Une histoire populaire de la France !

dimanche 4 novembre 2018.
 

Depuis la rentrée, « ceux d’en bas » sont au cœur d’un livre indispensable à qui veut penser la société française de sa naissance à nos jours : Une histoire populaire de la France, éditée par Agone, maison marseillaise indépendante.

Son auteur, Gérard Noiriel, avait justement choisi les Amfis pour expliquer sa démarche et présenter cette somme de recherches, fruit d’une carrière d’historien-sociologue directeur d’études à l’EHESS.

Issu des classes populaires, il n’a jamais oublié la violence et la stigmatisation subies par les dominé·e·s. Conscient du rôle émancipateur de la connaissance, son but est de transmettre le récit historique des six derniers siècles en interpellant le lecteur sur les relations de pouvoir qui lient les hommes entre eux.

En 750 pages, le néophyte trouvera une synthèse complète de l’histoire de France qui s’attache davantage aux phénomènes collectifs qu’ aux « grands personnages » [qui] font l’histoire uniquement dans la mesure où ils saisissent les occasions qui s’offrent à eux. Ce fut le cas de Jeanne d’Arc »1. Ainsi le tableau de la nation française débute avec celle qui incarna « le peuple devenu soudain acteur de l’histoire de France. Cette paysanne fit en effet irruption dans la cour des grands au point de changer le cours de leur histoire, mais dès qu’elle devint gênante elle fut impitoyablement éliminée. »

Pour les passionné·e·s, G. Noiriel justifie les bornes chronologiques retenues, analyse l’historiographie, explicite son rôle d’intellectuel engagé, contextualise ses choix, érigeant 1980 en tournant sociétal et personnel. Exclu du PCF pour avoir témoigné des « clivages qui opposaient la base et les instances dirigeantes » dans un livre co-écrit avec un ouvrier spécialisé marocain d’une usine lorraine dont il relayait le combat, il analyse cette période cruciale durant laquelle « la gauche se replie sur la politisation des origines » au détriment de la lutte des classes.

« C’est à ce moment-là que deux grandes options s’offrirent aux universitaires désireux de jouer un rôle civique : soit participer à la gestion du pouvoir capitaliste, soit essayer d’expliquer les raisons de la colère d’un peuple sans décider à sa place. J’ai choisi la seconde option »

L’usage du « je » incite chacun·e à prendre ses responsabilités. Les chapitres sur « la fait-diversion de l’actualité » et « Nos ancêtres furent des migrants » offrent des réponses aux usurpateurs de l’histoire qui instrumentalisent cette discipline pour asséner leur idéologie identitaire.

Chantre de l’éducation populaire comme remède à l’ignorance et au racisme, cet enseignant-militant a fondé le collectif DAJA qui propose des exploitations artistiques de ce texte magistral afin de toucher tous les publics. Emparons nous de ces idées, créons pour faire revivre ces luttes progressistes et en (re)donner le goût !

Inspiré par l’œuvre d’Howard Zinn qui publia en 1980 l’Histoire populaire des Etats-Unis, G. Noiriel s’est consacré à la France... Historien·ne·s de tous pays, unissez-vous, une histoire populaire du monde est à écrire... en attendant, nous en sommes les acteurs et actrices.

Bérénice Hemmer


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