Front national et Ligue de défense juive : deux extrêmes droites pour une même haine

jeudi 5 avril 2018.
 

Elle expulse Jean-Luc Mélenchon de la manifestation, mais protège Marine Le Pen… La Ligue de défense juive, au nom de la lutte contre l’islam, amalgame antisionisme et antisémitisme et cultive sa proximité avec le FN.

Il est piquant, quoique alarmant, d’entendre la quarantaine de gros bras – pour certains casqués – assurant le service « d’ordre » de la manifestation en hommage à Mireille Knoll, mercredi soir, hurler des « Collabos ! » à l’encontre des cadres de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon en tête, avant de les sortir manu militari du cortège. Car la Ligue de défense juive (LDJ), qui appliquait ainsi les consignes tacites du Crif, défendra plus tard la présence de Marine Le Pen, la présidente du Front national, et du député FN Gilbert Collard. Les défenseurs de « l’État hébreu » d’Israël et l’héritière du parti cofondé en partie par d’anciens Waffen SS et collaborateurs avec les nazis (1) main dans la main contre les islamistes ? On se pince…

La LDJ, bras armé de l’extrême droite israélienne en France, n’était pas programmée pour un compagnonnage avec le Front national. C’est l’entremise d’un homme, Jean-Claude Nataf, qui a scellé l’alliance de circonstance. Dans les années 1980, il milite au Betar, un mouvement de jeunesse sioniste, avec… Francis Kalifat, l’actuel président du Crif. Si, officiellement, le conseil et la LDJ n’ont « pas de rapports », expliquait Nataf à Libération en juillet 2014, « quand ils organisent quelque chose, nous (l’autoproclamé Service de protection de la communauté juive – NDLR) sommes sur place pour sécuriser ». Dans les années 1990, Le Pen, entre « point de détail » et rapprochement avec les pays arabes (le président du FN est reçu en pleine guerre du Golfe, en 1990, à Bagdad, par Saddam Hussein), n’a pas bonne presse chez les juifs extrémistes. Il faut attendre le début des années 2000 et l’apparent changement de logiciel frontiste, optant pour un discours anti-islam et « anti-racaille », pour que des contacts se nouent. Étonnamment, via un proche de Marine Le Pen, Philippe Péninque, un ancien du GUD vu mercredi aux côtés de Nataf. Interrogé par le Parisien après le meurtre d’un bijoutier juif à Paris en avril 2011, Nataf imaginait les juifs de France « de plus en plus pour un vote protestataire en faveur du Front national ».

Interdite aux États-Unis, mais aussi en Israël, la Ligue de défense juive sévit encore dans l’Hexagone, à l’inverse d’autres « organisations criminelles fascistes » (les Jeunesses nationalistes révolutionnaires et Troisième Voie, dissoutes en 2013), rappelait le député PCF Jean-Jacques Candelier en 2014, à l’occasion d’une violente « descente » de la LDJ contre des militants pro-Palestiniens, à Paris. Le PCF réclamait alors la « dissolution administrative » de ces « barbares dont le seul but est de créer un amalgame entre judaïsme et sionisme ». La demande, à laquelle s’est associée hier la FI, est toujours d’actualité.

Grégory Marin, L’Humanité

Note :

(1) Léon Gaultier, ancien milicien engagé dans la Waffen SS  ; Victor Barthélémy, fondateur de la Légion des volontaires français  ; François Brigneau et Roland Gaucher, miliciens, ont participé, avec Jean-Marie Le Pen, à la création du FN en 1972.


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