Alexandra Ocasio-Cortez : symbole du renouveau démocrate socialiste aux USA

mercredi 6 février 2019.
 

Le 3 janvier, Alexandria Ocasio-Cortez faisait son entrée au Congrès américain, devenant ainsi, à 29 ans, la plus jeune femme élue à la Chambre des représentants. Une entrée que certains ont immédiatement accompagnée de tentatives de déstabilisation. Quelques jours après la diffusion d’une vidéo sensée la décrédibiliser – mais qu’elle a su retourner à son profit –, les républicains ont diffusé une fausse photo d’elle nue.

Cette photo a été publiée par le journal The Daily Caller qui a omis de préciser dans le titre qu’il s’agissait d’un faux. « Un comportement complètement dégoûtant de la part des médias conservateurs. Pas étonnant qu’ils aient défendu Kavanaugh avec tant d’acharnement », a tweeté la nouvelle élue, faisant référence au candidat de Trump à la Cour Suprême, accusé de plusieurs agressions sexuelles. Alexandria le sait : elle sera la cible permanente des républicains comme des médias, car sa victoire de novembre dernier est un symbole fort. Celui d’un renouveau démocrate clairement marqué à gauche et porté par des voix jeunes, dynamiques, féminines et féministes, souvent issues des classes populaires et/ou des minorités.

Dès 2008, Alexandria Ocasio-Cortez a participé à la campagne de Barack Obama où elle fait un peu de démarchage téléphonique, mais c’est bien au côté de Bernie Sanders qu’elle s’engage vraiment en 2016. Pour le candidat aux primaires démocrates, elle transforme un ancien salon de beauté du Bronx en antenne de campagne, fait du porte-à-porte, rencontre des militants antiracistes, féministes, etc. Elle rejoint les Democratic Socialists of America (DSA) dont le nombre d’adhérent.e.s passe alors de 5 000 à plus de 40 000 aujourd’hui1.

« Alerte rouge »

Mais avant sa victoire éclatante dans la 14e circonscription de New York avec 78 % des suffrages exprimés, elle avait remporté de manière peut-être encore plus exemplaire la bataille des primaires démocrates, avec plus de 13 points d’avance sur Joseph Crowley, le candidat sortant. Un apparatchik « comme les autres », qui a voté en faveur de l’intervention américaine en Irak et contre les mesures de rétorsion à l’égard des banques après la crise de 2008.

« Il est temps de reconnaître que tous les démocrates ne sont pas les mêmes. Un démocrate financé par les grandes entreprises, qui ne vit pas ici, n’envoie pas ses enfants dans nos écoles [...], ce démocrate-là ne peut pas nous représenter. Ce dont le Bronx et le Queens ont vraiment besoin, c’est d’un accès aux soins médicaux, d’une éducation gratuite, d’une assurance chômage efficace et d’une meilleure justice », revendique-t-elle dans un clip de campagne enlevé. Significativement, le New York Post a titré « Alerte rouge ! » au lendemain de sa victoire face à Joe Crowley.

Le programme qu’elle défend tant dans sa campagne des primaires que dans celle contre le républicain Anthony Pappas – qui ne recueillera que 13, 8% des suffrages –, ressemble donc à celui de Bernie Sanders : assurance chômage universelle, salaire minimum fixé à 15 dollars par heure, accès aux soins pour tous, accès gratuit à l’université, fermeture des établissements pénitentiaires privés et augmentation du nombre de fonctionnaires2....

Alexandria milite également pour l’abolition de l’Agence fédérale de l’immigration (ICE) et a surtout tiré tous les leviers d’une opposition sans compromis face à Donald Trump, une opposition militante et qui n’a pas froid aux yeux. Ainsi, par exemple, elle s’est présentée le 24 juin dernier devant un centre de détention pour enfants migrants, près de la frontière mexicaine, et a interpellé, devant les caméras, les officiers de l’autre côté des grilles, visiblement embarrassés.

Victoire des Socialists

Et c’est plus globalement que les victoires des démocrates à ces élections de mi-mandat ont été marquées de manière significative par l’arrivée d’élu.e.s des DSA, comme Alexandria Ocasio-Cortez. Au total, une quarantaine de « socialistes démocrates » ont été élu.e.s à différents mandats : entre autres, Julia Salazar, élue au Sénat de l’état de New York, Elizabeth Fiedler, Summer Lee et Sara Innamorato, élues à la Chambre des représentants de Pennsylvanie, ou encore Gabriel Acevero, Vaughn Stewart et Marc Elrich, élus dans le Maryland3.

Une avancée pour les femmes

Ces élections ont été aussi marquées par une présence plus importante des femmes : 439 Américaines se sont présentées, tous postes confondus, soit deux fois plus qu’en 2016 et un tiers de plus que le précédent record de 2012. Prolongement direct des mobilisations féministes au lendemain de l’élection de Trump, cette percée a eu quelques conséquences pratiques : pour la première fois, la commission électorale fédérale (FEC) a accepté que les fonds de campagne soient utilisés pour payer les dépenses de garde d’enfants des candidates, à la demande de Liuba Grechen Shirley, qui briguait un siège à New York.

Elles sont désormais 117 – contre 107 précédemment – à siéger au Congrès américain (100 démocrates et 17 républicaines). Mais si cette arrivée importante et nouvelle dans la bataille a salutairement bousculé la vie politique américaine, cela ne doit pas masquer le fait que les femmes élues ne représentent qu’un cinquième des membres du Congrès. La route est encore longue.

Cet article de notre camarade Claude Touchefeu est à retrouver dans le numéro de janvier de Démocratie&Socialisme, la revue de la Gauche démocratique et sociale (GDS).


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