Caracas LE VI° FORUM SOCIAL MONDIAL et II° FORUM SOCIAL des AMERIQUES

samedi 11 février 2006.
 

Après Bamako pour l’Afrique, le Forum Social décentralisé s’est réuni du 20 au 24 janvier 2006 à Caracas, la capitale du Venezuela bolivarien. Il sera suivi - nous l’espérons, en mars- du forum pour l’Asie à Karachi. Il succède, dans un contexte d’émancipation, d’évolution démocratique et progressiste des nations d’Amérique latine, aux forums de Porto Alegre, qui avaient donné le coup d’envoi au mouvement mondial altermondialiste de résistance et de lutte contre le néo-libéralisme. Plus de 70 000 participants se sont rassemblés, avec évidemment des légions de partisans du régime bolivarien d’Hugo Chavez. Des délégations très importantes sont venues de Colombie, pays frère dirigé par le président de la droite extrême, Alvaro Uribe. J’ai été impressionné par le courage de ses nombreux militants syndicalistes et associatifs qui combattent, au péril de leur vie, ce régime encadré par les militaires Etatsuniens dans le cadre du plan Colombie. Les Brésiliens étaient aussi très nombreux, du PT, du MST, des syndicalistes et des écologistes ainsi que les Argentins, les Chiliens. Les Boliviens, les Péruviens, les Equatoriens avec la célèbre représentante de la CONAI* Blanca, arrivés en car, sur les dangereuses routes de l’Altiplano et des Andes. Les peuples autochtones vêtus de leur beaux atours traditionnels donnaient la couleur et le ton de ce rassemblement de tous les peuples du continent américain. Des militants de l’Amérique Centrale ont pu faire part de leurs luttes comme ceux du Guatemala, un pays où la violence reste quotidienne après trente-six années de guerre civile. Cuba, déjà présent par son aide médicale au Venezuela a envoyé la plus importante délégation, des syndicalistes et des membres du Parti Communiste. L’Amérique du Nord était aussi présente avec les Canadiens et en particulier les Québécois, nombreux dans la mouvance environnementale. Des militants de la Gauche états-unienne, avec Cindy Sheehan qui est devenue la plus notable activiste de la lutte contre l’intervention guerrière de Bush en Irak, depuis la mort de son fils. Pour elle la construction d’un autre monde possible commence par la réelle pratique de la démocratie, et non son utilisation dévoyée comme un prétexte pour obtenir des bénéfices économiques. Elle déplore l’impérialisme de son pays. Les Européens sont là aussi avec une forte délégation française, avec Bernard Cassen, Ignacio Ramonet du Monde Diplomatique, Michelle Dessenne, Gus Massiah d’Attac, Olivier Besancenot, quelques 170 personnes. Des Italiens, des Allemands, des Belges, des Espagnols, des Finlandais, Autrichiens, Suisses du mouvement Attac qui se sont tous retrouvés dans un atelier pour forger des moyens communs et organiser des campagnes de lutte à l’échelle mondiale, contre l’OMC, l’AGCS, la taxation des transactions financières, les paradis fiscaux, pour l’annulation de la dette. La priorité du moment était donnée à la bataille contre la directive Bolkestein, la politique de privatisation des Services publics dans l’Union Européenne néo-libérale.

Les thèmes du forum Ce sont les thèmes de l’altermondialisme : Pouvoir, politique et luttes pour l’émancipation sociale ; Stratégies impérialistes et la résistance des peuples ; Ressources et droits pour la vie : alternatives au modèle prédateur de civilisation ; Diversités, identités et cosmovisions en mouvement ; Travail, exploitation et marchandisation de la vie ; Communication, culture et éducation : dynamiques et alternatives pour la démocratisation. Il sont déclinés dans de nombreux ateliers avec des intervenants spécialisés du monde entier, cinq par tribune. Ensuite la parole est donnée à la salle. C’était sans doute trop de temps pour les exposés et pas assez pour les prises de parole des participants, ce qui a limité les véritables échanges, le dialogue. Pour les représentants des pays d’Amérique latine, les rencontres et les débats sont principalement centrés sur les questions de l’intégration, des convergences économiques et politiques de leurs Etats au-delà de leurs divergences, de leurs différences, pour réaliser l’unité des mouvements populaires afin de résister à l’impérialisme du géant du Nord, parvenir au pouvoir et gouverner dans des contextes très différents. Pour Rapahël Allegria de Via Campesina ( Bresil), l’Amérique latine n’est pas en train de vivre un processus uniforme. L’Amérique centrale dans les années 80/90 était la plus combative pour entreprendre les changements ; le processus de paix a été fatal*. Le Chili a vécu une dictature terrible mais elle a été détruite... Nous défendons l’idée de la lutte pour la défense de la terre, les semences, l’eau, le pétrole, qui appartiennent aux communautés. On doit respecter les peuples autochtones, on ne doit pas déroger à leurs droits ; ce serait revenir en arrière. Les traités de libre échange ont apporté des projets régionaux qui n’ont pas mené à l’intégration. Toutes les nuances du socialisme, de la social-démocratie chilienne aux mouvements autochtones et populaires, aux communistes de Cuba, confrontent leurs expériences pour définir ces points de convergence et d’union pour parvenir au socialisme. Tous ces pays se sentent menacés par le projet américain de l’ALCA, la Zone de Libre Echange des Etats Américains, c’est-à-dire l’extension a tout le continent de l’ALENA, le marché commun réalisé entre le Canada, les E-U., le Mexique qui a ruiné les paysans mexicains. L’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay ont créés leur version du marché commun dans le cône sud. Le Venezuela vient de les rejoindre. Si les Américains du Nord intègrent ce marché dans l’ALCA, ils pèseront de leur poids inégal pour 70 % du PIB de l’ensemble. De nouveaux accords de coordination ont été conclu entre les trois principales économies du Sud : le Brésil, l’Argentine et le Venezuela. Ce dernier importe 70 % des ses besoins alimentaires et services. Chavez a décidé de réaliser 25 % de ses achats au Brésil et en Argentine en échange de pétrole à des conditions très avantageuses. La Bolivie du nouveau Président Evo Morales s’apprête à faire de même. Ainsi s’efface la dualité entre le Mercosur et la Communauté Sud-américaine des nations. En même temps Caracas développe une initiative d’alliance stratégique avec Cuba : « l’Alternative Bolivarienne pour les Amériques », l’ALBA qui s’inscrit dans une perspective du développement du socialisme du XXI° siècle comme le qualifie le Président Hugo Chavez dans le discours qu’il a prononcé à l’assemblée des mouvements du forum. Pour Osvaldo Martinez , député cubain, l’ALBA est un projet qui commence à devenir une réalité. Il n’y a pas de manuel. C’est un processus de construction politique d’un degré élevé de l’imagination, de la solidarité, et de la coopération. Nous ne devons pas laisser de côté l’écologie mais ce n’est pas le seul ingrédient. L’objectif est de réaliser une communauté économique mais aussi politique, même parvenir à long terme à un gouvernement géostratégique unique supranational.

L’ALBA C’est un projet d’intégration sur un modèle d’échanges de type coopératif, en rupture avec le système de libre concurrence du marché. Il s’appuie sur des mécanismes de compensation afin de corriger les différents niveaux de développement entre les uns et les autres. Il implique tous les acteurs économiques et sociaux et donne la priorité à la résolution des problèmes essentiels des populations : alimentation, logement, environnement, etc...à la différence de l’ALCA qui ne fait aucune différence entre petites et grandes nations. Dans l’ALBA, pas de subventions mais des crédits, des équipements et des technologies. Cuba a fourni six cent centres de diagnostic intégral ultra-moderne qui dispensent des soins dans les quartiers populaires et assurent la formation de 45 000 médecins et spécialistes, de dix mille infirmières. L’opération « Milagro (miracle) » permet à des milliers d’habitants du Venezuela et d’Uruguay de recouvrer la vue par l’opération de la cataracte dans les hôpitaux cubains. C’est une politique radicalement différente de celle des accords bilatéraux signés par Washington avec l’Amérique Centrale, le Chili, l’Uruguay, le Pérou, la Colombie, dont le résultat est de creuser les inégalités. L’ALBA encore embryonnaire, est une tentative originale, ambitieuse d’intégration régionale échappant à la logique du marché. Elle doit se réaliser avec des pays aussi différents que l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay, demain le Mexique et le Pérou, pays dominés par les multinationales. Ces accords se font grâce au pétrole du Venezuela, à l’entreprise nationale PDVSA. Une réalisation culturelle comme TELESUR fonctionne dès à présent avec la coopération du VZ, de l’Argentine, de Cuba, de l’Uruguay, pour échapper à l’impérialisme idéologique de la CNN américaine en langue espagnole. Le débat existe au sein du forum entre la gauche radicale et les plus pragmatiques qui s’affrontent sur les avantages et les inconvénients du maintien du Mercosur et du développement parallèle ou convergent de l’ALBA. Chavez est dans les deux... Pour le représentant de l’Uruguay, qui conteste la déviance politique sociale-démocrate du Président Tabaré Vasquez, l’Argentine pratique aussi, avec d’autres partenaires du Mercosur, une politique libérale. Les gouvernements progressistes du Mercosur devraient adopter une autre politique. Sinon nous n’arriverons pas à mettre fin au régime de l’OMC, à cause de pays comme le Brésil et comme l’Inde. Ce qui est sûr, c’est que la ZLEA des Etats-unis semble complètement enterrée. Plus personne n’en veut, même certains alliés fidèles de Washington.

Les débats : Les mouvements sociaux doivent-ils participer, accompagner les partis de gauche dans leur accession au pouvoir, dans l’exercice du pouvoir, ou exercer seulement une pression pour obtenir la garantie que les promesses des programmes électoraux se réalisent ? Léo Panitch de Toronto (Canada), se demande si les mouvements sociaux peuvent vraiment développer la démocratie, l’Etat, la culture...C’est un défi, une utopie, mais le propre d’une utopie c’est de ne jamais y arriver...C’est le mauvais sens. Le bon sens c’est une vision qui inspire les gens, même s’ils ne sont pas certains d’y arriver. Espérer c’est un moyen d’y arriver. En venant au forum, nous espérons trouver ces moyens pour développer notre capacité à nous organiser. Edgardo du Brésil pense que le capitalisme est un système de mort et qu’il est dans sa phase de destruction. Il n’est pas possible de continuer à produire avec le capitalisme. Des milliers de personnes meurent faute d’eau. C’est une situation irréversible d’un crime mondial... C’est le sens que donne Hugo Chavez quand il s’exclame à la fin de son discours devant les milliers de participants rassemblés au Polyedro : le socialisme ou la mort. Nous ne pouvons pas perdre de temps, il s’agit d’essayer de sauver la planète, en changeant le cap de l’histoire, en construisant un mouvement authentiquement socialiste sur la planète, que le capitalisme est entrain de tuer...Un monde différent, un monde de paix, n’est pas seulement possible, il est nécessaire.

L’avenir des Forums sociaux. Ce thème a été abordé par Gustave Massiah d’Attac-France dans le cadre de l’atelier sur les alternatives. Le mouvement altermondialiste est confronté aujourd’hui au débat stratégique, du rapport au politique, éclairé par le passé historique. Notre mouvement est riche de sa diversité, de la multiplicité des courants de pensée qui le composent. Il combine plusieurs démarches : la résistance aux logiques dominantes, la recherche des alternatives, la négociation en situation. Les forums ne répondent pas à la question de la conquête du pouvoir par rapport à ceux qui sont dominants. Mais ils ont innové dans le sens de ce que Gramsci appelait l’intellectuel collectif, par l’éducation populaire ; ce qui est d’une grande importance pour les partis de masse. Il ne s’agit pas de se contenter de former, mais aussi, d’élaborer des connaissances collectives. L’Altermondialisme est un mouvement historique, de transition ou révolutionnaire. Mais comment penser une période quand on la vit. Les instruments que nous avons sont ceux de la période précédente et nous savons que c’est insuffisant puisqu’ils correspondaient aux périodes précédentes. Il s’agit donc d’élaborer de nouvelles pensées, des propositions, des hypothèses. Le Mouvement comme tout mouvement historique prolonge des périodes d’une histoire inachevée. Les questions remontent à la surface : La décolonisation qui n’est pas complètement achevée. Le socialisme défini de différentes manières : le soviétisme ou le mouvement ouvrier du XX° siècle. La social-démocratie comme proposition de transformation : le keynésianisme dans les pays dominant entre les années 45 à 1980. Les révolutions des années 70 qui ont mis en avant les questions de la démocratie et de la liberté, l’individuel et le collectif, la révolution écologiste. Nous sommes les héritiers de ces quatre moments dans le monde des idées et des propositions alternatives. Le forum social intervient comme un moment d’accumulation pour expliquer et comprendre ces éléments. C’est une suite et ce sont des éléments nouveaux en même temps. L’Alternative pose les questions de la stratégie pour la conquête du pouvoir, des bases sociales, des alliances, de l’expansion de l’altermondialisme. L’analyse de la situation reprend les thèmes des périodes précédentes, mais diffère sur la reconnaissance des contradictions : remise en cause du modèle de développement et de croissance. La croissance ne permet pas de réduire les inégalités liées à la question des discriminations, de la pauvreté. le système écologique et les droits des générations futures. les contradictions entre Nord et Sud et la guerre. La domination est géopolitique pas sociale. la montée des idéologies sécuritaires parce que nous sommes dans la phase destructive de ce monde qui crée de l’insécurité sociale, culturelle, identitaire, ressentie par les couches populaires. Le Mouvement altermondialiste apporte une proposition qui peut se décliner autour d’un grand axe : Un autre monde est possible. Ce n’est pas une tautologie, un slogan. Le mot répond après 1989 à deux idées dominantes : la fin de l’histoire selon Fukuyama : on ne peut pas dépasser le système libéral. C’est la guerre des civilisations, donc il faut accepter le fait que le militaire soit un élément dominant des sociétés. En face des diktats de la pensée libérale, répondent des propositions différentes : un slogan socialiste : la révolution empêchera la guerre ou la guerre débouchera sur la révolution. C’est l’interprétation guerrière de la révolution où il devient difficile de réfléchir à la distinction entre terrorisme et mouvement de libération. une orientation qui unifie le mouvement : refuser un suicide organisé par l’ajustement structurel au capitalisme. Soit organiser chacun et le monde pour l’accès aux droits pour tous en reprenant des éléments du communisme et de la social-démocratie. notre mouvement qui est construit sur l’idée de la convergence des mouvements et le fait qu’il y a une convergence culturelle des mouvement sociaux et citoyens. Nous n’avons plus la même vision de la place relative des mouvement sociaux et du mouvement ouvrier et socialiste qui occupait auparavant la place centrale. La classe ouvrière n’est plus la place centrale unifiante de l’ensemble du mouvement social. Un autre problème est posé par la mise en cause de la forme d’organisation en parti politique ; ce qui pose la question du rapport ente les partis et l’Etat. D’une certaine manière il y a l’émergence d’une classe Etat et d’une classe Parti. Il y a une méfiance vis-à-vis de partis qui sont des proto-Etats. Nous, nous considérons les partis comme des associations, au sens de faire société, qui n’ont pas le monopole du politique. Les alliances. Chaque mouvement historique a construit ses bases et des alliances. La décolonisation a vu s’unir les mouvements de libération et les Partis communistes jusqu’à ce qu’il y ait concurrence et guerre entre les libérateurs et les PC. Ailleurs on a vu des alliances entre les bourgeoisies nationales et les communistes comprador. De nouvelles formes de partis de rassemblement comme l’ANC en AFS ou le PT au Brésil sont apparues. Le mouvement alter mondialiste se construit sur de nouvelles bases sociales et rassemble tous ceux qui sont exclus des droits à la différence des alliances traditionnelles : l’alliance communiste : classe ouvrière + la couche dirigeante de l’Etat ; l’alliance social-démocrate : classe ouvrière+ technocratie+couches moyennes ; Avec qui construire l’alliance ? Le FSM : n’est-ce pas l’expertise citoyenne des courants de la petite bourgeoisie contestataire. Il demeure posé la question de l’alliance, par rapport à la phase actuelle, avec les néo-keynésiens contre le courant néo-conservateur : une régulation politique du capitalisme à l’échelle mondiale. Ce qui implique deux objectifs : le travail de deuil du soviétisme et du keynésianisme car notre conception de l’égalité ne passe pas par une sous-estimation de la démocratie. L’innovation majeure des transformations viendra de la capacité à produire de l’égalité sans produire de bureaucratie. L’histoire reste à écrire et dépend de nos mobilisations.

Le débat entre B. Cassen, Samir Amin, François Houtard, Oden Grajew (Brésil), José Seoame (CLACSO), José Miguel Hernandez Medero ( syndicat CTC, Cuba), s’est poursuivi le samedi à l’aéroport de la Carlotta sous les grandes tentes blanches installées par l’armée, parfois troublées par le décollage ou l’atterrissage d’un avion ou d’un hélicoptère. Pour F.Houtard, la contradiction est entre le Capital et l’Humanité, pas seulement avec la classe ouvrière. Notre diversité idéologique est une force mais aussi une faiblesse qui peut confiner à l’anarchie entre ceux qui se proposent d’humaniser le capitalisme et ceux qui veulent transformer la société. Nous devons passer de la conscience collective aux actes. Pour cela nous avons besoin de plus de lisibilité pour arriver à produire des résultats et aboutir à créer un nouveau sujet historique. Cela nécessite un projet cohérent, pas seulement l’accumulation d’actions. Le Forum est un processus pas une institution. Ce ne doit pas être non plus le folklore, le Woodstock de l’alter mondialisme pendant que le système continue tranquillement. Pour Oden Grajwen, nous devons aussi construire un autre monde à l’intérieur de nous même, modifier notre façon de penser. Sinon nous reproduirons à l’identique les mêmes schémas que l’histoire a fait. Nous devons agir sans attendre le forum suivant : établir une base de données de toutes les organisations pour établir des contacts entre elles. Nous devons créer des forums dans toutes les villes du monde afin de développer la conscience collective et des campagnes d’action en commun sur une semaine, trois jours, une journée. Oden propose aussi d’élire un parlement latino-américain, une assemblée constituante qui définisse les règles pour cohabiter entre nous et qui sait un jour élire un parlement mondial des peuples pour s’opposer au Conseil de sécurité. Samir Amin, qui vient de Bamako, estime que le Forum est un espace ouvert qui ne peut pas prendre de position en tant que tel. Cependant il a le droit et le devoir de tenter d’organiser la con- vergence dans la diversité des forces sociales avec des objectifs stratégiques communs à l’échelle mondiale. Le Forum de Bamako dans 10 commissions a couvert tous les aspects du défi et fait des propositions pour un programme d‘action. Nous sommes dans un moment de l’histoire caractérisé par le caractère unipolaire du système, militaire, idéologique et culturel. Tout le monde souhaite un monde multipolaire et considère avec horreur le système de la vérité unique que le libéralisme tente de nous imposer. C’est la dictature de l’oligarchie financière qui domine aujourd’hui le capital, avec la Triade, E.U.,Canada, U.E., Japon. L’U.E, l’OMC, la BM, le FMI, sont les instruments de la gestion du système mondial impérialiste. C’est un système d’apartheid à l’échelle mondiale qui approfondit les inégalités mais ne se réduit pas à cela. L’effet est destructeur dans tous les domaines. 1990 est la date du tournant, de la fin du 1° cycle des tentatives socialistes. Le système unipolaire se met en place avec la guerre du Golf. Ce n’est pas un hasard. L’impérialisme libéral déclare qu’il est là pour l’éternité comme Hitler le fit en son temps...Il ne tolère aucune protestation, déclare la guerre au monde entier, répudie le droit international et proclame celui de mener des guerres préventives contre toute menace. Il établit le contrôle militaire de la planète avec 600 bases dans le monde. Cette gestion militaire est présentée comme étant au service des démocraties libérales, les autres étant douteuses. Mais il existe en même temps des contradictions entre le patron et ses alliés subalternes. On ne peut pas mettre en déroute les régimes néolibéraux locaux sans mettre en déroute la dimension impérialiste du système de contrôle de la planète. Le 19 mars, à la journée d’action mondiale contre la guerre, nous devons ajouter deux slogans : l’interdiction de toutes les armes atomiques par tout le monde ; le démantèlement de toutes les bases américaines. Bernard Cassen pense que : C’est quand quelque chose marche bien qu’il faut réfléchir à la suite, innover en permanence. A Mombaï ce fut un élargissement extraordinaire, une plongée dans l’Inde populaire. Ce qui nous permet d’augmenter la masse de la « soupe primitive » face à l’ennemi commun. Cependant nous devons avoir conscience qu’il existe encore des terres de mission : le Proche-orient, l’Afrique, l’Asie en grande partie. Nous devons sortir des propositions : l’abolition de la dette qu’il faut continuer à demander. Mais nous avons 350 propositions. C’est trop ! personne ne les lit. Trop d’infos tue l’info. Parmi les propositions il faut en choisir un nombre limité qui présente un socle cohérent : dette, médias, finances. L’appel de Bamako va plus loin dans l’analyse et les propositions faites que celui de Porto Alegre. Nous devons mettre en place des scénarios de lutte, pas un programme électoral car il n’y a pas d’élections mondiales. N’ayons pas peur d’élaborer des scénarios de rupture avec les politiques libérales en nous adressant à tous, gauche comme droite. Le choix, ce sera d’accord , pas d’accord. Quels sont les rapports au politique du mouvement alter mondialiste ? Pour certains c’est la théorisation du contre-pouvoir, le changement social sans exercer ou participer au pouvoir. pour les autres, c’est la transcription par les voies de la démocratie représentative + l’action du mouvement social qui est une procédure démocratique. Comment agir ? Chacun dans son rôle, de façon autonome, mais le parti politique n’est pas l’ennemi. J’ai le plus profond respect pour ceux qui se chargent de la gestion des affaires de la cité. En France il y a 500 000 élus, c’est le maillage de la démocratie. Les mouvements sociaux ne représentent pas l’ensemble de la population. Il s’agit de deux mouvements aux convergences parallèles qui comme dans l’infini peuvent se rejoindre. Aldo Moro le fit en Italie en alliant la démocratie-chrétienne et le PCI. « D’autres parallèles sont possibles ! » Les rapports sont ceux de l’autonomie de chacun mais nous ne devons pas avoir peur du dialogue, de se colleter avec le politique. Pour José Seoame : certains changements politiques sont liés aux mouvements sociaux, d’autres non. Il estime que la solution est beaucoup plus compliquée que les deux exposées par B. Cassen. Certaines critiques n’impliquent pas la rupture avec le néo libéralisme et tentent de récupérer le Mouvement social. Dans la discussion qui suit Samir Amin estime que : nous sommes en train de passer à l’offensive. Ils ne sont déjà plus l’idéologie dominante. Il sont en crise. Nous assistons à la naissance d’un nouveau cycle pour le socialisme. Il a fallu combien de temps pour que le capitalisme s’impose ? Après les tentatives historiques, une nouvelle page s’ouvre. La critique de la manière ancienne de faire de la politique est positive. Elle signifie que cette nouvelle page sera différente et avancée. L’ avenir nous appartient. Le néolibéralisme ne peut pas prétendre être une solution à tous les problèmes. Dans l’évolution des sociétés, face au défi du rattrapage par les pays du Tiers-monde et les anciens pays du camp socialiste, nous ne sommes pas surpris qu’ils ne puissent pas rattraper le niveau du modèle capitaliste car il est possible de le dépasser pour faire autre chose. Rattraper signifie faire du capitalisme. L’ALBA est un défi anti-impérialisme, un cadre institutionnel d’une évolution au-delà du capitalisme.

« Le socialisme est toujours la jeunesse du monde, de la crise de l’adolescence, il va passer à l’âge adulte. » ( Réflexion de l’auteur) C’est bien le sentiment de ceux qui fréquentent les très nombreux ateliers consacrés au socialisme, au marxisme, à sa variante bolivarienne. La Gauche européenne est aussi présente avec Marco Berlinguer (Italie), le Parti communiste espagnol, le PCF qui échangent leurs points de vue avec l’Argentin Pablo, le Brésilien Ricardo. Construire une nouvelle forme de démocratie, transformer la propriété, commencer un cycle nouveau avec la gauche sociale, comment s’affronter aux mécanismes de la démocratie représentative : voilà quelques unes des questions qui se posent. Pour Ricardo, le VZ et la Bolivie rompent avec le discours qui ne se construit pas pour la lutte électorale. Chavez n’a pas fait une carrière parlementaire construite petit à petit. La lutte pour la conquête du pouvoir est centrale mais doit être accompagnée d’une force de construction propre... pour répondre au défi de construire une stratégie révolutionnaire...construire une nouvelle organisation politique avec les mouvements sociaux. Pour Pablo, les nouveaux paramètres de l’organisation de base c’est l’assemblée, face aux entreprises, face à l’Etat. Pour le camarade espagnol, le socialisme du XXI° siècle ne sera ni bureaucratique, ni dogmatique...grâce à l’unité de toutes les forces favorables au changement...qui permettront d’introduire des éléments de la démocratie participative. L’Amérique latine est le laboratoire qui crée peu à peu les bases d’une nouvelle alternative au caractère économique et social. Le camarade du PCF estime que le référendum gagné en France pour le Non au projet de Traité Constitutionnel Européen, a été une manière expérimentale exceptionnelle de mener une campagne politique. Elle a permis de créer dans la conscience populaire que : c’est possible ! c’est une idée neuve de la pratique politique pour que les peuples construisent leur propre projet.

L’Assemblée des mouvements sociaux Elle occupe une place importante au rendez-vous de Caracas. Des centaines de délégués des mouvements réseaux, campagnes et secteurs sociaux divers ( étudiants, paysans, militantes de la Marche des femmes, syndicats, etc...). Elle a été le point fort de la clôture en présence du Président Chavez. Trois manifestations unitaires sont prévues :

une mobilisation contre la guerre les 18 et 19 mars à l’appel du mouvement mondial anti-guerre ;

une nouvelle rencontre des Mouvements prévue fin avril à La Havane ;

une rencontre en Equateur en mars 2007 pour mobiliser l’opinion contre les bases militaires nord-américaines. Il est également prévu de se mobiliser pour les évènements suivants :

le sommet de la FAO qui se tiendra à Porto Alegre (Bresil), la seconde semaine de mars ;

le prochain sommet sur l’eau organisé par l’ONU, au Mexique. Le Nicaraguayen Juan Torrès de la CLOC ( Coordination latino américaine des organisations paysannes ) a souligné que pour les paysans latino-américains, et pour Via Campesina au niveau mondial, les thèmes essentiels de réflexion et d’action restent la souveraineté alimentaire, la réforme agraire, le commerce équitable, la pression pour évacuer l’agriculture des discussions en cours au sein de l’O.M.C.

On pourrait ajouter la question de la dette mondiale qui fut l’objet d’exposés très argumentés avec Lydie des Philippines Démontre que s’il n’y a pas de chemin rapide pour la transformation sociale, nous devons perdre l’idée que nous ne saurions pas gérer et devoir contracter des prêts. Nous devons trouver des systèmes alternatifs. Ces dettes sont illégitimes et permettent de contrôler nos pays. Pour José Agusto du Brésil (alliance des Peuples du Sud), les pays du Sud se sont libérés du colonialisme mais pas de l’exploitation. Les pays du premier monde qui représentent 20 % de l’humanité sont les colonisateurs. Les pays de la dette sont les anciens colonisés. Il y a une relation directe entre colonisation et industrialisation. C’est sur cette exploitation que s’est bâti le capitalisme occidental. Ce sont aussi les plus gros pollueurs. Eric Toussaint (Pt.du Comité pour la suppression de la dette du Tiers-monde) Il effectue un rappel historique dont il ressort que la dette de l’Amérique latine a été multipliée par 2,5 entre 1980 et 2004 alors qu’elle a remboursé 9 fois le montant de la dette initiale. Ce sont donc les pays d’AL qui financent les pays extérieurs, sans tenir compte du transfert des ressources naturelles. Il pose des questions : Qui a reçu l’argent ? Combien avons-nous payé ? Nous devons mener des actions judiciaires contre les créanciers, le FMI , la BM. Qui ont soutenu les dictatures avec enthousiasme et imposé des politiques terribles comme celle qui a détruit l’économie de l’Argentine. Il propose à Hugo Chavez de crée une Banque du Sud, un Fonds Monétaire continental et pourquoi pas une monnaie caribéenne. Les Etats d’A.L. ont déposé des réserves en or qui dépassent le montant de la dette, des fonds en liquide aux Etats-Unis, sous la forme de bons du trésor. Ce qui revient à prêter de l’argent à un taux de 3% et contracter des prêts à 12 %...auprès des banquiers américains. Ce qui manque c’est la volonté politique de Lula, Kirchner, Vasquez, un peu de Chavez aussi... Camille Chalmer d’Haïti, Maria Lucia Fatorelli du Brésil, exigent un audit du service de la dette et la fin des politiques de déstructuration du FMI et de la BM, dénoncent l’illégalité de la dette. La vérification des comptes au Brésil par le Président Vargas en 1991 avait permis de constater que 40 % de la dette réclamée n’était pas justifiée.

Allain GRAUX Le 7 février 2006

* conaî : mouvement de lutte des peuples autochtones *ZLEA : Zone de Libre Echange des Etats Américains * MERCOSUR : le marché commun des Etats d’Amérique du Sud : * les passages en italiques, souvent traduits imparfaitement par me soins de l’espagnol ou du portugnol... * le processus de paix a été fatal : l’orateur signifie par là que la paix qui a suivi les périodes de guerre civile en Amérique centrale, n’a pas profité à la Gauche, mais à la Droite. Ce qui est le cas actuellement dans tous les Etats d’Amérique centrale, particulièrement au Guatemala, au Salvador. Des espoirs naissent pour le Nicaragua et le Costa Rica, le Honduras.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message