Le peuple de gauche garde ses repères dans la tourmente (sondage IFOP)

dimanche 18 septembre 2016.
 

La troisième vague du baromètre annuel Ifop, publié chaque année pour la Fête de l’Humanité, montre que le « peuple de gauche » est toujours bien vivant et ferme sur ses convictions, en dépit de la démobilisation suscitée par la déception à l’égard du gouvernement.

À en croire nombre de commentateurs ces derniers mois, la montée des préoccupations identitaires en France et en Europe serait en voie de défaire les clivages politiques traditionnels. S’il est une identité qui a la vie dure, c’est pourtant celle qui structure la gauche et la droite dans notre pays depuis plus de deux siècles, si l’on en juge par les résultats de la troisième vague de notre baromètre annuel Ifop sur les valeurs de gauche.

Moins « un problème d’identité que de mobilisation »

Immigration, libéralisme, aides sociales, redistribution, égalité des droits… Sur chacune des grandes questions qui taraudent le débat politique en ces temps de primaires présidentielles, les différences d’approche dessinent une démarcation entre « deux visions résolument différentes de la France et de la société », selon Frédéric Dabi, directeur adjoint du département opinion de l’Ifop. Le public de la Fête de l’Humanité, qui se tient depuis jeudi soir et jusqu’à dimanche à La Courneuve, pourra trouver quelques raisons d’espérer en constatant que le « peuple de gauche » a toujours les idées claires sur le corpus de notions et de priorités qui le constitue, à rebours de l’idée d’une droitisation de la société française. Pour Frédéric Dabi, les écarts d’opinion entre droite et gauche « jamais observés » depuis le début du baromètre, en 2014, sur l’immigration (34 points d’écart, + 6 points en un an), la liberté des entreprises (28 pts d’écart, + 2) et la responsabilité des chômeurs (24 pts d’écart, +4) montrent que le clivage gauche-droite résiste aux offensives de type Macron, mais aussi aux tentatives de créer « deux gauches irréconciliables ». « Le peuple de gauche existe toujours et ses contours restent remarquablement stables après quatre années de pouvoir de François Hollande et de défaites électorales de la gauche », souligne le sondeur, qui relève que la gauche souffre moins d’« un problème d’identité que de mobilisation ».

Mieux  : si, sans surprise, la liberté, la solidarité et l’égalité continuent d’être des termes plébiscités à gauche, tandis que la finance, le capitalisme et l’austérité croupissent toujours au fond du classement, les sondés de gauche ont affermi leur position depuis la dernière vague de notre sondage, sur des notions centrales comme les services publics (74 %, + 7), les syndicats (57 %, + 5), l’impôt (47 %, + 4) et – ultime pied de nez au gouvernement – le Code du travail (71 %, + 2). Autant de mots qui, mis bout à bout, forment le fil de convictions non conformes au discours dominant, voire en rébellion ouverte contre le dénigrement des luttes syndicales, de l’impôt, de la dépense publique et même de l’égalité tout court, ces derniers mois, de la part de la droite mais aussi de la gauche au pouvoir. Quant à l’égalité (85 %, + 7 points), on notera qu’elle vient ironiquement voler la troisième place à la laïcité, à laquelle la gauche est toujours très attachée (79 %, + 3 points), en pleine polémique sur l’islam et le burkini… Le rebond de la cote du communisme (34 %, + 6), comparé au tassement de celle du socialisme (65 %, - 3) exprime aussi une demande nouvelle de radicalité de gauche, en réponse au raidissement libéral autoritaire du gouvernement.

«  L’effet loi travail est énorme  », juge Frédéric Dabi, de l’Ifop

Ce creusement du fossé entre la gauche et le gouvernement qui s’en réclame est confirmé de façon éclatante par le jugement porté sur la politique du gouvernement  : pour 75 % des sondés de gauche (+ 13, dont 56 % des proches du PS), l’action de Hollande et de Valls ne correspond pas à l’idée qu’ils se font d’une politique de gauche – un niveau encore jamais atteint depuis le début de ce baromètre en 2014. « L’effet loi travail est énorme », juge à cet égard Frédéric Dabi, qui relève également qu’ils sont désormais 52 % à gauche (+ 3) – nouveau record – à ne pas voir de différence entre la politique menée par Nicolas Sarkozy jusqu’en 2012 et celle de son successeur. Reste – et c’est réjouissant – que cela n’entraîne ni résignation à gauche ni repli protestataire  : 63 % (- 3) continuent de voir des différences entre la gauche et la droite, quand 78 % (+ 5) estiment que la gauche « peut, si elle le veut », gouverner sans se renier, et 77 % pensent qu’une politique répondant à leurs attentes peut être mise en œuvre. Ultime claque à Manuel Valls  : son discours sur « la France en guerre » ne convainc pas non plus, avec 58 % à gauche qui ne partagent pas cet avis.

Sondage : les valeurs de progrès sont en hausse

Pour chacune des opinions suivantes, pouvez-vous me dire si vous êtes tout à fait d’accord, plutôt d’accord, plutôt pas d’accord ou pas du tout d’accord ? Ensemble des personnes de gauche.

Sébastien Crépel

Pour prendre connaissance de plusieurs tableaux très intéressants, cliquer sur l’adresse URL portée en source (haut de page, couleur rouge).


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