Hamon en perte de vitesse : cinq signes qui ne trompent pas

lundi 10 avril 2017.
 

Au-delà du "croisement des courbes" d’intentions de vote en faveur de Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, les indices du patinage de la campagne du premier, plombé par son propre camp, s’accumulent. Une inflexion irréversible ? (Par Pierre Jacquemain, ex-conseiller stratégie de Myriam El Khomri. En désaccord avec la loi, il avait démissionné. )

1. Les ralliements à Emmanuel Macron

Le candidat d’En Marche ! fait durer le suspense. Digne d’un feuilletonnage – comme sait si bien le faire le Canard enchaîné, Emmanuel Macron engrange chaque jour de nouveaux soutiens. De Robert Hue à Alain Madelin en passant par Catherine Laborde et Boy George – qui a finalement retiré son soutien. Il s’est aperçu a posteriori qu’Emmanuel Macron n’était pas "gay" et aurait dans le même temps renoncé à le soutenir.

Mais le plus inquiétant, c’est que le marcheur opère une véritable percée parmi les élus et sympathisants socialistes. Pris à son propre jeu du "vote utile", le PS se fait désormais largement dépasser par la dynamique du mouvement En Marche !. Comble de l’humiliation, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian a annoncé son ralliement à son ancien collègue de l’Économie le jour où Benoît Hamon s’adressait aux forces armées. Reste à venir le probable soutien des vallsistes – et peut-être Valls lui-même – à la candidature d’Emmanuel Macron. L’ancien premier ministre réunit ses proches ce soir. Confirmation imminente donc.

2. Une marche contre un meeting

Un autre signe qui ne trompe pas : les formes de la mobilisation. Plutôt classique pour Benoît Hamon – même si les meetings rajeunis, débordent, ce qui n’était pas arrivé à un candidat socialiste depuis longtemps. Il a réuni 15.000 personnes à Berçy où l’on a senti le candidat reboosté à la fois par le ton de son discours ainsi que par ses militants survoltés.

Mais l’événement de ce week-end-là, c’était la grande mobilisation dans les rues de Paris, autour de la candidature de Jean-Luc Mélenchon, pour en appeler à une VIe République. Le pari de ce dernier a été largement réussi : près de 130.000 manifestants se sont réunis entre la place de la Bastille et de la République. L’image est belle pour le candidat de la France insoumise.

3. Des sondages en berne

Lors de la primaire, déjà, Hamon avait démarré la course loin devant ses concurrents jusqu’à remonter la pente pour remporter la partie face à Manuel Valls. La primaire n’était pas terminée que lorsque l’on testait Hamon comme candidat de la Belle alliance populaire, il ne décollait pas des 6%. Le lendemain de la primaire, les sondages montrent une dynamique en sa faveur, allant jusqu’à le créditer de 17% des intentions de vote.

Mais progressivement, la dynamique s’affaisse, les sondages en sa faveur reculent, jusqu’à tomber en dessous de Jean-Luc Mélenchon. Depuis, plusieurs sondages confirment l’avance du candidat de la France insoumise sur celui du Parti socialiste, jusqu’à parfois deux points d’écart – même s’ils restent inscrits dans la marge d’erreur des sondeurs.

4. L’étrange interview de Peillon sur France Inter

« C’est moi ou j’ai compris que Peillon avait dit qu’une entente entre Hamon et Mélenchon était nécessaire tout en souhaitant que Hamon se retire pour soutenir Mélenchon ? » Dimanche dernier, Vincent Peillon était invité de l’émission politique de Nicolas Demorand sur France Inter et le contenu de son propos – ambigu sur la question du ralliement à Mélenchon – a semé le trouble chez de nombreux internautes, ainsi que le révèle cette réaction.

Le conseiller politique de Benoît Hamon pense en effet inévitable de parvenir à un accord entre les deux candidats de gauche : « Cela va s’imposer (…) dans les prochains jours », croit-il savoir. Pas sûr que cette intervention soit du goût de l’intéressé. Mais elle est sans doute symptomatique d’un mouvement des électeurs de Benoît Hamon vers Jean-Luc Mélenchon. À suivre, donc…

5. Une rupture du pacte de non-agression

Quand tout va mal, difficile de ne pas succomber à la panique. C’est visiblement ce qu’est en train de vivre Benoît Hamon, qui ne se contient désormais plus. Hier sur le plateau de France 2, il n’a pas hésité à dénoncer « les coups de couteaux dans le dos plantés par les caciques qui veulent rester au pouvoir et avec qui il n’aurait pas gouverné ». Les socialistes prêts à rejoindre Macron son prévenus.

Autre élément révélateur d’un malaise dans la campagne : la rupture du pacte de non-agression avec Jean-Luc Mélenchon. Ils s’étaient engagés à ne jamais se viser directement. Depuis dimanche, le pacte a été rompu. Sur France 2, Hamon n’a pas hésité à tacler le candidat de la France insoumise en le mettant dans le même panier que Fillon et Le Pen au sujet de la Russie de Poutine. Pas très élégant. Le porte-parole de Mélenchon lui a répondu aujourd’hui en lui conseillant de sa calmer et de « prendre une bonne tisane ». Voilà qui est dit.

Par Pierre Jacquemain


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