Hypermarchés. Une hémorragie salariale massive chez Carrefour

mercredi 3 avril 2019.
 

1 229 suppressions de postes ont été annoncées hier lors d’un comité central d’entreprise du géant du commerce. Une déflagration qui s’opérera sans plan social.

Un coup de massue. Mercredi, lors d’un comité central d’entreprise (CCE), la direction de Carrefour a annoncé pas moins de 1 229 suppressions de postes en 2019. Des déclarations s’inscrivant dans le plan de transformation des hypermarchés et prévoyant le désengagement des secteurs non alimentaires, jugés moins rentables. Les activités de bijouterie, le rayon multimédia, le service paie, le traitement des recettes, des fonctions administratives et les caisses de stations-service seront ainsi les plus touchées. L’encadrement paiera également un lourd tribut avec 521 emplois voués à disparaître. « Ces projets sont sur la table depuis dix ans, affirme Patrice Auvinet, délégué syndical d’entreprise CGT, il a fallu qu’Alexandre Bompard arrive à la tête de l’entreprise pour les concrétiser  ! Certains postes, comme les caisses des stations-service, permettaient de reclasser des travailleurs rendus handicapés par le travail, où va-t-on les mettre  ? Quant aux cadres qui partiront, ce sont des employés de niveau 5, moins bien payés, qui vont se retrouver à faire leur boulot. »

La pilule passe d’autant plus mal que le géant de la grande distribution avait déjà procédé à une taille d’ampleur l’année dernière, avec 2 000 emplois passés à la trappe via la cession ou la fermeture des ex-magasins Dia et encore 2 500 salariés licenciés au siège. Dans le même temps, Carrefour avait enregistré une hausse de 1,4 % de son chiffre d’affaires et distribué 350 millions d’euros à ses actionnaires. Sans compter que, ces cinq dernières années, il a perçu plus de 2 milliards d’euros du titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (Cice).

Expert en coupes claires, le premier employeur de France, 160 000 salariés à l’échelle du groupe et 60 000 dans les grandes surfaces, va cette fois éviter le plan social, en optant pour une rupture conventionnelle collective (RCC). Né des ordonnances Macron il y a un an tout juste, ce dispositif permet de réduire la masse salariale, sans devoir justifier de difficultés économiques. Le volontariat des salariés risque d’être tout relatif au regard de la saignée attendue. « Ils vont aller voir les gens un par un, leur mettre la pression psychologique pour qu’ils acceptent » , estime Patrice Auvinet.

Dans tous les cas, cet accord de rupture conventionnelle collective ne sera valable que s’il est signé par les syndicats représentants au moins 50 % du personnel. « Après une seule réunion, il est évident que nous ne signerons pas, prévient Gaëtan Couturier, représentant syndical CGT au CCE. Ils veulent aller vite, mettre tout ça en place en juin, et utilisent ce moyen pour réduire les coûts le plus possible. » De son côté, Michel Enguelz, délégué syndical central FO du groupe Carrefour, premier syndicat du groupe, s’est contenté d’insister sur « les moyens et les perspectives d’avenir » afin « d’obtenir les meilleures conditions de départ possibles pour les salariés concernés ».

Pourtant, avec la RCC, les personnes concernées ne bénéficieront pas des droits prévus dans le cadre d’un PSE, comme l’obligation de propositions de reclassement, ni de la possibilité d’obtenir un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) qui permet un suivi renforcé et un certain niveau d’indemnisation chômage. Et l’horizon ne va pas s’éclaircir. « La direction nous a annoncé que les suppressions d’emplois continueront en 2020 », explique Gaëtan Couturier. Avec le plan Bompard, ce sont plus de 10 000 postes qui disparaîtraient d’ici à 2022.

Cécile Rousseau


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