Seine-saint-denis. À Matignon, les élus exigent l’égalité

dimanche 8 juillet 2018.
 

Après un rapport accablant en mai 2018 sur le désengagement de l’État dans ce département de la banlieue parisienne, ses parlementaires ont été reçus hier par le premier ministre. Ils se félicitent de ce premier pas, mais attendent des actes.

Le rapport parlementaire était tombé comme un pavé dans la mare en mai, un mois après l’abandon en rase campagne du rapport Borloo sur la politique de la ville par le chef de l’État. Les députés LR François Cornut-Gentille et LaRem Rodrigue Kokouendo y dressaient un panorama accablant du désengagement de l’État en Seine-Saint-Denis, en conclusion de leur mission d’évaluation des politiques publiques dans ce département. Pas question pour les 18 parlementaires du territoire que le document reste lettre morte. Hier, tous (de la majorité comme de l’opposition) ont été reçus à Matignon. «  Le premier ministre nous a écoutés. Pour l’instant il n’y a pas de réponse, mais nous serons présents, toutes sensibilités confondues, pour faire grandir cette exigence d’égalité républicaine  », réagissait à la sortie la députée FI Clémentine Autain. «  L’idée, très largement répandue par les médias, une certaine élite, certains politiques, que l’on aurait donné beaucoup aux quartiers populaires, aux banlieues, pour pas grand-chose est battue en brèche par ce rapport et le premier ministre l’a confirmé  », constate Stéphane Peu, député PCF et membre de la mission d’évaluation. L’objectif  : obtenir un «  plan de rattrapage  »

Le rapport de mai avait en effet établi que les services publics, en matière d’école, de police et de justice, étaient sous-dotés par rapport à d’autres territoires, alors que les besoins y sont souvent plus importants. Un exemple  : «  La ville de Saint-Denis compte un policier pour 464 habitants, alors que le 18e arrondissement de Paris, moins criminogène, bénéficie d’un policier pour 315 habitants  », écrivent les rapporteurs. Un autre, en matière d’éducation  : « M. Benjamin Moignard, sociologue, a indiqué que le moins bien doté des établissements parisiens est mieux doté que le plus doté des établissements de la Seine-Saint-Denis  », relèvent-ils encore. Sans compter le turnover plus important des agents, leurs conditions de travail ou les non-remplacements. Dans ce contexte, le rendez-vous à Matignon avait été initié avec l’objectif d’obtenir un «  plan de rattrapage  ».

Si Édouard Philippe n’a pas annoncé de calendrier, à droite on veut voir le verre «  à moitié plein  ». À l’instar du sénateur LR Philippe Dallier, qui insiste sur la reconnaissance par le premier ministre de «  difficultés hors normes  » et de la nécessité d’« une approche globale et interministérielle  ». «  Il nous a demandé du temps pour réfléchir au process, ce sont ses termes. Il y a une prise de conscience, maintenant il faut qu’elle soit suivie d’effets  », ajoute-t-il. «  Que le premier ministre accepte de reconnaître que nous sommes mal traités, qu’un habitant de Seine-Saint-Denis n’a pas les mêmes droits qu’ailleurs, de mon point de vue cela l’oblige  », estime aussi Jean- Christophe Lagarde (UDI). Reste que les engagements en «  espèces sonnantes et trébuchantes  » ne sont pas encore sur la table («  dans les clous de l’austérité budgétaire, j’entends que la mission est extrêmement difficile  », ironise Clémentine Autain), mais les parlementaires sont décidés à poursuivre leur action commune. «  Soit le suivi ministériel se met en route et nous l’accompagnerons, soit il n’y en a pas et on se rappellera au bon souvenir du gouvernement. Il y aura des suites. Quoi qu’il arrive, on ne lâchera pas  », assure François Cornut-Gentille. À l’initiative de 15 des parlementaires du département, «  élus et forces vives  » du territoire se réuniront le 5 octobre à Bobigny autour de cette exigence d’égalité républicaine, pour l’heure encore bafouée.

Julia Hamlaoui, L’Humanité


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