Les « blacklistées » du « Grenelle des violences conjugales »

dimanche 15 septembre 2019.
 

TEXTE COLLECTIF DES « BLACKLISTÉES » À LA VEILLE DU GRENELLE DES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES.

On ne peut pas dire que nous étions confiantes, non. Mais nous pensions que la raison allait prévaloir. Que face à l’augmentation croissante catastrophique des féminicides la Grande Cause Nationale allait enfin triompher. Que les solutions que les féministes qui travaillent depuis 50 ans pour certaines d’entre elles auprès des femmes victimes de violences remplissant ainsi des missions de service public seraient adoptées. Que toutes les compétences seraient mises à contribution.

Et bien, non, nous nous sommes trompées, d’autres considérations l’ont visiblement emporté. Ont été évoqués la nécessité d’être subventionnées, le fait d’être constituées en association loi de 1901, l’exiguïté des locaux de Matignon alors qu’un mail d’inscription a été très largement diffusé, etc. Las, en quoi ces éléments sont-ils la garantie d’une compétence dans le domaine ? Quelles sont les véritables motivations de cet écrémage ?

Comment peut-on exclure de ce Grenelle, le Collectif National pour les Droits des Femmes dont la proposition de loi-cadre contre les violences faites aux femmes a été la source d’inspiration de la loi du 9 juillet 2010 qui a créé l’ordonnance de protection et reconnu les violences psychologiques au sein du couple ? Comment peut-on exclure de ce Grenelle Abandon de Famille alors que ce collectif est spécialiste des violences économiques au sein de la famille ? Comment peut-on exclure de ce Grenelle Osez le Féminisme alors que cette association se bat depuis des années pour la reconnaissance du terme de féminicide ? Comment peut-on exclure de ce Grenelle les Maisons des Femmes de Paris et de Montreuil qui reçoivent des journées entières des femmes victimes de violences ?Comment peut-on exclure de ce Grenelle la CIMADE qui apporte une aide si considérable aux réfugiées et aux migrantes, victimes de violences ?

Des comités d’expert-e-s vont travailler du 3 septembre au 25 novembre, journée internationale de luttes contre les violences faites aux femmes. Mais ces structures ne sont-elles pas expertes ?

On a parlé aussi de « consultation citoyenne ». Auprès de combien de citoyen-ne-s ? 80 ? Même l’ensemble des familles de victimes qui ont fait le déplacement à Paris pour l’ouverture du Grenelle ne seront pas admises !

Abordons maintenant brièvement certains problèmes de fond. On ne fera pas reculer les féminicides en posant un emplâtre sur une jambe de bois. Créer la possibilité d’un bracelet électronique ou donner un million d’euros aux associations locales de terrain (en oubliant au passage La Réunion dans l’expérimentation, 2e département où il y a le plus de féminicides ) n’y suffira pas. Il faudra jouer sur plusieurs plans : faire appliquer strictement ce qui existe, notamment l’article 15-3 du code de procédure pénale qui oblige les officiers et agents de police judiciaire à recevoir les plaintes mais aussi avancer dans tous les domaines à la fois : éducation à l’école, sensibilisation du public, formation des professionnel-le-s,hébergement des victimes, santé et solidarité auprès des victimes, conséquences des violences au travail, « traitement » des plaintes par les professionnel-le-s de justice, répression des agresseurs, « prise en charge » des agresseurs, etc. Plus le milliard nécessaire pour assurer la mise en œuvre.

Ce n’est qu’à ce prix que nous avancerons de façon significative pour éradiquer ces violences, mâles affirmations de la domination patriarcale.

Agsous Zahra, Maison des Femmes de Paris

Lamy Stéphanie, Collectif Abandon de Famille,

Leclerc Anne, militante féministe,

Leleux Anaïs, militante féministe,

Nogueira Céline, militante féministe,

Piques Céline, Osez le Féminisme

Rojtman Suzy, Collectif National pour les Droits des Femmes

Gwénola Sueur, Réseau International des Mères


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