’approbation présidentielle arrive à peine à 11 pour cent, dans le centre andin elle est de 13 pour cent et dans le sud de 17 pour cent. Lima continue d’être le lieu où le gouvernement est le mieux coté, avec 45 pour cent de soutien, bien que ce chiffre soit beaucoup plus faible que les 64 pour cent de mars dernier. "Ce rejet de la gestion du gouvernement s’explique parce que l’on exclut les majorités de l’actuelle prospérité économique que le gouvernement nous rappelle tous les jours, et cette exclusion est plus grande à l’intérieur du pays", a souligné à Página/12 Fernando Tuesta, directeur de l’Institut d’Opinion Publique de l’Université Catholique.

Carlos Noriega, Pagina/12, 14 juillet 2007.


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