100 milliards de profits pour les 40 sociétés du CAC40 en 2017 ?

dimanche 29 octobre 2017.
 

Avec 52 milliards au premier semestre, en hausse de 26,5 %, les bénéfices des 40 principales sociétés cotées ne se sont jamais mieux portés. De quoi contredire l’argumentaire sur la casse du Code du travail menée au nom de «  l’emploi  ».

Le «  coût du travail  » et les «  rigidités  » du marché du travail seraient la cause du chômage en France  ? Mieux que des discours, les résultats du CAC 40 au premier semestre apportent un éclairage utile sur la question. Avec 52 milliards d’euros engrangés depuis janvier, en hausse de 26,5 % par rapport au premier semestre de l’année dernière, les bénéfices des 40 principales sociétés cotées ne se sont jamais mieux portés. À tel point qu’ils sont en passe d’exploser le sommet de 2007, année de tous les records pour les profits, quand 95 milliards étaient entrés dans les caisses avant que la crise financière ne vienne sonner la fin de la fête… momentanément. Sur sa lancée, le résultat net des groupes pourrait crever le plafond des 100 milliards d’euros en 2017, un niveau jamais égalé, avec une croissance au bout de l’année visant les 30 %, comme en 2016 (+ 32 %).

D’ores et déjà, les grands groupes ont accumulé en six mois un trésor équivalant à plus de deux tiers de la totalité de leurs profits de l’an dernier. La recette de ces entreprises pour renouer avec l’euphorie des années 2000  : une politique de restructuration et de réduction des coûts, notamment salariaux, mise en œuvre durant la crise et qui leur a permis, une fois la conjoncture redevenue plus favorable, de renouer avec des profits historiques progressant beaucoup plus rapidement que leur chiffre d’affaires (+ 6,9 %). En d’autres termes, de faire de l’argent sur le dos de l’emploi, avec un taux de marge en hausse d’un point en un an, à 12,5 % en moyenne, contre 11,4 % un an plus tôt.

Le poids des banques demeure prédominant

Dans le détail, on observe une augmentation des bénéfices pour les trois quarts des sociétés du CAC 40, dont certaines affichent des taux de progression à trois chiffres, loin, très loin de la croissance de l’économie française (0,5 % au premier trimestre comme au deuxième trimestre). C’est le cas d’ArcelorMittal (+ 234 %, 8e avec 2,07 milliards d’euros de bénéfices) et surtout de Sanofi qui, en triplant ses profits (+ 200 %, 6,7 milliards d’euros), vole la tête du classement du semestre à Total, pourtant en bonne forme (+ 32,3 %, 2e avec 4,35 milliards). Parmi les autres stars du top 10 des superprofits, Renault et le Crédit agricole (+ 58,5 % chacun, respectivement 5e avec 2,4 milliards et 6e avec 2,2 milliards), LVMH (+ 23,8 %, 7e, 2,1 milliards) et L’Oréal (+ 37,7 %, 9e, 2 milliards) affichent aussi de belles progressions, tandis que BNP Paribas (– 1,9 %, 3e, 4,3 milliards) et Axa (+ 1,9 %, 4e, 3,3 milliards) sont quasi stables. Seule la Société générale affiche un fort recul de ses bénéfices (– 24,3 %, 10e, 1,8 milliard). Hors le Crédit agricole, ce n’est d’ailleurs pas le secteur financier qui tire la croissance des bénéfices du CAC 40. Bien que le poids des banques demeure prédominant avec 11 milliards d’euros au premier semestre, ce sont les sociétés non financières qui caracolent à + 32,8 % de profits en moyenne, soit 6 points de plus que le CAC 40 dans son ensemble.

« Quand on écoute les patrons du CAC 40, on entend les mots  : très bon premier semestre, chiffres records, carnet de commandes en hausse, confie un expert au journal les Échos. Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas vu un tel enthousiasme.  » De quoi contredire l’argumentaire du premier ministre qui prétend, dans le Journal du dimanche, qu’il n’y aurait d’autre voie pour «  attaquer le chômage  » que l’octroi de «  plus de souplesse au droit du travail  » – en réalité, la casse des droits collectifs des travailleurs par ordonnances – et la baisse du «  coût du travail  » par la «  baisse des cotisations  ». Car la fragilisation des salariés dans le rapport de forces face aux employeurs d’un côté, et la baisse de leur salaire brut par l’amputation des cotisations de l’autre, vont peser encore davantage sur le niveau global des salaires, favorisant la captation d’une part toujours plus grande des richesses par le capital. Au contraire, des économistes comme Nasser Mansouri-Guilani, syndicaliste à la CGT, plaident pour une définanciarisation de l’économie. Cela passe, selon le responsable syndical, non seulement par la fin des politiques de «  déflation salariale  », c’est-à-dire par l’augmentation des salaires, mais aussi par le réinvestissement de l’argent détourné par la finance dans les capacités de production.

Sébastien Crépel, L’Humanité


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