Marine Le Pen envisage une alliance avec Laurent Wauquiez

lundi 27 novembre 2017.
 

En proposant sur un ton ironique au probable futur président de Les Républicains de s’allier au Front national, Marine Le Pen a en fait envoyé un double message : elle a prévenu Laurent Wauquiez qu’elle lui ferait payer toutes ses incohérences, et fait savoir à son parti que le temps de Marion Maréchal-Le Pen n’était pas encore venu.

Certaines provocations ont plus de sens que d’autres. Lorsqu’elle évoque Laurent Wauquiez, ce dimanche 19 novembre sur le plateau de LCI, Marine Le Pen a beau jeu de rallier la campagne très droitière du favori à la présidence de Les Républicains (LR) : "Quand j’entends le discours de Monsieur Wauquiez aujourd’hui, je me dis : ’S’il est sincère compte tenu des propos qu’il tient, il devrait aller jusqu’à proposer une alliance’". Le probable futur chef de file de la droite s’est engagé sur l’absence totale d’alliance avec le Front national. Mais la flèche décochée par Marine Le Pen est lourde d’enjeux politiques.

La saillie est d’abord une manière de pointer les contradictions de Laurent Wauquiez. Depuis plusieurs semaines, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes multiplie les sorties très à droite, singeant voire dépassant les positions du FN : couplets outrés sur "l’assistanat", refrains enragés sur "l’immigration excessive", agrémentés de solos sur la "haine de la province" qu’entretiendrait le président Macron… Ne seraient-ce les bannières LR, il serait difficile de deviner qu’il ne concourt pas à la présidence du FN. En envisageant cette alliance, Marine Le Pen coince dans ce corner d’extrême droite : "Quand on tient des propos comme il les tient, il faut qu’il aille au bout de cette logique. Ou alors, il démontre qu’en réalité ses propos ne sont pas sincères, que ce sont des propos d’estrade, que ce sont des propos électoraux qu’il envisage de ne pas mettre en œuvre lorsqu’il sera élu à la tête des Républicains."

La tactique est habile : si Laurent Wauquiez continue sur la même ligne, il risque de se couper des centristes et des libéraux restés au sein de LR, et sa posture de refus d’alliance avec le FN paraîtra alors artificielle : "Monsieur Wauquiez ne peut pas dire la même chose que nous, parfois avec des mots plus crus que les nôtres, et en même temps expliquer que nous devrions être au ban de la vie politique française", prévient Marine Le Pen. En mettant en doute sa sincérité, la frontiste anticipe également un éventuel recentrage futur de Laurent Wauquiez, et prévient déjà qu’il faudra l’interpréter sous l’angle de la trahison et de l’inconstance. Dans les deux cas, elle condamne Laurent Wauquiez à l’incohérence.

Coucou Marion

Ce faisant, Marine Le Pen envoie aussi un message en interne à son propre camp. Relancée par les journalistes du "Grand Jury", elle considère en effet avec un grand sérieux l’hypothèse d’une alliance LR-FN, au-delà de la boutade : "Tout cela se discute. Moi j’ai toujours dit que les alliances étaient possibles si nous ne devions pas abandonner les éléments qui sont essentiels à la défense de la France et des Français. S’il en va de l’intérêt de la France et si les grands principes qui sont les nôtres sont respectés, pourquoi pas." Foin donc de l’assimilation "UMPS" dont la présidente du FN est coutumière. Désormais, Marine Le Pen envisage très clairement une stratégie d’union des droites, allant même jusqu’à placer les municipales de 2020 comme échéance possible : "On peut envisager, dans des élections municipales, trouver des terrains d’entente", admet-elle, constatant "des intérêts et des préoccupations" communs aux électorats de LR et du FN.

Cette alliance entre le FN et l’aile la plus à droite de LR, c’était précisément la stratégie défendue par Marion Maréchal-Le Pen, avant que celle-ci ne se retire de la vie politique mais qui, pour beaucoup de frontistes, reste l’avenir du FN. Certains quittent d’ailleurs le parti pour préparer le terrain d’un éventuel retour de la nièce. En envisageant la possibilité d’un rapprochement avec Laurent Wauquiez, "Marine" coupe l’herbe sous leurs pieds et fait passer le message : elle aussi peut être le moteur d’une union des droites. En restant inflexible sur la ligne : ce n’est pas elle qui rallierait le parti adverse mais Laurent Wauquiez qui devrait faire le chemin inverse car "il s’est trompé pendant des années".

Par Hadrien Mathoux


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