Les États-Unis se retirent de l’accord de Paris malgré l’urgence climatique

dimanche 4 juin 2017.
 

B) Les Etats-Unis dénoncent l’accord de Paris sur le climat : Trump joue son va-tout national-populiste. What did you expect ? (Alencontre)

Les Etats-Unis dénoncent l’accord de Paris sur le climat, annulent toutes les mesures décidées par les Etats-Unis en application de cet accord et se retirent du Fonds Vert pour le Climat. Telles sont les décisions majeures que Donald Trump a finalement annoncées, jeudi 1 juin, après un long suspense.

Ces décisions sont dans le droit fil des promesses que le nouveau Président avait faites durant sa campagne électorale. Au cours des derniers mois, certains observateurs avaient voulu croire que Trump ferait entendre une autre musique, mais il n’en a rien été. Au contraire, l’allocution qu’il a prononcée dans le Jardin des Roses de la Maison-Blanche dégoulinait d’une inquiétante démagogie nationaliste et populiste. What did you expect ? comme dit la publicité…

Victimisation et nationalisme

Pour Trump, l’accord de Paris n’était rien d’autre qu’un scandaleux marché de dupes imposé aux USA. « L’accord de Paris ne porte pas sur le climat, a-t-il dit, il porte sur l’avantage financier que d’autres pays obtiennent par rapport aux États-Unis. Le reste du monde a applaudi lorsque nous avons signé l’accord. Ils étaient heureux, pour la simple raison que nous souffrons d’un très très grand désavantage économique ».

Brossant un tableau apocalyptique des conséquences de l’accord, le Président a affirmé que celui-ci entraînerait la perte de 2,7 millions d’emplois, coûterait 3.000 milliards de dollars aux USA et entraînerait pour les citoyens étasuniens une perte de pouvoir d’achat allant jusqu’à 7000 dollars/an. Il a égrené les chiffres des réductions d’activité qui frapperaient les secteurs industriels : « -86% dans le secteur du charbon », a-t-il dit… en omettant évidemment de mentionner que le solaire donne déjà de l’emploi à 800.000 travailleur-euse-s US (contre 67.000 dans le charbon) et crée plus d’emplois que le secteur charbonnier n’en perd.

Pour Trump, c’est simple : les pauvres étasuniens, trop honnêtes, sont victime d’une énorme injustice ourdie par une méchante machination de tous les autres pays. La dénonciation de l’accord est dès lors un sursaut élémentaire de souveraineté et de dignité nationale : « Les chefs d’Etat de l’Europe et de Chine ne devraient pas avoir plus à dire sur la politique des Etats-Unis que les citoyens américains. Nous ne voulons pas être la risée du monde. Nous ne le serons pas ».

Démagogie populiste et sécuritaire

Retrouvant le ton de ses meetings électoraux, Trump a misé à fond et tout au long de son discours sur la démagogie sociale. Comme si son gouvernement de milliardaires avait pour but de donner un emploi digne et un revenu décent aux travailleur-euse-s de Detroit et de Pittsburgh, comme si l’accord de Paris prenait l’argent et l’emploi des ouvriers étasuniens pour les distribuer à d’autres.

« L’accord de Paris est injuste pour les USA. Il bloque le développement du charbon propre (aux Etats-Unis). La Chine peut construire des centaines de centrales au charbon, l’Inde peut doubler sa production de charbon, même l’Europe peut construire des centrales au charbon ». « Nous avons les réserves d’énergie suffisantes pour sortir de la misère tous les citoyens US, une mine va rouvrir en Pennsylvanie », a-t-il dit ; mais, à cause de l’accord de Paris, « des millions de familles américaines vont rester dans la pauvreté ».

L’axe de cette propagande, c’est l’emploi. Pour Trump, en bon capitaliste, l’emploi dépend évidemment de la croissance : les renouvelables pourraient suffire en cas de croissance molle, dit-il, mais pas dans l’hypothèse d’une croissance de 3 à 4%. Or, c’est ça que Trump fait miroiter avec son slogan « Make America great again » : une Amérique qui crée des jobs en construisant des murs et en fabriquant des armes. “Pour cela, nous avons besoin de toutes les énergies, pas seulement des renouvelables”, dit-il. « Sinon, il y aura un énorme risque de pannes de courants pour des millions de familles ».

Tant qu’à faire dans la démagogie populiste, autant y aller plein pot en invoquant aussi la lutte contre le terrorisme. Trump ne s’en est pas privé : « Un milliard de dollars a déjà été versé au Fonds Vert pour le climat par les USA, y compris avec de l’argent qui était destiné à la lutte contre le terrorisme – pas par moi, par mon prédécesseur », a-t-il lâché.

Pas loin d’un appel à la haine

Trump n’a que faire ni du principe des responsabilités différenciées – qui est au cœur de la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique – ni du fait que les Etats-Unis restent dans le peloton de tête des pays qui émettent le plus de gaz à effet de serre par habitant – très loin devant la Chine, l’Inde, le Brésil. Balayant tout cela d’un revers de main nationaliste, il déclare que, dans le cadre de l’accord de Paris, « la Chine peut continuer à faire ce qu’elle veut pendant 13 ans, (tandis que) l’Inde participe à l’accord à condition de recevoir des milliards d’aide ».

Parlant du Fonds Vert pour le Climat (décidé à la COP de Cancun pour aider les pays du Sud dans la transition et l’adaptation), le Président n’a pas craint d’affirmer que ce Fonds avait pour but de « s’emparer de la richesse des USA pour la redistribuer aux pays en voie de développement ». Et d’ajouter : « Nous avons 20.000 milliards de dettes, des millions de travailleurs sans emploi, des villes n’ont pas d’argent pour embaucher dans la police. Cet argent devrait être investi ici, et pas envoyé à des pays qui nous ont saisi nos usines et nos emplois ». On n’est pas loin d’un appel à la haine, là. Une haine impérialiste, pour détourner les travailleur-euse-s US des patrons US qui ont délocalisé leur production dans les pays à bas salaire.

Une différence de 0,2°C ?

Sur le climat proprement dit, le locataire de la Maison-Blanche n’a pas dit grand’ chose. Notons toutefois cette affirmation péremptoire extraordinaire : « l’accord de Paris ne ferait une différence que de 0,2°C ». A quelle échéance ? Par rapport à quelle baseline ? Mystère.

Nous avons assez répété ici que l’accord de Paris n’est qu’une déclaration d’intentions. Mais c’est une déclaration d’intention qui a au moins l’avantage – c’est le seul – de fixer un objectif : « rester bien au-dessous de 2°C, et continuer les efforts pour ne pas dépasser 1,5°C ». Les contributions nationales à cet objectif nous mettent sur la voie d’un réchauffement de 3 à 4°C d’ici la fin du siècle. Mais ne rien faire pourrait faire grimper le mercure jusqu’à 6°C. Or, ne rien faire est précisément ce que les Etats-Unis viennent de décider. Cela implique une différence bien supérieure à 0,2°C !

Renégocier ? Mon œil…

En même temps qu’il répétait inlassablement sa dénonciation de l’accord conclu à la COP21, Trump a déclaré qu’il était prêt à négocier la réadhésion des Etats-Unis à ce texte, ou à négocier un accord « entièrement nouveau », à condition qu’il ne nuise pas à l’Amérique et à ses citoyens. On se demande quelle est la cohérence de cette proposition, venant d’un individu qui affirme que le changement climatique est un hoax créé par les Chinois pour nuire à l’économie américaine…

De toute manière, la violence des propos de Trump ne laisse guère de crédibilité à cette proposition de renégocier. Outre les pays « émergents » et les pays « en voie de développement », le troll de la Maison Blanche s’en est en effet pris directement à ses partenaires européens : « Ceux qui demandent aux USA de rester dans l’accord sont des pays qui coûtent cher aux USA par leurs pratiques commerciales et ne versent pas leur contribution à l’alliance militaire ». C’est Merkel qui est visée. Le torchon brûle vraiment entre Washington et Berlin.

Comment faut-il interpréter tout cela ? Une analyse est nécessaire à plusieurs niveaux, et il faudra y revenir : ceci n’est qu’une première réaction à chaud.

La fuite en avant d’un troll blessé

Sur le plan de la politique intérieure US, la dénonciation de l’accord donne l’impression d’une fuite en avant de Trump pour tenter de se sortir d’une situation de plus en plus précaire, où des voix de plus en plus nombreuses se font entendre en faveur d’une procédure d’empeachment.

Trump était face à un choix difficile. S’il restait dans l’accord, il se « normalisait » (un peu) en tant que Président « responsable », répondait positivement aux souhaits majoritaire des milieux d’affaire (y compris ExxonMobil et autres groupes énergétiques !) et rassurait l’opinion publique US (elle est en majorité convaincue et inquiète de la réalité du changement climatique). Mais s’il se « normalisait », justement, il tournait le dos à sa base militante, populiste et réactionnaire, et perdait un atout important parmi les élus du Parti Républicain, qui sont très loin de le soutenir unanimement, mais sont en majorité climato-négationnistes.

Précisément parce qu’il est fragilisé, Trump a choisi de satisfaire sa base – représentée au sein de son équipe par Bannon, Pence, Pruitt, Session et quelques autres. Mike Pence – qui a introduit son allocution – et Scott Pruitt – qui l’a commentée – ont tous deux insisté lourdement sur cet aspect : le Président fait ce qu’il a dit. (Pruitt – qui a vraiment l’air d’un larbin cireur de pompes de son maître- en a par ailleurs rajouté dans le populisme, parlant de « classe ouvrière », et saluant Trump comme « le champion des oublié-e-s de ce pays » !).

Ce choix en faveur de sa base était sans doute le moins mauvais possible pour Trump, à court terme. Mais, à moyen terme, en se recentrant sur son « core business » national-populiste, le Président pourrait rapprocher le moment où les cercles dominants du grand capital et leurs représentants politiques décideront de se débarrasser de lui. On en saura plus dans les prochains jours, notamment avec l’audition de l’ex-président du FBI, Comey, à la commission du Sénat sur le renseignement.

Bien mesurer l’impact climatique

Sur le plan de l’impact climatique, le retrait des USA est grave, mais ne doit pas être dramatisé. Le fond de l’affaire, en effet, est que l’accord de Paris ne permet absolument pas d’éviter la catastrophe. Cela ne signifie pas que sa dénonciation est sans importance, cela signifie la capacité de nuisance de Trump doit être appréciée à sa juste mesure… Sans tomber dans le soutien à l’accord de Paris ainsi qu’à ses partisans européens, chinois, ou autres, qui se donnent le beau rôle à bon marché alors qu’ils contribuent allègrement à la catastrophe climatique.

Infographie présentant l’impact du fait que les USA rejoignent le Nicaragua et la Syrie, les deux seuls pays qui n’ont pas ratifié l’accord de Paris

Les émissions US représentent 10% des émissions mondiales. Décidée sous Obama, la contribution nationale (NDC) des Etats-Unis visait à les réduire de 26 à 28% en 2025, par rapport à 2005. Cela représente un effort à peine supérieur à celui que les USA auraient dû avoir réalisé au plus tard en 2012, s’ils avaient ratifié Kyoto. De plus, les mesures prises par Obama ne couvraient l’objectif qu’à 83%.

Ce n’est pas tout. Cet effort n’en était en réalité pas un : il correspondait quasi-complètement à la réduction « spontanée » d’émissions découlant du fait que les groupes énergétiques étasuniens désinvestissent du charbon au profit du gaz de schiste – qui est à la fois moins polluant et moins cher – et des renouvelables. La suppression du Clean power plan et des autres mesures d’Obama est plus grave que la dénonciation de l’accord, mais n’arrêtera pas le mouvement du capital.

Danger de dérapage géostratégique

C’est sur le plan géostratégique que l’essentiel semble se jouer. La communication de Trump sur le climat confirme en effet qu’un engrenage est en mouvement. La crise entre l’Union Européenne et les USA s’aiguise, et le ton monte entre les concurrents. Un vaste réalignement des forces impérialistes, incluant l’éclatement de l’OTAN, une réforme/militarisation de l’UE, et un rapprochement Chine-UE n’est plus tout à fait un scénario de science-fiction.

Les cercles dominants du grand capital international ne veulent pas de ce scénario mais, comme nous l’avons noté dans notre article sur « La place du Trumpisme dans l’histoire » [1], certains éléments font que la situation pourrait échapper au contrôle des protagonistes. Un de ces éléments est de toute évidence la politique de Trump lui-même.

Ici, il faut insister sur le fait que cette politique n’est pas dictée simplement et mécaniquement par la bourgeoisie (des centaines de dirigeants de grandes entreprises US ont pressé Trump de rester dans l’accord, y compris des dirigeants du secteur énergétique), ni même par tel ou tel secteur de la classe capitaliste. Il y a au contraire double autonomie relative, qui s’affirme surtout dans les contextes de crise politique : autonomie de la sphère politique par rapport à la sphère économique, et de l’individu (Trump avec sa garde rapprochée) par rapport à la sphère politique bourgeoise dans son ensemble.

En d’autres termes : la fuite en avant que Trump fait sur le climat – parce qu’il est fragilisé par l’enquête sur ses liens avec la Russie – pourrait se prolonger sur d’autres terrains, y compris militaires. Cela pourrait alors avoir les plus graves conséquences… et ramener ipso facto la lutte pour le climat au Xe rang des préoccupations. Pour tous les protagonistes, alors même que l’urgence est vraiment maximale.

Que faire ? Que dire ?

Ce n’est pas le moment de se tromper d’objectif…

Il faut évidemment dénoncer la politique de Trump, mais exiger que les USA restent dans l’accord de Paris n’a guère de sens. Négocier des concessions pour qu’ils y restent serait inacceptable. Qu’ils en sortent plutôt : cela isolera Trump au maximum, encouragera les luttes des mouvements sociaux aux USA contre sa politique, et l’empêchera de répandre ses fadaises climato-négationnistes dans l’arène internationale.

Les objectifs de réduction des émissions des gouvernements qui s’indignent du retrait US doivent être augmentés radicalement, pour combler ce retrait mais aussi pour combler le fossé entre l’objectif de 1,5°C maximum, d’une part, et les contributions nationales de ces Etats, d’autre part. Ils doivent l’être dans la justice sociale et la justice Nord-Sud, ce qui implique des mesures anticapitalistes radicales, au lieu des « droits de polluer » et autres « mécanismes de marché ».

Aucun soutien à l’accord de Paris, aucun soutien à l’axe Chine-Union Européenne. Ce que l’affaire Trump prouve en dernière instance, c’est qu’une réponse à la hauteur du défi climatique n’est pas possible en respectant les lois d’un capitalisme assoiffé de croissance/de profit et d’une politique néolibérale qui sème le chômage, la misère et les inégalités. La défense du climat passe par la lutte des mouvements sociaux et la convergence des luttes. Il s’agit de relancer un mouvement mondial en faveur de la justice climatique.

Assez de tour de passe-passe et de demi-mesures : respect inconditionnel des engagements du Fonds Vert pour le climat ; halte aux grands travaux d’infrastructures fossiles ; suppression des productions inutiles, nuisibles (armes !), et à obsolescence programmée ; socialisation de l’énergie, du crédit et de l’eau ; soutien à une agriculture écologique de proximité et souveraineté alimentaire ; réduction radicale du temps de travail, sans perte de salaire ; développement du secteur public sous contrôle des usagers dans les domaines du transport et de l’isolation-rénovation… Seules des revendications de ce genre ouvrent une issue à la hauteur de l’urgence et de la gravité de la double crise sociale et écologique.

Daniel Tanuro, le 1er juin 2017

Source : http://www.lcr-lagauche.org/climat-...

A) Les États-Unis se retirent de l’accord de Paris malgré l’urgence climatique (La Croix)

Source : http://www.la-croix.com/Sciences-et...

Le président américain Donald Trump a annoncé le retrait des États-Unis de l’accord de Paris, engagement international de lutte contre le réchauffement climatique, jeudi 1er juin. D’après l’Organisation météorologique mondiale, 2016 fut l’année la plus chaude jamais enregistrée.

En février dernier, une très grave sécheresse frappe la Somalie, trois millions de personnes sont menacées de famine. Le président Mohamed Abdullahi Mohamed parle de « catastrophe nationale » et appelle à l’aide la communauté internationale. Au même moment, à des milliers de kilomètres, le nord-est brésilien se débat lui aussi ; la région connaît alors la pire sécheresse depuis un siècle, l’acheminement de l’eau devenant un casse-tête pour les autorités. Nigeria, Soudan du Sud, Yémen, Chine, depuis le début de l’année, on ne compte plus les pays du monde frappés par des phénomènes extrêmes, sécheresses aiguës, mais aussi pluies torrentielles, tempêtes ou submersions marines.

Si le réchauffement climatique n’est pas seul en cause, il concourt à ces catastrophes, en augmentant la probabilité qu’elles surviennent. Les scientifiques sont donc inquiets, mais pas surpris. Dès les années 1970, les premières études sur le climat – avant même la création du Giec, groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, en 1988 – annoncent les phénomènes que nous ne cessons plus d’observer : fonte des glaces, réchauffement des océans, multiplication de vagues de chaleur, etc. Dans son rapport 2014, le Giec souligne que le réchauffement climatique est « sans équivoque » ; depuis lors, la responsabilité de l’homme dans ces dérèglements, du fait des émissions de gaz à effets de serre, est aussi clairement établie.

En Antarctique, la couche de glace atteint un record d’étendue minimale

Dans ce contexte, la décision de Donald Trump sur l’accord de Paris apparaît évidemment cruciale. Car l’année 2016, n’a pas démenti les tendances scrutées avec inquiétude depuis 40 ans. D’après l’Organisation météorologique mondiale, ce fut l’année la plus chaude jamais enregistrée depuis les premiers relevés en 1880, avec une température moyenne supérieure de 1,1 °C par rapport à l’ère préindustrielle. À ce jour, notre siècle a déjà connu 16 des 17 années les plus chaudes… Quant à 2017, les premiers indicateurs sont tout aussi alarmants – cette fois, sans l’influence d’El Nino, qui a accentué le réchauffement de 2016, précise l’OMM.

Dans son compte rendu de mars dernier, l’organisation détaille ses observations, thème par thème. Et le bilan est sombre. « La température de la surface de la mer (…) a été la plus élevée constatée », commence l’OMM. L’Arctique a poursuivi son réchauffement spectaculaire : au plus fort de la saison hivernale, l’étendue des glaces recouvrant cet océan a atteint son niveau le plus faible. Quant à l’Antarctique, les dernières mesures effectuées interpellent : d’après Météo France, en mars dernier, la couche de glace entourant ce continent a atteint un record d’étendue minimale, même s’il est encore trop tôt, pour en tirer des conclusions définitives.

Conséquence de la dilatation thermique des océans, de la fonte des glaciers et des calottes glaciaires, le niveau des mers a continué à monter. Depuis le début du XXe siècle, il s’est élevé de 20 cm. Le phénomène, que l’on pensait graduel, semble en outre s’accélérer, s’alarment les États insulaires, notamment les îles Fidji, qui prendront bientôt la présidence de la Cop 23.

Un effort massif pour espérer contenir le réchauffement sous les 2 °C

Autre événement saillant de 2016 : les vagues de chaleur, impressionnantes en plusieurs points du globe, Asie, Moyen-Orient, Amérique du Nord, Afrique australe. Les stations météo ont relevé des records : il a fait 51 °C à Phalodi, dans l’État du Rajasthan en Inde, 53 °C à Delhoran, en Iran, 54 °C à Mitribah, au Koweït… En Europe, le mercure est monté à plus de 45 °C à Cordoue, dans le sud de l’Espagne, tandis qu’« une vague de chaleur tardive a touché de nombreuses régions d’Europe centrale et occidentale » en septembre 2016, souligne l’Organisation météorologique mondiale. Quant aux États-Unis, « ils ont pulvérisé ou égalé à eux seuls 11 743 records de chaleur en février », poursuit-elle, citant les données de l’administration américaine pour les océans et l’atmosphère (NOAA).

Certes, depuis trois ans, les émissions mondiales de CO2, le principal gaz à effet de serre, semblent se stabiliser. Mais sa concentration dans l’atmosphère reste très élevée, à 400 parties par million en 2015, là encore un record. Les experts le savent : il faudra un effort massif de réduction de ces gaz pour espérer contenir le réchauffement sous les 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, comme le prévoit l’accord de Paris.

Or les engagements pris par les États signataires ne sont pas à la hauteur des enjeux – pour l’instant du moins. Dans le cadre de la Cop 21, de décembre 2015, chaque pays s’est en effet fixé un objectif de baisse de ses émissions nationales, avec l’idée de rehausser l’ambition en 2020. La France, par exemple, prévoit une réduction de 40 % entre 1990 et 2030 (et les diviser par quatre à l’horizon 2050). Le risque est grand, et plus encore en cas de retrait américain, que la dynamique soit trop timide pour limiter le réchauffement. « Le temps est compté, rappelle David Levaï, directeur du programme climat à l’Iddri, l’Institut du développement durable et des relations internationales. Les enjeux climatiques sont une course contre la montre ».

« Au-dessus de 2 °C de réchauffement moyen, rappellent de leur côté Pascal Canfin et Peter Staime (2), les impacts sur notre environnement et sur les activités humaines seront catastrophiques : pertes massives de rendements agricoles, catastrophes climatiques (cyclones, tempêtes, etc.), plus fréquentes et plus intenses, extinction en masse d’espèces végétales et animales, hausse du niveau de la mer ».

Certaines projections évoquent la disparition pure et simple de certains petits États insulaires. Le risque d’atteindre 3 ou 4 °C de réchauffement à la fin du siècle n’a rien de farfelu. « Les conséquences seraient extrêmement graves », confirme la climatologue Valérie Masson-Delmotte, co-présidente d’un des groupes du Giec, instance dont le prochain rapport de synthèse est attendu en 2021-2022.

Marine Lamoureux

Vingt-cinq ans de variations américaines

1992. À Rio, les négociations sont lancées en vue d’un accord mondial sur le climat qui passe par la réduction des émissions de gaz à effet de serre. « Le mode de vie américain ne se négocie pas. Point final », déclare George H. Bush.

1997. Pour Washington, les pays en développement doivent assumer une part du fardeau. Le traité de Kyoto, signé par le vice-président démocrate Al Gore, est du coup rejeté par le Sénat. Le protocole de Kyoto entrera en vigueur en 2005 sans les États-Unis.

2007. À Bali, alors que la délégation américaine est huée, un « plan d’action » fixe l’objectif d’un accord mondial en 2009. Mais la COP de Copenhague, cette année-là, est un échec.

2015. Les États-Unis de Barack Obama jouent un rôle moteur dans l’adoption de l’accord de Paris, qui allie principes contraignants et « contributions » nationales sur la base du volontariat.

2017. Le 1er juin, après avoir fait de la sortie de l’accord de Paris un argument de sa campagne électorale, Donald Trump rend publique sa décision. Marine Lamoureux


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