Shimon Peres, artisan de l’ethnocide programmé des Palestiniens

lundi 10 octobre 2016.
 

- A) Israël : Shimon Pérès « l’homme de la paix » ? Quelle blague ! (Union Juive Française pour la Paix)

- B) Mort de Shimon Peres, des éloges indécents (Communiqué de Ensemble !)

- C) "L’homme qui n’a pas mis en œuvre les accords d’Oslo" (Leila Shahid)

- D) Shimon Peres, le criminel de guerre dont l’Occident a toujours ignoré les victimes

- E) Shimon Pérès : "L’homme des rendez-vous manqués avec la paix et la solution à deux Etats" (PCF)

- F) Les deux visages de Shimon Pérès (Denis Sieffert, Politis)

Le fascisme installé au coeur du gouvernement et de la société d’Israël

Israël : Vers le fascisme

De la création d’Israël (14 mai 1948) au sociocide du peuple palestinien ?

A) Israël : Shimon Pérès « l’homme de la paix » ? Quelle blague ! (Union Juive Française pour la Paix)

Il existe une légende tenace : celle de l’existence d’un « sionisme de gauche » qui aurait fait des « offres généreuses » que les méchants Palestiniens auraient refusées. Le prototype de cette générosité, ce serait les accords d’Oslo et un de leurs signataires : Shimon Pérès.

Shimon Pérès est à l’origine du surarmement d’Israël. Dès les années 50, il obtient de ses amis « socialistes » dans le gouvernement Guy Mollet le premier réacteur nucléaire (à Dimona) et la vente d’avions Mirages. Beaucoup plus tard, il fait partie des gouvernements qui vont autoriser et financer les débuts de la colonisation tout en discriminant les Mizrahis venus du Maghreb et du Machrek.

Pérès et Rabin sont, côté israélien, les artisans des accords d’Oslo. 23 ans après cette signature, tout le monde comprend qu’ils ont été une gigantesque illusion. Les Palestiniens ont espéré signer « la paix des braves » qui mènerait à un petit État palestinien limité à 22% de la Palestine historique. Ils ont cru avoir des « partenaires pour la paix » dont Shimon Pérès était le prototype.

L’homme plaisait beaucoup aux Occidentaux : un « socialiste » parlant de la paix et compromis dans tous les crimes commis contre le peuple palestinien. Il a même eu le Prix Nobel (mais avant lui, des assassins comme Kissinger ou Begin l’avaient déjà eu).

En réalité à Oslo, les Palestiniens ont reconnu l’État d’Israël (pourtant né de l’expulsion de la grande majorité des Palestiniens de leur propre pays) et Israël a juste reconnu l’OLP rapidement transformée en une Autorité Palestinienne sommée d’assurer la sécurité de l’occupant. Rien n’a été signé sur la création d’un État palestinien ou sur l’arrêt de la colonisation.

Dans les deux ans qui séparent la signature des accords d’Oslo de l’assassinat de Rabin, 60000 nouveaux colons sont installés par les travaillistes. Pour faire la paix ? Quelle blague !

Tout juste arrivé au pouvoir après cet assassinat, Shimon Pérès fait exécuter en pleine période de trêve Yahia Ayache (considéré comme l’artificier du Hamas, il relance ainsi les attentats-suicides de ce parti qui avait décrété une trêve) et lance une attaque sanglante contre le Liban et la ville de Cana. Il est le principal fossoyeur des accords d’Oslo. Les électeurs préférant l’original à la copie, il est battu par Nétanyahou en 1996.

La suite est encore plus navrante, résumant à travers la trajectoire d’un homme l’évolution de la société israélienne. Pérès va se rallier à Sharon, l’homme qui accentue et généralise une colonisation initiée avant lui. L’homme des crimes de guerre à répétition. Il va propager l’image d’un Sharon centriste, le mythe d’un Israël faisant des offres généreuses que ces barbares de Palestiniens ont refusées.

Il plaisait à l’Occident qui adore la « paix » quand le dominant conserve sa puissance et que le dominé est forcé d’accepter sous peine de « porter la responsabilité d’un échec du processus de paix ». Un Occident qui adore les « socialistes » quand ils maintiennent l’ordre colonial.

Sauf qu’il n’y a jamais eu de processus de paix, il y a un État d’apartheid et un rouleau compresseur colonial aidé politiquement et militairement par l’Occident.

Il n’y aura pas de paix sans justice.

Bureau national de l’UJFP, le 30-09-2016

B) Mort de Shimon Peres, des éloges indécents (Communiqué de Ensemble !)

Avec Shimon Peres disparaît l’un des fondateurs de l’Etat d’Israël, un des principaux dirigeants du parti travailliste qui occupa de nombreuses fonctions ministérielles, devint 1er ministre et président.

Au lendemain de son décès, c’est à une avalanche de louanges de la part de tous les dirigeants au niveau international à laquelle nous assistons. Il était serait devenu une colombe ! C’est un travestissement de la réalité

Il reçut le prix Nobel de la Paix pour son action en faveur des accords d’Oslo en 1993 qui, pour la première fois, reconnaissait le peuple palestinien comme interlocuteur et son droit à un territoire ce qui aurait pu être un pas en avant dans la voie de la Paix mais a été l’instrument du fractionnement de la Cisjordanie et de la politique du fait accompli colonial.

Cela est en cohérence avec le parcours de celui qui avait été le principal artisan de l’acquisition de l’arme nucléaire et du programme nucléaire israélien. Sa responsabilité de 1er ministre est engagée dans le bombardement du village de Cana en 1996 tuant 106 civils, ce qui est constitutif d’un crime de guerre. Après l’assassinat dYitzak Rabin en 1995, il abandonna le processus de paix et rallia Ariel Sharon, adversaire déclaré des accords d’Oslo.

Et il approuva tout la politique de blocus de Gaza allant jusqu’à soutenir l’opération « Plomb durci » et les bombardements meurtriers de la bande de Gaza.

Aujourd’hui, l’extrême-droite est au pouvoir avec B. Netanyahou, la colonisation de Jérusalem-Est et de la Cisjordanie est sans cesse en expansion, la bande de Gaza reste une prison à ciel ouvert.

Plus que jamais nous devons agir pour une paix digne et durable incluant la reconnaissance des droits nationaux du peuple palestinien avec la continuité territoriale et le droit au retour des réfugiés.

Pour cela il faut faire pressions sur toutes les autorités politiques et poursuivre la campagne internationale BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions d’Israël https://www.bdsfrance.org/ ) et soutenir le CNPJDPI (Collectif National pour une Paix Juste et Durable entre Palestiniens et Israéliens http://cnpjdpi.org/ ) pour agir contre les exactions de l’Etat d’Israël.

Le 29 septembre 2016

C) Leila Shahid : « Pour les Palestiniens, Shimon Peres restera l’homme qui n’a pas mis en œuvre les accords d’Oslo »

Sur franceinfo, Leila Shahid, ex-ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union européenne, a jugé Shimon Peres « décevant pour les partisans de la paix palestiniens mais aussi israéliens ». L’ancien premier ministre d’Israël et prix Nobel de la paix, Shimon Peres, est mort mercredi 28 septembre à l’âge de 93 ans, deux semaines après avoir été victime d’une attaque cérébrale. Leila Shahid, ancienne déléguée générale de l’Autorité palestinienne en France et ex-ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union européenne, a estimé sur franceinfo que « pour les Palestiniens, il restera l’homme qui n’a pas mis en œuvre les accords d’Oslo. »

France info : Avez-vous le sentiment qu’il y a eu deux Shimon Peres ?

Leila Shahid : Oui, je dirais qu’il y a eu plusieurs Shimon Peres. L’homme qui a eu l’image respectable, cosmopolite, internationaliste et plutôt laïc d’Israël. Il y a eu plusieurs personnages parce que, comme tous les grands hommes politiques, il était complexe. Mais, pour les Palestiniens, il restera l’homme qui n’a pas mis en œuvre les accords d’Oslo, celui qui n’a pas su succéder à Yitzhak Rabin après son assassinat, celui qui a d’ailleurs perdu les élections face à Netanyahu et, pour cette raison-là, il a été décevant pour les partisans de la paix palestiniens mais aussi israéliens. Et puis surtout, l’homme qui a, au lieu de continuer à défendre le parti travailliste, a choisi d’aller avec Ariel Sharon.

France info : Le dernier fondateur de l’État d’Israël a disparu. Pensez-vous que seuls les fondateurs avaient peut-être la capacité de faire la paix et que la « génération héritage » n’en a pas la capacité ?

Non ce n’est pas seulement cela. La société israélienne a changé, pas seulement les dirigeants. On est passés d’une société à majorité laïque, pionnière qui fondait un État qu’elle pensait être la protection ultime du peuple juif dans le monde, à un État qui est fait de religieux, fanatiques, nationalistes, dirigés par des racistes, fiers de l’être comme monsieur Lieberman qui est aujourd’hui ministre de la Défense. La société a changé, la Knesset a changé. C’est pour cela que c’est extrêmement tragique et que nous devons juger le legs de Shimon Peres à la lumière de sa trajectoire politique et historique. Je le juge assez sévèrement malheureusement.

D) Shimon Peres, le criminel de guerre dont l’Occident a toujours ignoré les victimes (Moniteur du Middle West)

https://www.middleeastmonitor.com/2...

Shimon Peres, décédé mercredi à l’age de 93 ans après avoir subi un accident vasculaire cérébral le 13 septembre, incarne la disparité entre l’image d’Israël en Occident et la réalité de ses sanglantes politiques coloniales en Palestine et dans la région.

Un acteur de la purification ethnique de la Palestine lors de la Nakba

Encore jeune, Peres a rejoint la Haganah, la milice première responsable de l’épuration ethnique des villages palestiniens en 1947-1949, au cours de la Nakba.

Alors que le déplacement violent des Palestiniens atteignait un record historique, Peres a toujours insisté sur le fait que les forces sionistes « ont confirmé la pureté des armes » lors de la création de l’État d’Israël. Il a été jusqu’à affirmer qu’avant l’existence d’Israël, « il n’y avait rien ici. »

29 novembre 1947 : L’expulsion des Palestiniens revisitée par des historiens israéliens

Une vie au service du colonialisme et de l’apartheid

Dans les décennies qui ont suivi, Peres a servi comme Premier ministre (deux fois) et président, mais il n’a jamais gagné une élection nationale. Il était membre de 12 cabinets et a eu comme mandats la Défense, les Affaires étrangères et les Finances.

Il est peut-être mieux connu en Occident pour son rôle dans les négociations qui ont abouti aux Accords d’Oslo de 1993 et qui lui ont valu, avec Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, le Prix Nobel de la Paix.

Pourtant, pour les Palestiniens et leurs voisins du Moyen-Orient, les antécédents de Peres sont très différents de sa réputation en Occident comme « colombe » infatigable, et ce qui suit est loin d’être un résumé complet du dossier Peres au service du colonialisme et de l’apartheid.

Bombes atomiques

Entre 1953 et 1965, Peres a servi d’abord comme directeur général du ministère de la Défense d’Israël, puis comme vice-ministre de la Défense. En raison de ses responsabilités à l’époque, Peres a été décrit comme « l’architecte du programme d’armement nucléaire d’Israël », qui à ce jour, « reste en dehors du contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). »

Selon des procès-verbaux restés secrets et révélés depuis, Peres a rencontré en 1975 le ministre de la Défense sud-africain PW Botha et a « offert de vendre des ogives nucléaires au régime de l’apartheid. » En 1986, Peres a autorisé l’opération du Mossad où le technicien nucléaire Mordechai Vanunu a été enlevé en Rome.

Cibler les citoyens palestiniens

Peres a joué un rôle clé dans le régime militaire imposé aux citoyens palestiniens jusqu’en 1966, en vertu duquel les autorités volaient massivement les terres et déplaçaient les habitants.

Un des outils [de la dépossession] était l’article 125 qui a permis que la terre palestinienne soit déclarée zone militaire fermée. Ses propriétaires étaient interdits d’accès, les terres devant ensuite être confisquées comme « incultes ». Peres s’est félicité de l’article 125 comme un moyen de « poursuivre directement la lutte pour la colonisation juive et l’immigration juive. »

Une autre des responsabilités de Peres en sa qualité de directeur général du ministère de la Défense était de « judaïser » la Galilée, c’est-à-dire, de poursuivre les politiques visant à réduire la taille de la région où vivaient des citoyens palestiniens et d’étendre celle où vivaient les juifs.

En 2005, comme vice-Premier ministre dans le cabinet d’Ariel Sharon, Peres a renouvelé ses attaques contre les citoyens palestiniens avec des plans pour encourager les Israéliens juifs à s’installer en Galilée. Son plan de « développement » couvre 104 communautés – 100 d’entre elles exclusivement juives.

Dans des conversations secrètes avec les responsables américains la même année, Peres prétendait Israël avait « perdu un million de dunams [1000 kilomètres carrés] de terres du Néguev pour les Bédouins », ajoutant que le « développement » du Néguev et de la Galilée pouvait « soulager ce [qu’il] appelait une menace démographique ».

Soutenir les colonies illégales en Cisjordanie

Alors que le projet de colonisation d’Israël en Cisjordanie est vu comme principalement associé au Likoud et d’autres partis nationalistes de droite, c’est en fait le parti Travailliste qui commencé la colonisation du territoire palestinien nouvellement conquis. Et Peres y a participé avec enthousiasme.

Durant le mandat de Peres comme ministre de la Défense, de 1974 à 1977, le gouvernement Rabin a établi un certain nombre de colonies clés en Cisjordanie, dont celle d’Ofra pour laquelle de grandes sections ont été construites sur des terres palestiniennes volées.

Après avoir joué un rôle de premier plan dans les premiers jours de l’entreprise de colonisation, Peres est intervenu ces dernières années pour contrecarrer toute mesure, aussi modeste soit-elle, pouvant sanctionner les colonies illégales – toujours, bien sûr, au nom de la protection des « négociations de paix ».

Le massacre de Qana

En tant que Premier ministre en 1996, Peres a ordonné et supervisé l’agression militaire « Raisins de la colère« , au cours de laquelle les forces armées israéliennes ont massacré quelque 154 civils au Liban et en ont blessé 351 autres. L’opération, largement soupçonnée d’avoir été un spectacle pré-électoral de démonstration de force, a délibérément transformé les civils libanais en cibles.

Selon le site officiel israélien Air Force, l’opération a impliqué « le bombardement massif des villages chiites dans le sud du Liban, afin de provoquer un flux de civils au nord, vers Beyrouth, appliquant ainsi la pression sur la Syrie et le Liban pour qu’ils bloquent le Hezbollah. »

L’incident le plus notoire de la campagne a été le massacre de Qana, quand Israël a bombardé un camp des Nations Unies et tué 106 civils qui s’y abritaient. Un rapport de l’ONU a déclaré que, contrairement aux affirmations israéliennes, il était « peu probable » que le bombardement « ait été le résultat d’erreurs techniques et/ou de procédure. »

Plus tard, les artilleurs israéliens ont dit à la télévision israélienne qu’ils n’avaient aucun regret pour le massacre, puisque les morts étaient « juste un groupe d’Arabes. » Quant à Peres, sa conscience était tout aussi propre : « Tout a été fait selon une logique claire et d’une manière responsable, » a-t-il dit. « Je suis en paix. »

Gaza – défendre le blocus, la brutalité, la violence

Peres a décidé de lui-même d’être un des ambassadeurs mondiaux les plus importants d’Israël au cours des dix dernières années, tandis que la bande de Gaza était soumise à un blocus dévastateur et à trois grandes offensives militaires israéliennes. Malgré l’indignation mondiale devant ces politiques, Peres a toujours soutenu la politique de punition collective et la brutalité militaire.

En janvier 2009, par exemple, malgré les appels lancés par les « organisations israéliennes de défense des droits humains … pour que l’opération ‘Plomb durci’ soit arrêtée », Peres a décrit « la solidarité nationale derrière l’opération militaire » comme « une heure de gloire d’Israël. » Selon Peres, le but de l’agression « était de donner un coup puissant à la population de Gaza afin qu’elle perde son envie de tirer vers Israël. »

Au cours de l’opération militaire « pilier de défense » en novembre 2012, Peres « a pris la tâche de contribuer à l’effort de relations publiques d’Israël, transmettant le récit israélien aux dirigeants de la planète », selon la citation d’Ynetnews. A la veille de l’offensive israélienne, « Peres a averti le Hamas que s’il veut une vie normale pour les habitants de Gaza, alors il doit cesser de tirer des roquettes sur Israël. »

En 2014, lors du bombardement sans précédent de Gaza, Peres s’est escrimé encore une fois pour blanchir les crimes de guerre. Après que les forces israéliennes aient massacré quatre petits enfants jouant sur une plage, Peres savait qui blâmer – les Palestiniens : « C’est une zone où nous avions prévenu qu’elle serait bombardée, » a-t-il affirmé. « Et malheureusement, ils n’ont pas écarté les enfants. »

Le blocus étouffant, condamné internationalement comme une forme de punition collective tout à fait illégale, a également été défendu par Peres – précisément parce qu’il est une forme de punition collective. Comme Peres l’a dit en 2014 : « Si Gaza cesse le feu, il n’y aura pas besoin d’un blocus. »

Le soutien de Peres pour la politique de punition collective s’est également étendu à l’Iran. Commentant en 2012 les rapports selon lesquels six millions d’Iraniens souffrant de cancer ont été incapables d’obtenir le traitement médical nécessaire en raison des sanctions, Peres a déclaré : « S’ils veulent revenir à une vie normale, qu’ils deviennent normaux. »

Fier de ses crimes jusqu’à la fin

Peres a toujours été clair sur l’objectif d’un accord de paix avec les Palestiniens. Comme il l’a dit en 2014 : « La première priorité est de préserver Israël comme un État juif. Tel est notre objectif central, ce pour quoi nous nous battons ». L’année dernière, il a réitéré ces sentiments dans une interview avec l’Associated Press, en disant : « Israël doit mettre en œuvre la solution de deux États dans son propre intérêt, » afin de ne pas « perdre sa majorité [juive]. »

Ce rappel révèle le fond du soutien des Travaillistes pour les Accords d’Oslo. Rabin, parlant à la Knesset peu de temps avant son assassinat en 1995, était clair sur le fait que ce que voulait Israël des Accords d’Oslo était une « entité » palestinienne qui serait « moins qu’un État ». Jérusalem serait la capitale indivisible d’Israël, les colonies clés seraient annexées et Israël resterait dans la vallée du Jourdain.

Il y a quelques années, Peres a calomnié les Palestiniens comme pratiquant « l’auto-victimisation » et il déclara : « Ils se victimisent. Ils sont inutilement victimes de leurs propres erreurs. » Une condescendance aussi cruelle était caractéristique d’un homme pour qui la « paix » a toujours signifié la pacification coloniale.

28 septembre 2016 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah

E) Shimon Pérès : "L’homme des rendez-vous manqués avec la paix et la solution à deux Etats" (PCF)

Ancien co-récipiendaire du prix Nobel de la Paix (1994) pour les accords d’Oslo, Shimon Pérès aura néanmoins, après l’assassinat d’Yitzhak Rabin en 1995, accompagné leur lente agonie. Malgré les lourdes concessions palestiniennes, ces accords n’ont jamais été respectés par la partie israélienne et auront ouvert la voie à la prise du pouvoir des colons extrémistes sous les mandats de Benyamin Netanyahu.

En 2009, alors président de la République, Shimon Pérès approuvait sans état d’âme les bombardements israéliens sur Gaza (opération « Plomb durci ») ; en 2014, après avoir quitté ses fonctions, il en appelait au contraire à mettre un terme à l’ « opération Bordure protectrice » : Shimon Pérès aura entretenu les ambiguïtés comme l’illustre la fin du parcours politique qui fut marquée par son départ du Parti Travailliste et son ralliement à Ariel Sharon et à son parti, Kadima (droite dite centriste), dont il devint l’une des figures de proue.

C’est que Shimon Pérès sans avoir jamais fait de carrière militaire fut l’un des principaux artisans de la puissance militaire israélienne, et en particulier — avec l’appui de la France et des Etats-Unis — de sa capacité nucléaire puissance nucléaire qu’il tenait pour principal moyen de garantir la pérennité de l’Etat d’Israël.

Au fond, Shimon Pérès aura été l’homme des rendez-vous manqués avec la paix et la solution à deux Etats dans le respect des conventions et résolutions de l’ONU.

F) Les deux visages de Shimon Pérès (Denis Sieffert, Politis)

Il a été, aux yeux des Occidentaux, et d’une certaine gauche, la face aimable de la colonisation, sans qui la politique israélienne n’aurait pas trouvé autant de soutiens.

On ne peut rien contre les réputations. La rumeur, l’étiquette, l’image sont plus fortes que la réalité. Surtout lorsqu’elles résultent d’une fabrication politique. Les commentaires qui ont suivi la mort de Shimon Pérès ont une nouvelle fois témoigné de cette loi d’airain de l’information. L’ancien président de l’État d’Israël sera définitivement parti en « homme de paix », croulant sous les hommages officiels. Pas étonnant qu’à Ramallah, à Naplouse ou à Gaza, on ait mal vécu ces moments d’hypocrisie planétaire.

Car si on veut un instant adopter le point de vue palestinien, c’est un tout autre personnage qui apparaît :

- Pérès fut d’abord le missi dominici du jeune État hébreu auprès de notre Quatrième République pour en rapporter les armes les plus sophistiquées.

- Il a été ensuite le directeur adjoint à l’armement qui a obtenu de la France la construction d’une centrale nucléaire dans le Néguev.

- Il a été celui qui a ourdi avec Paris et Londres l’offensive contre l’Égypte de Nasser en 1956.

Toutes choses qui ne font pas de lui un homme de paix.

On objectera que c’était l’époque de l’Israël fragile. Un pays naissant, encore à la portée de ses voisins arabes. C’est une autre histoire qui commence à partir de 1967. Au lendemain de la guerre des Six-Jours, l’État hébreu est militairement surpuissant, et solidement installé sur 78 % de la Palestine. Le rapport de force a définitivement basculé. Tout sioniste qu’il était, Pérès aurait pu à cet instant devenir en effet « homme de paix ». Au lieu de ça, il milite activement en faveur de la colonisation de Jérusalem-est et de la Cisjordanie, prête la main à l’organisation de milices chrétiennes anti-palestiniennes au sud Liban. Et – comble d’ironie – en 1979, il reproche au leader de la droite, Menahem Begin, de mener une politique qui « conduira à un État OLP indépendant ».

Mais le pire est encore à venir. En janvier 1996, deux mois après l’assassinat d’Itzhak Rabin, alors que l’opinion israélienne est favorable comme jamais à l’accélération du processus de paix, il fait assassiner un dirigeant du Hamas. Le mouvement islamiste réplique par une série d’attentats meurtriers. La fenêtre de la paix se referme brutalement. Engagé dans une surenchère avec son rival Benyamin Netanyahou en vue des élections de juin, il ouvre un nouveau front au sud-Liban, où l’aviation israélienne finit par bombarder un bâtiment de l’ONU dans lequel une centaine de civils avaient trouvé refuge… Et il perd l’élection de juin.

Son autre crime est politique. En février 2001, en pleine intifada, il entre au gouvernement d’Ariel Sharon pour mener avec lui une campagne de répression sans précédent. Il finira même par rejoindre le vieux général dans la formation que celui-ci vient de créer. Il n’est pas exagéré de dire qu’il a ainsi largement contribué à la quasi-liquidation du Parti travailliste, qui ne s’en est toujours pas remis. Ces faits ne peuvent être contestés. Or, s’ils ont parfois été rappelés ici ou là, en ces journées d’hommage, ce fut toujours sur un mode mineur. Certes, d’autres faits peuvent leur être opposés. Pérès, comme d’ailleurs la majorité des Israéliens, a condamné, en 1982, les massacres des camps de Sabra et Chatila.

Et, bien sûr, on peut porter à son crédit d’avoir œuvré aux accords d’Oslo de 1993. Encore faudrait-il analyser ce que furent ces accords d’une totale asymétrie. Les plus magnanimes diront qu’ils pouvaient être porteurs d’une autre dynamique. Rabin serait peut-être allé plus loin. Pérès ne l’a pas fait. Et surtout pas avec son fameux projet de Grand Moyen-Orient, inspiré du modèle européen, qui noyait subtilement la question palestinienne.

On aura compris que mon propos ici n’est pas tant de retracer le long itinéraire de Shimon Pérès que de réfléchir à cette opposition d’images. « Un grand ami de la France qui s’adressait à elle parce qu’il savait quel rôle elle pouvait jouer pour la paix », a commenté François Hollande. Mais un Palestinien l’aurait dit autrement : Pérès s’est souvent adressé à la France parce qu’elle l’avait aidé à constituer un redoutable arsenal militaire ; et peut-être plus encore parce qu’il savait que Paris était le vecteur indispensable d’un habile discours politique.

Notre monde a posé sur la vie de cet homme un regard biaisé. Certes, Pérès n’est pas Sharon. Le second était un baroudeur, et le premier, un intellectuel byzantin, séduisant et cultivé, capable d’humour, et dont la fréquentation flattait les journalistes. Tout sauf une brute. Il n’a sûrement pas été le « génie de la paix » vu par Bill Clinton, mais celui de la hasbara, la propagande israélienne. Il a été, aux yeux des Occidentaux, et d’une certaine gauche, la face aimable de la colonisation. Celui sans lequel la politique israélienne n’aurait pas trouvé autant de soutiens et de complicités. Mais, pour les Palestiniens, la colonisation ne peut pas avoir de face aimable. Et comme s’il fallait que cette cérémonie d’obsèques soit décidément un moment d’hypocrisie, les commentateurs ont vu dans la malheureuse poignée de mains entre Mahmoud Abbas et Benjamin Netanyahou « un signe d’espoir ». Le lendemain, le gouvernement israélien donnait son feu vert à la construction de 98 logements dans une colonie de Cisjordanie, et à la construction d’une vaste zone industrielle près de Ramallah. Tout est là.

par Denis Sieffert publié le 5 octobre 2016


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