Jean-Michel Blanquer pris en flagrant délit d’islamophobie d’Etat

vendredi 6 septembre 2019.
 

Dans une interview sur France Culture du 31 août, Blanquer a déclaré : « Il y a plus de filles que de garçons qui ne vont pas à l’école maternelle pour des raisons sociétales. Et appelons un chat un chat, le fondamentalisme islamiste dans certains territoires a fait que certaines petites filles vont à l’école le plus tard possible. »

Si la première partie de son argumentaire est fausse – si l’on en croit les statistiques mêmes du ministère de l’Education nationale, qui affirme au contraire qu’il y aurait un tout petit peu plus de filles scolarisées à l’école maternelle, la seconde affirmation interpelle. Étonne. Agace aussi. Au point que le cabinet du ministre a été obligé de confirmer les « quelques imprécisions » de son patron.

En réalité, le ministre favori de l’exécutif s’est livré à ce que sans doute il croit être une vérité, peut-être même admettrait-il qu’il ne s’agit que d’un ressenti. Et c’est bien le problème. Parce que s’il dit vouloir appeler un chat un chat, Blanquer n’ose que timidement avouer ce qu’il pense tout bas. Au plus profond de lui-même. Quels sont donc ces « certains territoires » sous l’emprise du « fondamentalisme islamiste » qui empêcheraient les jeunes filles d’aller à l’école ? Cela va sans dire : les quartiers populaires. Parce que dans la tête de Blanquer, ça va très vite : quartier populaire = islam = fondamentalisme islamiste. Au-delà des préjugés et des stigmates que le ministre contribue à diffuser sur une chaîne du service public, il est impossible d’affirmer pareille information, ne serait-ce que parce qu’il est interdit d’établir des statistiques sur la base des origines ethniques ou des confessions.

L’école est en feu, Blanquer allume un contre-feu Parce qu’il est plus facile de mettre la lumière sur des cas particuliers – qui sans doute existent de manière très marginales – que de répondre au malaise et à la grogne montante de la communauté éducative. Parce qu’il est aussi plus facile de pointer la responsabilité sur une poignée de familles radicalisées, que d’assumer la responsabilité du gouvernement face à la déscolarisation de ces dizaines d’enfants syriens, expulsés de leur logement de Saint-Denis la semaine dernière avec leur famille. Quelle rentrée scolaire pour ces enfants ? Combien d’autres enfants sans papiers ne pourront pas bénéficier d’une rentrée scolaire ? De ça, le ministre de l’Education nationale devrait se préoccuper. Ou d’assumer que 257 enfants en situation de handicap, dans la Drôme, ne pourront pas faire leur rentrée scolaire faute de moyens suffisants.

L’annonce du coup de pouce de 300€ aux enseignants – mesure qui avait été prise sous le quinquennat de François Hollande – devait permettre au ministre de respirer après une fin d’année scolaire marquée par une mobilisation exceptionnelle de l’ensemble de la communauté éducative. La réforme du BAC, l’appauvrissement des filières technologiques et professionnelles, les surcharges de classe, ou même l’obligation de la scolarisation dès trois ans – qui « ouvre un énorme marché à l’éducation privée et aux pédagogiques alternatives marchandes » comme le rappelait Marine Roussillon dans La Midinale. De quoi maintenir la pression sur le gouvernement en cette rentrée scolaire chargée, après le succès des universités d’été des enseignants et de l’éducation mobilisée contre les réformes Blanquer. Avec les enseignants, les personnels de l’éducation, les parents d’élèves, les élèves et les élus locaux, ça fait beaucoup de monde à quelques mois seulement des élections municipales…

Cette rentrée scolaire est l’occasion de lire Ecole, le nouvel ouvrage de Laurence De Cock publié chez Anamosa et qui sera demain mardi 3 septembre, l’invitée de La Midinale.

Pierre Jacquemain


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