Ne laissons pas mourir le mouvement des gilets jaunes !

samedi 16 février 2019.
 

Sauf exception, la gauche révolutionnaire a encore brillé par son absence lors du treizième acte de l’épopée des "gilets jaunes". Il est difficile de comprendre cette réserve. Tous les "gilets jaunes" ne sont certes pas fréquentables, mais la majorité des manifestants est composée de gens du bas de l’échelle sociale qui veulent que les inégalités sociales soient au moins réduites.

Ce n’est assurément pas la révolution, mais un important mouvement contestataire. On peut même considérer que c’est le plus important depuis Mai 68. Sur quoi débouchera-t-il ? Impossible de le dire. Mais le pouvoir dans sa défense des intérêts des plus riches va devoir lâcher du lest. Pourquoi ne pas faire que ce lest soit le plus consistant possible ? Cela ne changera pas fondamentalement la société, mais fera que les inégalités seront un peu moins criantes. Compte-tenu du peu d’avancées que le mouvement social dans son ensemble a obtenu au cours des dernières décennies, ce ne serait pas négligeable, surtout pour ceux qui ont la tête sous l’eau.

Cela vaut la peine de mouiller sa chemise, d’abandonner cette attitude mi-chèvre mi-chou qui risque d’entraîner l’essoufflement du mouvement, son reflux et le renforcement du pouvoir qui s’en sortirait avec quelques faibles concessions. Pour éteindre l’incendie, le gouvernement a durci la répression et multiplié les manœuvres de diversion : organisation du "grand débat", annonce d’un référendum, préparation des élections européennes. Il a surtout profité de la léthargie de la gauche.

Le temps presse. Bientôt il sera trop tard. On pourra disserter longuement sur les raisons de l’échec final du mouvement, mais une occasion unique aura été manquée. Lors de la prochaine tentative, le pouvoir, échaudé, saura trouver la parade pour tuer dans l’œuf toute contestation.

Il est temps de prendre le relais, d’endosser son gilet rouge, non pas pour récupérer un mouvement qui n’est pas venu de la gauche et de l’extrême-gauche traditionnelles, mais d’une sphère jusqu’ici négligée et souvent même méprisée. Ce qui est important c’est de le rejoindre, l’accompagner, le renforcer, lui donner les structures qui lui font défaut, sans bien sûr le dénaturer en en faisant un parti ou quelque chose de ce genre. La révolte ne respecte pas les schémas prévus dans les manuels militants, peu importe, c’est incontestablement un mouvement fort qui va dans le bon sens : celui de la recherche de la justice sociale. Ne le laissons pas mourir.

L’histoire ne repasse pas les plats. Il est temps de se réveiller et de rejoindre ceux qui agissent. Passons résolument au rouge, au vrai. Après, il ne restera que les regrets stériles et les discussions théoriques à n’en plus finir.

Denis Langlois avocat, auteur de "Et si la révolution était possible", 2018


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